Les employeurs aux prises avec la responsabilité de renflouer les lourds déficits de solvabilité des régimes de retraite à prestations déterminées offerts à leurs employés viennent de recevoir un coup de pouce de la part du gouvernement Charest.

Comme nous l'avait révélé précédemment le nouveau président de la Régie des rentes du Québec (RRQ), Denys Jean, le gouvernement vient d'accepter de prolonger pour une durée de deux ans les mesures temporaires d'allègements financiers qui permettent de renflouer le déficit de solvabilité sur une période de 10 ans au lieu de seulement cinq ans. La prolongation court jusqu'au 31 décembre 2013.

Au moins la moitié des 769 régimes à prestations déterminées offerts au Québec par les entreprises (606 régimes) et les municipalités (163 régimes) affichent présentement un imposant déficit. Les employeurs crient au secours, étant entièrement responsables de les renflouer afin de respecter les promesses de rentes à verser aux employés et retraités. Selon la firme Aon Hewitt, le degré de solvabilité médian des régimes est tombé à 69% à la fin du troisième trimestre, soit 14 points de pourcentage de moins qu'à la fin de décembre 2010. Cela laisse présager que la moitié des régimes ne peuvent présentement couvrir que 69% ou moins de leurs engagements financiers (rentes prévues), dans l'hypothèse où ces employeurs fermaient leurs portes.

Pour montrer la gravité de la crise qui frappe les régimes de retraite à prestations déterminées, la firme de services-conseils Morneau Shepell rapporte, en vertu de son «Indice de risques inhérents aux régimes de retraite», que le quart des régimes offerts par un échantillon de 100 grandes sociétés ouvertes canadiennes sont à risques très élevés. Leur indice de risques dépasse huit fois l'indice médian.

Chez les entreprises privées, le renflouement des gros déficits de solvabilité a pour effet de fragiliser le bilan financier.

«Conscient de ses responsabilités, le gouvernement souhaite aider les entreprises, sécuriser les régimes de retraite et protéger les retraités», explique Julie Boulet, la ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale et ministre responsable de la Régie des rentes du Québec.

Lors de cette prolongation de deux ans, le gouvernement Charest mènera parallèlement une «réflexion» sur l'avenir des régimes à prestations déterminées. La réflexion du comité portera sur un système de retraite viable et performant pour l'avenir, précise la ministre Boulet.

Qu'en pensent les experts? «Concernant le prolongement des mesures d'allègement, elles sont accueillies favorablement. La période de 2 ans donnera le temps nécessaire pour repenser le financement et l'avenir des régimes de retraite à prestations déterminées. Si on veut que ces régimes survivent, il faut revoir comment on mesure le coût de garantir une prestation ou comment on répartit le risque entre les intervenants (employeur, employés et retraités)», affirme Claude Lockhead, vice-président principal, Aon Hewitt.

«Par exemple, explique l'expert, le fait d'exiger des employeurs de financer le régime comme s'il devait se terminer (base de solvabilité) et qu'à ce moment, tous les droits sont évalués en prenant des rendements disponibles sur des placements sans risque, augmente le coût des régimes et ne tient pas compte du fait que les caisses de retraite sont investies pour le long terme.»

Lors de l'entrevue qu'il nous avait accordée, Denys Jean laissait clairement entendre qu'il fallait trouver une solution permanente à la crise financière des régimes de retraite à prestations déterminées.

«Est-ce qu'on peut développer, disait-il, des régimes qui sont comme des alternatives aux cotisations déterminées (rentes non garanties), peut-être même aux prestations déterminées (rentes garanties), qui donnent des solutions. Un régime qui serait dans le type de prestations cibles.»

Retenez ce nom: régime à prestations cibles. Il ressemble au régime à prestations déterminées, à l'exception de la garantie d'offrir une généreuse rente! La cotisation de l'employeur est fixe. Cela décharge l'employeur de la responsabilité de combler le déficit de solvabilité. La conséquence: les prestations (les rentes) peuvent être réduites advenant un déficit. Eh oui! Dans un régime à prestations cibles, les déficits et les risques sont à la charge des participants et non des employeurs.

Prix de consolation: les surplus, appartiennent aux participants. Bonne chance!