Le monde des affaires trouve normal que les hauts dirigeants bénéficient d'un traitement fiscal de faveur sur les milliards de dollars de gains qu'ils encaissent annuellement avec leurs généreux régimes d'options d'achat d'actions. Leurs défenseurs vont même jusqu'à dire que ce serait fiscalement rentable... pour la collectivité.

Alors... il va sans dire que ma chronique de samedi dernier Cadeau de 1 milliard aux détenteurs d'options a été assez mal accueillie par les bénéficiaires des régimes d'options.

Un rappel des faits... fiscaux. Pour la seule année 2007, quelque 78 500 dirigeants ont économisé environ 1,8 milliard d'impôts sur les 8,2 milliards de profits qu'ils ont encaissés grâce à leurs régimes d'options. D'où viennent ces économies d'impôts? C'est simple: seulement la moitié des revenus tirés des régimes d'options sont finalement imposables, contrairement à la totalité des revenus tirés des salaires, primes et commissions.

En effet, pour chaque dollar de profit encaissé à la suite de l'exercice des options (et revente des actions), l'employé bénéficie d'une déduction de 50% au fédéral. Même déduction de 50% dans toutes les provinces, sauf au Québec, où la déduction est de 25%.

Pourquoi le milieu des affaires estime-t-il que le traitement de faveur accordé aux bénéficiaires des régimes d'options représenterait un bon «placement» non seulement pour les entreprises mais également pour la collectivité?

Voici leurs arguments:

1- La rémunération avantageuse par l'entremise d'options d'achat d'actions permet aux entreprises de stimuler l'initiative, d'attirer (et de retenir) les meilleurs dirigeants et employés clés.

2- Cela incite les dirigeants à mettre le focus sur le développement, la croissance et la rentabilité de l'entreprise.

3- La rémunération par options ne coûte rien à l'entreprise, celle-ci n'ayant aucune somme d'argent à débourser, contrairement au versement de salaires et de primes.

4- Si les régimes d'options perdaient leur traitement fiscal privilégié, les entreprises jugent qu'elles devront verser à leurs dirigeants une coûteuse compensation financière pour pouvoir les garder en poste.

5- Partant de là, les entreprises déclareront moins de profits, ce qui réduira les impôts qu'elles payent.

6- C'est ainsi que la «collectivité» se retrouverait fiscalement perdante puisque les entreprises paieraient moins d'impôt.

J'ai une solution à proposer aux grands défenseurs des régimes d'options d'achat d'actions, advenant la pleine imposition des revenus d'options au même titre que les salaires.

Afin de permettre aux dirigeants de conserver le même potentiel de revenu net (après impôts) pouvant être tiré des régimes d'options, que les entreprises leur octroient un nombre additionnel d'options. Ce nombre supplémentaire d'options servira de compensation pour le supplément d'impôts à payer en vertu de la pleine imposition des revenus d'options.

Ma solution règle trois problèmes.

Un, elle permettrait aux gouvernements d'aller chercher annuellement des revenus additionnels d'un milliard et plus d'impôts sur les lucratifs revenus que les hauts dirigeants des sociétés encaissent avec leurs régimes d'options.

Deux, il n'en coûterait pas un cent aux entreprises pour émettre des options additionnelles à leurs dirigeants et employés clés. Donc: zéro dépense additionnelle, les bénéfices restent intacts.

Trois: les dirigeants recevraient le même revenu net après impôts.

Y aurait-il un perdant avec cette solution d'octroyer des options additionnelles?

Oui! Les actionnaires des entreprises. Comme les dirigeants recevraient un plus grand nombre d'options, il va de soi que cela entraînera un grand effet de dilution sur la valeur de leurs actions. Que les dirigeants s'expliquent avec leurs actionnaires...

À l'heure même où le fédéral et les provinces cherchent à renflouer leurs lourds déficits, il me semble opportun de mettre immédiatement fin au traitement de faveur accordé aux bénéficiaires des régimes d'options.