Pour faire suite à la chronique de Michel Girard parue dans le numéro de La Presse du samedi 11 avril, l'Autorité des marchés financiers tient à rectifier certains éléments en ce qui a trait au dossier de Georges Métivier, relativement à un potentiel délit d'initié. Contrairement à ce qu'écrit M. Girard, l'Autorité n'a pas fermé les yeux sur l'infraction potentielle à l'article 188 de la Loi sur les valeurs mobilières. Toutefois, certains faits méritent d'être éclaircis.

En effet, tel qu'elle l'a clairement indiqué dans un échange d'informations avec M. Girard la semaine dernière et contrairement à ce qu'il prétend, l'Autorité a procédé à l'analyse complète de l'ensemble des faits portés à sa connaissance dans ce dossier. Or, elle a jugé qu'il n'y avait pas matière à poursuite pour tuyautage (tipping) dans ce dossier. Les faits rapportés par M. Métivier n'ont pu être corroborés, au contraire.

 

Il est également important de rappeler que la transmission d'une information privilégiée ne constitue pas nécessairement une infraction de tuyautage au sens de la Loi sur les valeurs mobilières. À titre d'exemple, une information privilégiée qui doit être transmise dans le cours normal des affaires, disons à son courtier pour donner des instructions, ne constitue pas une infraction si celui qui la divulgue n'a pas de raisons de croire qu'elle sera utilisée. C'est la conclusion à laquelle l'Autorité en est arrivée après l'analyse des faits au dossier. D'ailleurs, en février 2005, dans le cadre de l'appel de M. Métivier dans ce dossier, le Bureau de décision et de révision en valeurs mobilières indiquait: «Un client d'une maison de courtage doit pouvoir s'attendre à ce que les représentants agissent avec loyauté et gardent confidentielle l'information transmise.»

M.Girard peut avoir sa propre lecture de la situation et l'exprimer publiquement. L'Autorité ne contestera jamais ce droit. Mais de laisser entendre que l'Autorité s'est fermé les yeux dans cette affaire - avec tout ce que cela peut laisser sous-entendre au chapitre de la compétence de son personnel ainsi que de l'application rigoureuse des lois - ne correspond pas à la réalité.

Nathalie Drouin

L'auteure est directrice générale, contrôle des marchés et affaires juridiques, à l'Autorité des marchés financiers (AMF).

 

Il n'y a pas eu enquête

«L'Autorité, dites-vous, a procédé à l'analyse complète de l'ensemble des faits portés à sa connaissance dans ce dossier. Or, elle a jugé qu'il n'y avait pas matière à poursuite pour tuyautage (tipping) dans ce dossier. Les faits rapportés par M. Métivier n'ont pu être corroborés, au contraire.»

Comment pouvez-vous affirmer cela puisqu'il n'y a pas eu enquête?

Dans sa lettre du 20 février 2009 à Georges Métivier, votre collègue Jacinthe Bouffard, affirme: «Par contre, elle

(l'Autorité) aurait pu entreprendre sa propre enquête en vue de vérifier si des infractions à la Loi sur les valeurs mobilières avaient été commises et si mesures additionnelles se seraient avérées appropriées. L'Autorité a décidé, après analyse des faits, de ne pas procéder à une telle enquête.»

Que dire maintenant de ce passage de la lettre de blâme que l'Autorité a envoyée le 20 février 2009 à l'ACCOVAM: «L'examen des faits inhérents à cette plainte (de Georges Métivier) nous amène à conclure que l'ACCOVAM aurait dû informer adéquatement la Commission des valeurs mobilières du Québec, l'ancêtre de l'Autorité, des infractions potentielles à la LVM (Loi sur les valeurs mobilières) que le représentant et son client ont pu commettre. Nous considérons que cette responsabilité existe même si l'OAR (l'ACCOVAM) n'est pas convaincu qu'il y a eu effectivement une ou des infractions. (...) l'Autorité s'attend maintenant à ce que ce genre de situation ne se reproduise plus.»

À la lumière de votre interprétation de l'article 188, on comprend maintenant pourquoi l'Autorité n'a jamais poursuivi d'initié pour avoir communiqué une information privilégiée.

Michel Girard