Sur le marché du travail, les emplois d'été ont été tellement rares cette année que les étudiants en quête d'un emploi estival ont connu leur pire saison depuis que Statistique Canada a commencé à compiler ce genre de données, il y a 36 ans.

Cette mauvaise nouvelle fait partie des résultats de l'enquête mensuelle sur la population active, publiée hier par l'agence fédérale de statistique. La population étudiante, telle que définie par Statistique Canada, comprend les jeunes de 15 à 24 ans, qui fréquentaient une école (ou un collège, ou une université) à plein temps à la fin du calendrier scolaire et qui ont l'intention de retourner étudier à plein temps cet automne. Pour être inclus dans la population active, ils doivent occuper ou être activement à la recherche d'un emploi d'été.

L'an dernier, en août, 683 000 étudiants occupaient un emploi d'été à plein temps au Canada; cette année, ils n'étaient que 568 000. C'est une perte record de 115 000 emplois. En ce qui concerne l'emploi à temps partiel, l'hécatombe est moins spectaculaire, mais on compte quand même 14 000 emplois de moins que l'an dernier.

Même au plus fort de la saison estivale, les étudiants ne représentent que 8 % de la population active. Compte tenu de cette proportion relativement faible, on comprend que les chiffres que nous venons de voir prennent des allures de cauchemar.

Voyons plutôt :

-Le taux de chômage relié aux emplois d'été se situait à 11,4 % il y a un an. C'est déjà passablement élevé, mais il faut savoir que le taux de chômage des étudiants est chroniquement plus élevé que dans l'ensemble de la population. Or, cet été, il a bondi à un niveau jamais atteint de 16,4 %.

-Les plus jeunes sont les plus durement touchés. Ainsi, les étudiants âgés de 15 et 16 ans et qui participent au marché estival du travail ont connu un taux de chômage stratosphérique de 26,9 % cet été, contre 18,6 % en août 2008. Les étudiants déjà inscrits à l'université ou sur le point de l'être (20 à 24 ans) s'en tirent mieux avec un taux de chômage de 9,2 % cette année, mais ce chiffre est tout de même deux fois plus élevé que les 4,5 % de l'an dernier.

-De toutes les régions du pays, c'est le Québec, et de loin, qui est le plus ravagé par la catastrophe. La province a perdu 40 000 emplois d'été par rapport à l'an dernier, ce qui a fait grimper le taux de chômage étudiant de 9,9 à 17,1 %. Très très pénible. Au total, entre août 2008 et août 2009, le chômage relié aux emplois d'été a augmenté d'un dramatique 73 % au Québec, contre 48 % dans les Maritimes, 43 % en Colombie-Britannique, 34 % en Ontario et 25 % dans les Prairies. La moyenne canadienne est de 43 %.

Comment en est-on arrivé là?

La grande coupable, bien sûr, c'est la récession.

En temps de crise, le premier poste de dépenses que les ménages ont tendance à sacrifier, c'est le budget-vacances. Or, un nombre considérable d'emplois d'été sont liés à l'hôtellerie, à la restauration, et autres activités touristiques. Il est clair que le ralentissement de ce secteur a porté un coup dur à l'emploi étudiant. En outre, au Québec en particulier, on a connu un été pourri, et cela n'a sûrement pas incité les gens à voyager.

La rénovation domiciliaire est un autre secteur qui fournit de nombreux emplois d'été. On peut certainement penser que de nombreux ménages ont retardé leurs projets de rénovations à plus tard, le temps de laisser passer la crise.

Enfin, de nombreuses entreprises, notamment les bureaux de professionnels, profitent traditionnellement de l'été pour embaucher des stagiaires qui remplacent temporairement la main-d'oeuvre en vacances. Cette année, récession oblige, on s'est passé de stagiaires.

Mais derrière tous ces chiffres se profile une bien triste réalité. Les étudiants qui prennent la précieuse période de vacances pour chercher du travail le font souvent pour financer leurs études. Ce sont des jeunes qui ont du coeur au ventre et qui acceptent de faire des sacrifices pour investir dans leur avenir. Des dizaines de milliers d'entre eux n'ont pu trouver un emploi cette année, et devront donc s'endetter en conséquence pour poursuivre leurs études. Ils méritaient certainement beaucoup mieux que ce que leur réservait le marché du travail en ce sinistre aestas horribilis 2009...