La Chine, l'Inde, le Brésil et d'autres pays émergents sont en ralentissement. Pour retrouver leur vitesse de croisière, ils devront réduire les taux d'intérêt, croient des experts.

En abaissant son taux directeur jeudi (-0,25% à 1,25%), la Banque centrale européenne (BCE) et son nouveau patron, Mario Draghi, ont fait une volte-face aussi importante que surprenante. Et ce n'est pas fini.

La Banque centrale de Chine pourrait emboîter le pas sous peu, en relâchant les restrictions sur le crédit ou même en réduisant les taux d'intérêt. La raison: le puissant secteur manufacturier chinois a enregistré en octobre sa plus faible croissance en près de trois ans. L'«usine du monde» accuse aussi un ralentissement de ses nouvelles commandes et même de ses exportations.

Selon le Bureau national des statistiques, ces mauvaises performances confirment que la Chine est touchée par une demande en berne en Europe, premier partenaire commercial du pays, ainsi qu'aux États-Unis.

«La chute [des indices manufacturiers] montre que la croissance économique va probablement ralentir davantage», prévenait la semaine dernière un analyste du gouvernement.

Qui plus est, les prix des maisons ont légèrement diminué en octobre (-0,2%), soit une deuxième baisse mensuelle d'affilée. C'est tout un retournement pour l'immobilier chinois, qui nous avait habitués à une montée en flèche ces dernières années.

Clairement, les hausses répétées de taux d'intérêt et les sévères contraintes sur le crédit, que Pékin a imposées depuis un an, commencent à refroidir ce secteur surchauffé.

Ajoutez à cela le fait que l'inflation montre - enfin - des signes d'apaisement (6,1% en septembre contre 6,5% en juillet), et tout porte à croire que le gouvernement chinois voudra assouplir les conditions du crédit, avancent la Banque HSBC et le courtier Citic Securities.

Brésil, Inde et les autres

Or, la Chine n'est pas seule à pâtir de la crise européenne et de la panne américaine.

Le Brésil et l'Inde sont aussi secoués, laissant voir des fissures dans la muraille du BRIC (Brésil, Russie, Inde et Chine).

En Inde, l'important secteur des services (60% de l'économie) s'est contracté pour un troisième mois d'affilée en octobre. Après 13 hausses consécutives des taux d'intérêt depuis mars 2010, les autorités monétaires indiennes devront donc changer leur fusil d'épaule, affirment des économistes.

À l'autre bout du monde, la Banque centrale du Brésil vient tout juste de passer en marche arrière, en abaissant contre toute attente son taux directeur le mois dernier (-0,5% à 11,5%). Une décision que viennent appuyer les dernières données économiques.

La production industrielle de la plus grande économie sud-américaine a enregistré sa plus forte baisse en cinq mois en septembre (-2% en un mois). En plus des problèmes des pays «riches», une devise surévaluée (le real) freine aussi l'économie brésilienne.

Si bien que les experts tablent maintenant sur de nouvelles baisses des taux pour soutenir la croissance et dégonfler le taux de change du pays.

Et avec plus de recul, on se rend compte que d'autres économies en forte croissance devront également ajuster le tir.

Des ralentissements plus ou moins marqués de l'industrie et de la consommation ont également été notés dernièrement en Corée du Sud, en Indonésie, à Taiwan et même en Australie, qui a d'ailleurs réduit ses taux jeudi dernier.

Une bonne nouvelle, en somme, car la détente du crédit donnera un nouvel élan à ces économies, et du coup, aux pays occidentaux qui en ont bien besoin.

Un poids accru

L'avenir nous dira si tous ces pays voudront abandonner leur lutte contre l'inflation pour favoriser la croissance. Une chose est certaine cependant, les troubles connus par la zone euro et la stagnation des économies avancées sont en train de bouleverser l'équilibre planétaire.

Le poids des pays émergents, sur le plan économique, va ainsi augmenter plus rapidement que prévu dans le contexte actuel, avance une étude du cabinet Ernst&Young.

Selon cette firme, les 25 économies les plus dynamiques compteront pour 50% du produit intérieur brut mondial (mesuré à parité de pouvoir d'achat) en 2020. Elles représenteront aussi 38% des dépenses de consommation, 72% des emplois mondiaux et 52% de la demande de voitures.

Qui faut-il surveiller? Outre les «suspects habituels» au sein du BRIC, Ernst&Young inclut parmi les vedettes montantes le Viêtnam, l'Indonésie, la Thaïlande, la Corée du Sud, la Pologne, la Turquie et le Chili entre autres. Et non, le Canada ne fait pas partie du groupe...