Lettre à Raymond Bachand

Monsieur le ministre,

Je crois que vous êtes l'homme tout désigné du gouvernement Charest pour mettre fin à la flagrante et coûteuse niaiserie gouvernementale rapportée cette semaine par mon collègue Francis Vailles, sous le titre «Hydro dans la ligne de mire du fisc».

Je fais allusion ici au litige qui oppose Hydro-Québec et Revenu Québec devant la Cour du Québec. À bout de patience devant l'entêtement de Revenu Québec à vouloir lui soutirer un supplément de taxe sur le capital de 4,7 millions de dollars, Hydro-Québec a décidé de recourir aux tribunaux pour trancher le différend en sa faveur et ainsi éviter de payer cette facture fiscale.

En tant que ministre des Finances responsable du généreux dividende versé annuellement par Hydro-Québec et également ministre du Revenu responsable de l'Agence Revenu Québec, vous devriez vous mêler personnellement de cette ridicule chicane fiscale entre les deux vaches à lait du gouvernement.

Vous, monsieur Bachand, qui êtes licencier en droit et détenteur par surcroît d'une maîtrise (M.B.A) et d'un doctorat (D.P.A) de la Harvard Graduate School of Business Administration, savez pertinemment qu'il en coûte généralement les yeux de la tête lorsqu'une cause impliquant des organismes gouvernementaux se retrouve devant les tribunaux.

Et, dans ce cas-ci, il est clair que le gouvernement du Québec va se retrouver forcément perdant en raison du gaspillage de temps (des fonctionnaires) et d'argent (salaire des fonctionnaires, honoraires et frais d'avocats) généré par ce litige intragouvernemental.

Eh oui! Il est évident à sa face même que c'est finalement le gouvernement qui va se retrouver perdant dans cette rocambolesque chicane fiscale entre Hydro et Revenu Québec. Pourquoi? Parce que peu importe le gagnant et le perdant, les frais engagés pour régler le litige vont automatiquement réduire la somme nette qui aboutira dans les coffres du gouvernement.

Est-il important de rappeler qu'il existe ici un jeu de vases communicants dans ce litige puisque les bénéfices de Revenu Québec et Hydro-Québec aboutissent dans les coffres du même gouvernement.

Revenons au litige en question. Revenu Québec reproche à Hydro-Québec d'avoir omis d'inclure dans le calcul de la taxe sur le capital sa quote-part des six coentreprises dans lesquelles la société est actionnaire, et ce, pour les années 2004, 2005 et 2006. Aux yeux de Revenu Québec, Hydro-Québec lui devrait donc en taxe sur le capital une somme additionnelle de 4,7 millions de dollars.

Hydro-Québec s'oppose à cette réclamation, en alléguant que le fisc avait toujours reconnu que le calcul de la taxe sur son capital se faisait en excluant ses participations dans les coentreprises.

Remettons les pendules à l'heure. Cette taxe sur le capital (que vous avez d'ailleurs abolie cette année) va directement dans les coffres du gouvernement du Québec. Au cours des trois années litigieuses, Hydro-Québec vous a versé 915 millions en taxe sur le capital.

Revenu Québec estime qu'Hydro lui doit un petit 4,7 millions de plus pour cette même période. Un demi de un pour cent de plus que la somme versée...

Non, mais c'est quoi le problème quand on sait que cette taxe sur le capital versée par Hydro-Québec a réduit d'autant le bénéfice net d'une société d'État qui appartient à 100% au gouvernement.

On échange quatre 25 cents pour 1$.

Pourquoi Revenu Québec se bat-il bec et ongles pour soutirer ces 4,7 millions à Hydro-Québec quand on sait qu'au bout du compte, le gouvernement n'en retirera rien de plus!

J'espère que Revenu Québec ne travaille quand même pas à la commission sur les sommes perçues!

Pour régler cette niaiserie qui ternit l'image du gouvernement et de ses deux vaches à lait, je vous suggère de convoquer en téléconférence les deux PDG, soit Thierry Vandal d'Hydro-Québec et Jean St-Gelais de Revenu Québec.

Pour leur dire quoi? «Ça suffit le niaisage et le gaspillage d'énergie.»