En Europe, l'espoir existe toujours au plan économique. Mais c'est au nord surtout qu'on le trouve. La Norvège, la Suède et la Finlande survolent la crise budgétaire européenne.

Un surplus budgétaire (oui, un «s-u-r-p-l-u-s») équivalant à 10% de son économie (PIB). Une croissance enviable. Une devise forte. Et, comble de bonheur, un bas de laine de 500 milliards de dollars canadiens pour les jours difficiles.

Non, on ne parlera pas encore de la Chine, du Brésil ou des autres comètes émergentes de la planète. Il s'agit plutôt d'un petit pays européen: la Norvège.

Alors que les économies «périphériques» de l'Europe, dont l'Irlande, la Grèce ou le Portugal, sont au bord du gouffre, la Norvège peut se targuer d'avoir «le meilleur profil budgétaire du monde», affirme la Royal Bank of Scotland dans une note financière.

En fait, l'ensemble des «Lumières du Nord» affichent ces temps-ci des couleurs éclatantes: richesse pétrolière de la Norvège, puissance industrielle de la Suède et savoir-faire technologique de la Finlande (en dépit des épreuves que traverse le géant Nokia). Voilà autant d'atouts qui ont permis aux économies scandinaves de sortir de la récession en un rien de temps.

Leur bilan global est éloquent: environ 4% pour la Finlande, près de 5% pour la Suède et 3% pour la Norvège... telles sont les prévisions officielles de croissance pour ces pays en 2011. C'est mieux que les gros canons européens, comme l'Allemagne ou la Suisse.

Un refuge

Sur les marchés financiers, on a beaucoup parlé au cours des derniers jours de la flambée des taux exigés pour les titres d'emprunt de l'Irlande, du Portugal et de l'Espagne, ce qui exerce une pression énorme sur les finances de ces pays.

Rien de tel avec les obligations gouvernementales de la Norvège que les investisseurs s'arrachent en cette période d'incertitude.

Considérés comme sûrs, les titres norvégiens ont vu leur valeur marchande grimper, vu la forte demande internationale, ce qui a réduit les coûts d'emprunt de l'État. Au final, les investisseurs ont fait une bonne affaire: les obligations à 10 ans du gouvernement norvégien, par exemple, ont rapporté un rendement global (taux nominal " le gain en capital) de 6,2% depuis le début de 2010, selon l'agence Bloomberg, ce qui surclasse la performance des dettes allemande (4,8%) et suisse (2,5%).

C'est là une preuve de la confiance des investisseurs à l'endroit de ce petit pays de cinq millions d'habitants. «Nous n'avons pas été très affectés par la crise d'endettement européenne. La raison: notre situation budgétaire est très différente», a dit la semaine dernière le gouverneur de la banque centrale norvégienne (Norges Bank), Svein Gjedrem.

Et comment. La Norvège bouclera son budget cette année avec un surplus représentant 9,8 ou 9,9% de son PIB.

Sans surprise, la monnaie locale - la couronne norvégienne - profite aussi de la demande mondiale. Elle a bondi de 11% par rapport au billet vert américain depuis le mois de juin. Le même phénomène s'applique à la couronne suédoise, qui s'est appréciée de 12% par rapport à la devise américaine.

Bref, en Europe, c'est au nord que ça se passe.

Le «fonds pétrolier»

La Norvège a même été le premier pays européen à relever ses taux d'intérêt face à sa reprise économique, imitée en juillet par la Suède. La Scandinavie en entier est sortie relativement indemne de la crise financière 2008-2009. La Norvège, elle, a profité d'un atout exceptionnel dans son jeu: d'immenses richesses pétrolières.

La production pétrolière norvégienne est la septième en importance du monde. Or, pour financer les programmes sociaux le jour où les réserves de brut seront épuisées, le gouvernement s'est doté d'un fonds public alimenté à même les recettes pétrolières.

Créé au début des années 90, le «fonds pétrolier» norvégien - deuxième fonds souverain en importance du monde après celui d'Abou Dhabi - est un modèle du genre: il a dégagé un rendement de 7,2% au troisième trimestre, ce qui a fait grimper sa valeur à 2908 milliards de couronnes (500 milliards de dollars canadiens), vient d'annoncer la Banque de Norvège.

Investi en actions (dans 8300 entreprises), en obligations internationales et, désormais aussi, dans l'immobilier (à Londres notamment), le fonds arrive ainsi à transcender les fluctuations imprévisibles des cours du brut.

En somme, ça va bien au royaume scandinave. En ce qui concerne la Norvège et la Suède en particulier, les investisseurs peuvent dormir tranquille. «Avec ces deux là, la crise de l'endettement (européenne) est la dernière chose qui vient à l'esprit des marchés», a récemment dit un expert de la Standard Bank, de Londres.