À la suite de ma chronique de samedi, où je racontais que Revenu Québec avait inutilement saisi les comptes de banque d'un vieillard de 87 ans alors que ce dernier ne devait pas un sou, j'ai reçu d'autres témoignages accablants sur les méthodes musclées de recouvrement utilisées par le Centre de perception du fisc québécois.

Deux autres exemples.

Mme Y., 92 ans, ancienne fonctionnaire fédérale. En mai 2007, elle part visiter sa famille dans son pays natal pour plusieurs mois. Sur sa déclaration de 2006, envoyée en avril 2007, elle avait pris soin de donner l'adresse où elle résidait dans son pays natal, question de pouvoir recevoir notamment les avis de cotisation de Revenu Québec et d'y donner suite.

Finalement, Revenu Québec lui envoie un avis de cotisation de 2600$. Un gros problème survient: Revenu Québec envoie l'avis de cotisation à l'ancienne adresse de Mme Y. Et récidive au fil des mois, toujours à l'ancienne adresse.

Le temps passe. La santé de Mme Y. se détériore grandement, au point où elle ne peut revenir au Québec.

La note de Revenu Québec grossit au fil des mois et des pénalités et intérêts. De 2600$, la note passe à plus de 4000$... N'ayant pas de nouvelles de Revenu Québec, Mme Y. pense que tout va bien.

Septembre 2008: après avoir obtenu les renseignements d'Equifax, Revenu Québec frappe, saisit les comptes de banque de Mme Y. et se paye. Mme Y. a toujours conservé ses comptes à la même succursale bancaire, au Québec. Ses pensions (sécurité de la vieillesse, rentes du gouvernement fédéral, etc.) y sont automatiquement versées.

C'est en essayant de retirer une petite somme d'argent par l'entremise d'un guichet automatique que Mme Y. s'est aperçue que son compte de banque canadien avait fait l'objet d'une saisie de la part de Revenu Québec.

Pour lui venir en aide et essayer de corriger l'abus de pouvoir dont Mme Y. se dit victime, un ancien compagnon de travail (monsieur M.) a essayé de régler le problème pour elle après avoir obtenu une procuration.

«Malgré ce statut de mandataire, les fonctionnaires de Revenu Québec ont refusé de répondre à mes lettres. Je me suis adressé au bureau du Protecteur du citoyen en début d'année 2009. L'intervention de l'agent du Protecteur a permis d'obtenir plusieurs éléments du dossier et de confirmer le caractère cruel et brutal du système de perception fiscale (de Revenu Québec). En ce moment, l'affaire traîne encore et tout indique que des retenues se poursuivent sur une partie des revenus de madame», explique monsieur M.

Voilà un bon test pour le Protecteur du citoyen. Réussira-t-il à faire annuler les pénalités et intérêts que Revenu Québec a facturés à Mme Y. alors que le Ministère lui envoyait des avis de cotisation à la mauvaise adresse?

Un jeune

Passons maintenant au cas de Martin, un jeune homme dont les revenus oscillent énormément au gré de son travail à commissions.

Traînant une dette fiscale depuis 2002, Martin s'était entendu en février dernier avec Revenu Québec pour qu'il retienne chaque semaine un pourcentage de ses revenus de commissions. Les sommes sont retenues à la source, par l'employeur de Martin, et versées à Revenu Québec.

«Une solution à laquelle je me suis résigné et qui, ma foi, m'a permis d'avoir l'esprit tranquille», explique Martin.

«Mon salaire de 2009, de janvier à juillet, totalise tout juste au-dessus de 6000$. Donc chaque dollar, chaque cent que je reçois en salaire est déjà affecté, après déduction de ma saisie (d'impôt) sur salaire, aux paiements de mes comptes.»

Mais au début de juillet, un nouvel agent de Revenu Québec a hérité du dossier de Martin. «Il a décrété unilatéralement et sans avertissement que mon compte bancaire devait être saisi. L'exécution de la saisie s'est effectuée le 17 juillet 2009. Un vendredi soir!»

«Aucun recours ne m'a été permis. Aucune chance d'avertir mes autres créanciers (électricité, internet, téléphone, assurance vie, assurance auto, assurance habitation...) avec lesquels j'avais déjà des ententes de prélèvement autorisé à date fixe. Dans mon compte bancaire, au moment de la saisie, il y avait tout juste de quoi payer mes trois prochains dus, c'est-à-dire, environ 300$.»

«En raison de cette saisie, le gouvernement vient chercher 300$ pour l'appliquer à ma dette envers lui. Mais il me cause du tort et des problèmes avec trois autres fournisseurs, et ça me coûte 42,50$ de frais pour paiement sans provision pour chaque transaction, et 15$ de frais pour prélèvement sans provision chez chacun de mes fournisseurs. Donc 172,50$ de frais bancaires au total. Et tout ça, c'est sans compter la tache supplémentaire à mon dossier de crédit.»

Quand un contribuable faisant l'objet d'un processus de recouvrement se sent victime d'abus de pouvoir et de harcèlement de la part de Revenu Québec, comment peut-il se défendre?

Réponse de Mathieu St-Pierre, attaché de presse du ministre du Revenu, Robert Dutil: «Nous souhaitons que les citoyens qui se sentent lésés dans le cadre de ce processus (recouvrement) nous acheminent leur plainte (au bureau du ministre) afin que de telles situations ne puissent se produire.»

Les coordonnées du cabinet du ministre:

cabinet@mrq.gouv.qc.ca

Montréal: 514-287-8283, Québec: 418-652-6835.

Avis aux victimes: si vous vous méfiez du bureau du ministre, il vous reste le Protecteur du citoyen:

protecteurducitoyen.qc.ca

Montréal: 514-873-2032, Québec: 418-643-2688.