S'il est un secteur de l'économie qui a durement souffert de la récession, c'est bien celui de la fabrication. Ce vaste pan de l'économie comprend la production de biens non durables (aliments, textiles, papier, pétrole, produits chimiques) et durables (voitures, meubles, machinerie, produits informatiques et électroniques, métaux et minéraux).

En juillet 2008, juste avant que n'éclate la crise financière, les ventes des entreprises manufacturières atteignaient 53,3 milliards de dollars dans l'ensemble du Canada. Un sommet mensuel sans précédent. Puis, ce fut la chute, aussi brutale que rapide: à peine 10 mois plus tard, en mai 2009, les ventes ne valaient plus que 38,5 milliards, une dégringolade de 28%. Une telle culbute en une période aussi courte est dramatique.

 

Or, les résultats de l'enquête mensuelle de Statistique Canada sur les industries manufacturières montrent que, de mois en mois, ce secteur rattrape lentement mais sûrement le terrain perdu.

Les chiffres les plus récents ont été publiés vendredi et concernent le mois de mars. Les ventes ont alors atteint 44,5 milliards. Certes, c'est encore loin du sommet de l'été 2008, mais l'amélioration par rapport au creux de mai 2009 saute aux yeux. En 10 mois, la hausse dépasse les 16%. Cela signifie que presque la moitié des pertes a déjà été récupérée.

Les montants que nous venons de voir sont exprimés en dollars courants. Si on les ajuste pour tenir compte de l'inflation, on s'aperçoit que les ventes des manufacturiers sont en hausse pour le septième mois consécutif. Autrement dit, tout indique maintenant que le pire est passé. Il se peut même, lorsque nous connaîtrons les résultats des mois suivants, que le rattrapage s'accélère. Les résultats mensuels sont publiés avec six semaines de décalage (ainsi, les chiffres d'avril seront connus le 15 juin).

L'enquête mensuelle de Statistique Canada fournit des informations essentielles pour suivre l'évolution des ventes de mois en mois, mais pour avoir une meilleure idée de la situation, il faut considérer les chiffres sur une année complète. Cela permet notamment de voir quelles sont les industries gagnantes et perdantes.

Ainsi, de mars 2009 à mars 2010, les ventes des manufacturiers, toutes industries confondues, ont augmenté de 10%. De loin, ce sont les constructeurs de véhicules automobiles qui affichent la meilleure performance, avec une hausse de 44%, à 7,2 milliards. Ce chiffre, chose assez rare, dépasse légèrement les ventes de l'industrie alimentaire (7 milliards), qui occupent traditionnellement la première place. Parmi les autres gagnants, on retrouve les fabricants de pièces pour automobiles, en hausse de 36%, les producteurs de minéraux non métalliques (ciment, céramique, chaux, verre), en progression de 27%, les usines de produits textiles (25%), les produits du pétrole et du charbon (21%).

À l'autre bout de l'échelle, les grands perdants sont les fabricants de bateaux et embarcations de plaisance, qui ont vu leurs ventes reculer de 26% en un an, suivis des usines spécialisées dans la fabrication de vêtements (baisse de 17%) et du matériel ferroviaire roulant (12%).

Au Québec, les ventes ont augmenté de 8,9%, légèrement en dessous de la moyenne nationale. L'Ontario, qui achète à lui seul 46% des ventes des industries de la fabrication, a connu une hausse de 12,7%.

Autre bonne nouvelle: le niveau des stocks continue de diminuer. Plus les stocks sont élevés, plus les entreprises ont tendance à diminuer leur production, le temps d'écouler les stocks accumulés. À l'inverse, une diminution des stocks laisse présager une augmentation de l'activité économique. La valeur des stocks, qui frisait les 69 milliards à l'automne 2008, ne se situait plus qu'à 59 milliards en mars 2010, un recul de 14%.

À M. Lalancette: en 2009-2010, les budgets combinés du gouvernement fédéral et des 10 provinces canadiennes s'établissaient à 589 milliards. Dans ma chronique de samedi, je faisais état d'une étude de l'Institut C.D. Howe établissant les dépassements budgétaires du fédéral et des provinces à 65 milliards entre 2000 et 2009. Je persiste à penser que c'est trop. Le fédéral et trois provinces (Ontario, Alberta et Colombie-Britannique) sont responsables de 86% de ces dépassements.