Les chances de revoir l'an prochain à Montréal la course Nationwide NASCAR sont quasi nulles.

Pour revoir nos vedettes de la course automobile, les Jacques Villeneuve, Patrick Carpentier, Alexandre Tagliani et compagnie courir dans le NASCAR, il faudra aller aux États-Unis. Ou peut-être au Mosport International Raceway.

Les nouveaux propriétaires du célèbre circuit ontarien (la F1 y courait avant son déménagement à Montréal) souhaiteraient sans doute prendre la relève du circuit Gilles-Villeneuve.

Pourquoi risquons-nous de perdre la seule course NASCAR à se dérouler au Canada? Parce que le promoteur de l'épreuve, l'International Speedway Corporation (ISC), n'a pas réussi jusqu'à présent à convaincre le gouvernement Charest de lui verser une subvention dans le dessein d'éponger une partie du déficit généré annuellement par l'organisation de l'épreuve montréalaise.

Ce déficit s'élèverait autour de 1,6 million par année... Faute d'aide gouvernementale, l'ISC n'entend pas renouveler son contrat avec Montréal et son circuit Gilles-Villeneuve, lequel contrat prend fin dans 11 jours, le 30 juin. La course NASCAR du 19 août prochain serait ainsi la dernière à se dérouler en sol montréalais.

Après la F1...

Après avoir vu Bernie Ecclestone décrocher une subvention annuelle de 15 millions de dollars pour le Grand Prix du Canada, les dirigeants de l'ISC ont essayé l'an dernier d'obtenir eux aussi une aide gouvernementale de la part des gouvernements Charest et Harper. Fait à signaler: dans ce dossier, le fédéral serait à la remorque de la décision provinciale. C'est le ministre des Finances, Raymond Bachand, qui pilote le dossier de la demande d'aide financière de NASCAR.

Les bonzes de l'ISC (cotée au NASDAQ, cette entreprise détient les droits des populaires courses NASCAR) ne se sont pas lancés dans une demande d'aide démesurée, comme l'avait initialement fait le grand manitou de la Formule 1.

On parle ici d'une modeste demande de subvention de 1 million de dollars, soit 500 000$ par ordre gouvernemental.

Québec reste de glace

Pourquoi le ministre Bachand reste-t-il de glace devant la demande des promoteurs de cette unique course NASCAR en territoire canadien?

«Je viens de parler au ministre juste avant qu'il ne rentre en réunion. Le dossier est à l'étude présentement. L'an dernier, nous n'avions pas versé de subvention parce que les retombées économiques prévues n'étaient pas forcément très importantes. Quand on investit l'argent des contribuables dans le contexte de finances publiques que l'on connaît, on doit s'assurer de retombées positives», nous explique sa porte-parole, Catherine Poulain.

Lors du récent Grand Prix de F1, le ministre Bachand a profité de sa présence au circuit Gilles-Villeneuve pour rencontrer les organisateurs de la course montréalaise de NASCAR, dont les représentants de l'ISC et François Dumontier, promoteur du Grand Prix et également organisateur de cette course NASCAR pour l'ISC. Étaient également présents la ministre du Tourisme, Nicole Ménard, et le ministre fédéral des Transports, Denis Lebel, aussi ministre de l'Agence de développement économique du Canada pour les régions du Québec.

Événement touristique?

Selon François Dumontier, la rencontre n'a pas permis de faire avancer le dossier de la demande de subvention de la course NASCAR d'un pas.

«Finalement, à la fin de la rencontre, en discutant avec mes partenaires de l'ISC, on n'avait pas une bonne impression. Ils (Bachand et Ménard) ne reconnaissent pas cet événement-là comme événement touristique. Quand j'entends cela, je capote. Pourtant, on attire du monde des États-Unis, de l'Ontario... Mais c'est sûr que ce n'est pas la Formule 1.»

Les grands patrons de l'Association des hôtels du Grand Montréal (AHGM) et de Tourisme Montréal, William E. Brown et Charles Lapointe, ont toutefois une opinion contraire aux deux ministres du gouvernement Charest. Dans leurs lettres d'appui à la course NASCAR, ils soulignent que cette course procure à Montréal plus de 13 millions de dollars de visibilité en valeurs médias, tout en attirant un nombre intéressant de touristes étrangers. La course montréalaise est la course NASCAR de la série Nationwide la plus écoutée de l'année sur le réseau ESPN.

Pour sa part, Stock-Car Montréal, filiale canadienne de l'ISP, évalue les retombées économiques de la course montréalaise à 25 millions de dollars par année.

Cela dit, François Dumontier s'explique mal la décision des ministres Bachand et Ménard de ne pas reconnaître la vocation touristique de la course NASCAR. «Et de ne pas nous donner un petit coup de main financier pour sauver cette importance course. Ça nous aurait donné deux années de plus pour convaincre l'ISP de nous offrir sa prestigieuse course de la Sprint Cup Series.»

Dans le monde la course automobile, les subventions annuelles sont devenues courantes.

Précisions de François Dumontier. «La Ville d'Edmonton me donne par 1,8 million de dollars par année pour la nouvelle course Indy que j'organise, plus 500 000$ de services par année. L'entente est de cinq ans. La Ville de Toronto, qui a aussi une course Indy, avait signé un contrat de trois ans, à un million par année de subvention, avec le promoteur. Bernie, on le sait, ramasse 15 millions par année pour le Grand Prix. Le Grand-Prix de Trois-Rivières reçoit annuellement 300 000$ de Québec.»

Dernier argument invoqué par Dumontier pour sauver la course NASCAR: «Il y a un élément nouveau dans l'équation, que j'ai moi-même dit à M. Bachand, le dimanche du Grand Prix. Il y a trois semaines, le circuit ontarien de Mosport a été vendu à des intérêts très très proches de NASCAR. Là, ce n'est pas qu'on va juste perdre la course à Montréal, mais on va la perdre au profit de Toronto.»

Chose certaine, à défaut d'aide gouvernementale d'ici à la fin du mois, l'ISC retirera «notre» course NASCAR de son calendrier. John Sanders, président de Stock-Car Montréal, filiale de ISC, l'a confirmé dans sa lettre envoyée à la Société du parc Jean-Drapeau.