Une bonne partie du plan du ministre des Finances Jim Flaherty pour rétablir l'équilibre budgétaire se fera sur le dos de l'aide internationale. La décision, comme on s'en doute, a provoqué de vives critiques dans les milieux intéressés.

Pourtant, l'enveloppe de l'aide internationale du Canada atteindra cinq milliards par année pendant les cinq prochaines années, ce qui est quand même beaucoup d'argent.

Qu'en est-il au juste? Le Canada, en matière d'aide internationale, en fait-il trop, ou pas assez?

D'abord, il faut savoir que le budget de la semaine dernière complète une promesse faite en 2002 par le ministre des Finances de l'époque, Paul Martin. Celui-ci s'était engagé à doubler le budget de l'aide internationale en huit ans. Effectivement, ce budget est passé de 2,5 milliards en 2002 à cinq milliards avec le budget Flaherty. C'est certainement un bel effort.

Le problème, c'est qu'à partir de l'an prochain, l'enveloppe sera gelée au moins jusqu'en 2015. Les dernières projections du gouvernement faisaient état d'une augmentation annuelle automatique de 8%. En supprimant cette hausse et en gelant les budgets, Ottawa épargnera 4,5 milliards en cinq ans.

D'autre part, le Canada n'est pas le seul pays riche à sabrer dans son budget d'aide internationale. Aux prises avec des difficultés économiques et financières importantes, plusieurs pays ont sabré là où c'est le plus facile: dans l'aide internationale.

En 2005, à la suite du sommet du G8 à Gleneagles (Écosse), les pays membres du Comité d'aide au développement (un organisme comprenant 22 pays riches, et chapeauté par l'Organisation de coopération et de développement économiques) se sont engagés à augmenter substantiellement leur enveloppe d'aide avant 2010. Nous sommes rendus en 2010 et la France, l'Allemagne, l'Autriche, le Portugal, la Grèce et l'Italie n'ont pas atteint leurs objectifs. «Même si une majorité de pays respectera ses engagements, note une récente étude de l'OCDE, les résultats insatisfaisants de plusieurs grands donneurs signifient qu'il y aura un manque à gagner significatif en 2010.»

Dans ces conditions, on peut penser que le Canada n'a pas grand chose à se reprocher.

En fait, le Canada figure parmi les pays les moins généreux. C'était vrai avant le budget Flaherty, ce le sera encore plus après.

La meilleure façon de mesurer l'effort d'un pays est de mesurer sa contribution par rapport à la taille de son économie. Présentement, les cinq milliards d'aide internationale du Canada représentent 0,32% du Produit intérieur brut. En 2015, cette proportion sera de 0,26%. L'effort moyen des 22 pays du Comité se situe à 0,48%. C'est dire à quel point le Canada tire de l'arrière dans ce dossier.

L'aide internationale fournie par les membres du Comité a atteint 131 milliards l'an dernier (les montants qui suivent sont exprimés en dollars américains).

Les données varient considérablement d'un pays à l'autre.

Ainsi, les plus gros fournisseurs d'aide sont les Américains, avec 29 milliards. Cette contribution peut sembler énorme, mais elle ne représente que 0,2% du PIB américain. Cela fait des États-Unis (sur un pied d'égalité avec le Japon) le moins généreux des pays riches. Il faut dire que les choses sont en train de changer rapidement au pays de Barack Obama. En 2007, la contribution américaine se situait à 21 milliards, ou 0,16% du PIB. Apprécions l'ampleur du changement, en deux ans seulement. Les États-Unis se sont déjà engagés à doubler leur aide à l'Afrique entre 2004 et 2010.

La plupart des pays européens qui ont décidé de ralentir leur aide en 2010 font déjà assez bonne figure. Ainsi, l'Allemagne a versé près de 15 milliards en 2009; c'est deux fois moins que les États-Unis; en revanche, ce montant représente 0,38% du PIB allemand. Toutes proportions gardées, les Allemands sont donc deux fois plus généreux que les Américains.

Mais les champions toutes catégories à ce palmarès sont la Suède et la Norvège, qui consacrent toutes deux 1% de leur PIB aux pays pauvres. Ensemble, ces deux petits pays scandinaves fournissent plus de neuf milliards, presque autant que le Japon! Si les Canadiens devaient se montrer aussi généreux que les Suédois, leur contribution à l'aide internationale ne serait pas de cinq milliards, mais de 16 milliards!