Parmi les trois grandes provinces canadiennes, c'est au Québec que le coût des soins de la santé publique va proportionnellement augmenter le plus en raison du vieillissement de la population.

À la lumière de l'étude «Vieillissement et coûts de santé» que vient d'effectuer Paul-André Pinsonnault, économiste principal à la Financière Banque Nationale, ça s'annonce pour le Québec vraiment mal d'ici 2031 alors que tous les baby-boomers auront dépassé la barre des 65 ans.

Pour les fins de son étude comparative Québec/Ontario/Colombie-Britannique, il a isolé l'incidence du vieillissement, et ce, en émettant pour hypothèse que la population et la structure des coûts de la santé restaient constantes pour les 20 prochaines années.

Selon les données recueillies par l'Institut canadien d'information sur la santé, les dépenses publiques des soins de la santé au Québec atteignaient en 2010 la somme totale de 24,4 milliards de dollars. M. Pinsonnault a calculé qu'à elle seule, l'incidence du vieillissement fera bondir les dépenses publiques de la santé de 30% d'ici 2030, atteignant la somme astronomique de 31,7 milliards de dollars. C'est donc dire que le seul facteur du vieillissement de la population québécoise aurait comme impact de faire grimper les dépenses publiques de la santé de 7,3 milliards. Je vous rappelle ici qu'on parle en termes constants, c'est-à-dire qu'on ne tient aucunement compte de l'inflation, ni d'aucune augmentation de coûts et de services, ni de croissance de population. En résumé, si la population d'aujourd'hui était plus vieille de 20 ans, comme ce sera le cas en 2031, les soins de la santé publique québécoise nous coûteraient aujourd'hui non pas 24,4 milliards, mais bel et bien 31,7 milliards.

À titre comparatif, M. Pinsonnault a calculé que le vieillissement de la population d'ici 2030 ferait grimper les dépenses publiques de la santé de 21,9% en Ontario et de 15,0% en Colombie-Britannique. Comme vous pouvez le constater, on est bien loin dans ces deux provinces de la hausse dramatique de près de 32% que subira le Québec.

Comment expliquer ces écarts en défaveur du Québec? La réponse réside dans le fait que la proportion de personnes âgées montera plus vite au Québec qu'en Colombie-Britannique et en Ontario.

Autre facteur significatif qui explique selon l'économiste Pinsonnault le grand écart entre la Colombie-Brintannique et le Québec: «Le Québec, dit-il, dépense plus par tête pour soigner les gens de 69 ans et plus.»

Les dépenses publiques de la santé accaparaient à elles seules en 2010 environ 39% du budget du gouvernement du Québec. Quand on applique le facteur du vieillissement de la population, les dépenses publiques de la santé vont gruger près de 51% du budget de la province d'ici 2030.

Et ça risque d'aller de mal en pis. Pourquoi? Parce que l'inflation a généralement tendance à être plus forte pour les soins de santé que pour le reste de l'économie. «Cela pourrait aggraver les pressions sur les budgets provinciaux, les taux de croissance du PIB (produit intérieur brut) nominal risquant de ne pas suivre le rythme des hausses de dépenses de santé dues à une population grandissante, mais vieillissante», ajoute M. Pinsonnault.

Vieillissante, dit-il. Projections démographiques de Statistique Canada à l'appui, pour 100 personnes en âge de travailler, il y avait en 2009 quelque 24 jeunes (moins de 14 ans) et 20 personnes âgées (65 ans et plus). En 2036, la proportion va s'inverser, avec 39 personnes âgées et 26 jeunes.

Les conséquences, selon l'économiste Pinsonnault? «Alors que l'éducation continuera de faire une ponction importante sur les ressources financières des provinces, répondre à la demande croissante des soins de santé et de médicaments sur ordonnance de la part de la population vieillissante deviendra un véritable défi pour celle-ci, au moment où la proportion de gens en âge de travailler diminuera. Les provinces approchent du point critique et elles doivent mettre en place des politiques crédibles pour s'attaquer à cet enjeu de front.»

Comment assainir les finances publiques et ainsi réduire le poids des dépenses publiques de santé dans leurs budgets?

Que ce soit par l'introduction d'un ticket modérateur, d'une bonification de la nouvelle contribution santé, d'une privatisation de certains services de santé... les gouvernements peuvent compter sur le monde de la finance pour trouver des recettes amaigrissantes de santé publique.

Une petite ponction d'impôt-santé avec ça?