Craignant de subir le couperet du ministre des Finances Jim Flaherty, les promoteurs des sociétés en commandite d'actions accréditives ont multiplié depuis le début de l'année les dépôts de prospectus de nouvelles émissions. L'offre des parts émises en janvier et février dépasse le demi-milliard de dollars.

Ainsi, si jamais le ministre supprimait dès le budget de jeudi les alléchantes déductions fiscales accordées aux acquéreurs d'actions accréditives, les émissions en cours bénéficieraient d'une clause «grand-père». Cela permettrait aux promoteurs de les écouler sans être touchés par une hypothétique compression budgétaire...

Dans le but de redresser l'état de ses finances, on s'attend à voir le gouvernement Harper fermer le robinet (ou en réduire l'ouverture) des déductions fiscales accordées notamment aux plus nantis de la société, comme c'est le cas avec les actions accréditives.

Combien d'impôt ont économisé les amateurs d'accréditives? Pour le gouvernement fédéral, les déductions fiscales des accréditives représentaient en 2009 un manque à gagner annuel de l'ordre de 270 millions de dollars. Pour leur part, l'ensemble des provinces épongeaient l'an dernier un manque à gagner similaire au fédéral.

Lors des bonnes périodes boursières, comme en 2006 et 2007, le manque à gagner fédéral attribuable aux seules actions accréditives avait même dépassé les 700 millions de dollars pour chacune des deux années. Même chose évidemment pour l'ensemble des provinces.

Pourquoi les «riches» investissent-ils dans l'achat d'actions accréditives? Parce que ça leur permet de spéculer à bon compte grâce aux alléchantes déductions fiscales liées aux accréditives. Le coût après impôts des actions accréditives? On parle de 400$ à 600$ par tranche d'investissement de 1000$.

Mais aussi fiscalement alléchant cela soit-il, investir dans les accréditives des mines juniors demeure un placement hautement risqué. Pourquoi? Parce que de toutes les mines qui effectuent annuellement des émissions d'actions accréditives, il y en a peu qui réussiront à maintenir le cours de leurs actions au-dessus du seuil de rentabilité. On entend ici le prix de l'action à partir duquel l'investisseur fera effectivement de l'argent après les impôts fédéral et provincial avec son placement accréditif.

Pour se donner les meilleures chances de succès possible, les vrais adeptes des accréditives misent annuellement sur de trois à cinq sociétés d'exploration minière à la fois. Avec les mines juniors, il suffit bien souvent de tomber sur un bon « cheval « pour réussir à faire passablement d'argent. Chaque année, on retrouve des juniors parmi les titres les plus explosifs. En 2009, ce fut Quest Uranium, dont le cours de l'action a explosé de plus de 5000%, soit 50 fois. Soyons réalistes! Tomber sur un tel titre c'est comme trouver une aiguille dans une grange de foin...

La solution populaire pour investir dans les accréditives? Acheter des parts d'une société en commandite spécialisée dans les actions accréditives. Il y a plusieurs émissions actuellement en cours dont celles de : Ressources Canada Dominion 2010; Qwest Energy 2010 Flow-Through; MRF 2010 Resources; NCE Diversified Flow-Through; Sprott 2010 Flow-Through, Mavrix Quebec 2010 Flow-Through; etc. Pour sa part, CMP 2010 Resources Limited Partnership vient de compléter son émission de 100 millions.

Quel est l'avantage d'investir dans les accréditives par l'entremise d'une société en commandite au lieu d'acheter des actions directement d'une compagnie minière? Il y a l'élément diversification. Une société en commandite détient généralement un imposant portefeuille diversifié d'actions accréditives, émises par une panoplie de mines juniors. La valeur de la part de la société en commandite reflètera ainsi la valeur globale du portefeuille de mines juniors. Cette diversification procure inévitablement une certaine sécurité.

Deuxième atout des sociétés en commandite: il est facile de se procurer des parts de ces sociétés puisque toutes les firmes de courtage y participent généralement à titre de placeurs pour compte. Il faut dire que c'est fort payant de vendre des parts des sociétés en commandite d'actions accréditives: les placeurs récoltent une alléchante commission de vente de 6,75%.

Y a-t-il des inconvénients? Oui! Et le principal inconvénient à mes yeux porte sur les frais de tout acabit. Quand on les additionne, ils représentent quelque 10% de l'investissement initial. C'est énorme! Et si jamais la société en commandite devait s'avérer relativement rentable, dans bien des cas le promoteur se versera une prime additionnelle de 20% sur la plus-value.

Ce qui est à mes yeux nettement abusif.

Pour joindre notre chroniqueur: michel.girard@lapresse.ca