Le monde de la haute finance est lui aussi durement frappé par l'éclatement de la bulle boursière. La semaine dernière, deux mauvaises nouvelles ont révélé à quel point les hauts dirigeants des entreprises inscrites en Bourse et les grands financiers de la planète traversent eux aussi une période d'appauvrissement.

La revue Forbes nous a appris que la crise boursière a eu pour conséquence de raccourcir la liste des milliardaires. On a perdu 332 milliardaires en 2008. Il ne nous en reste donc plus que 793 sur la population mondiale de 6 766 522 313 personnes. Non, mais quelle rareté!

 

Qui plus est, Forbes nous a appris que la fortune des milliardaires avait fondu en 2008 de quelque 2000 milliards US, passant 4400 à seulement 2400 milliards US. Pour qu'on comprenne bien le sens de ces 2400 milliards US que se partagent les 793 milliardaires de la planète, voici le PIB en 2008 (la valeur des biens et services produits) de quelques pays: Canada: 1600 milliards; Brésil: 2000 milliards; Allemagne: 2900 milliards; Inde: 3300 milliards; Japon: 4500 milliards.

À vrai dire, cette nouvelle sur l'appauvrissement de notre brochette de milliardaires m'attriste pour une raison. Je trouve dommage que les gigantesques fortunes accumulées par les deux milliardaires les plus riches, soit Bill Gates et Warren Buffett, aient fondu respectivement de 30 et 40%. La fortune de Bill Gates a chuté de 58 à 40 milliards (-18 milliards) et celle de Warren Buffett de 62 à 37 milliards (-25 milliards).

Pourquoi cela m'attriste-t-il, sérieusement? Parce que, à leur décès, les deux hommes les plus riches de la planète vont léguer leur fortune à des organismes de bienfaisance. Des milliardaires généreux comme ces deux-là... c'est un bon placement pour la planète!

La déprime des options

Passons maintenant à la seconde mauvaise nouvelle qui a frappé le monde la haute finance la semaine dernière.

Une étude réalisée par la firme de services-conseils Watson Wyatt révèle que la présente récession se répercute durement sur les régimes de rémunération des dirigeants des entreprises canadiennes.

«Plus de 85% des options d'achat d'actions sont désormais hors du cours («underwater») et la très grande majorité des chefs de direction canadiens voient leurs primes d'intéressement à long terme (PILT) perdre plus de 50% de leur valeur.»

Par conséquent, explique Watson Wyatt, la majorité des dirigeants ne pourront pas réaliser de gains en capital sur les options d'achat d'actions qu'ils détiennent dans leurs portefeuilles.

C'est à tout le moins le drame financier qui frappe 83% des options d'achat d'actions accordées en 2007 à des chefs de direction des sociétés composant l'indice TSX 60 de la Bourse de Toronto. Les prix de levée de ces options étaient plus hauts que le cours des actions à la fin de 2008.

À la lumière des circulaires publiées par les entreprises en vue de leurs assemblées annuelles, la firme Watson Wyatt évalue à 30% le nombre de chefs de direction de sociétés du TSX 60 qui ont vu fondre hors cours les primes d'intéressement à long terme qui leur avaient été accordées en 2007. Dans le TSX 60, on trouve toutes les grandes entreprises canadiennes. Pour 80% des dirigeants de ces entreprises, les primes en question ont perdu la moitié de leur valeur initiale.

La prime moyenne d'intéressement accordée en 2007 aux chefs de direction des grandes entreprises du TSX 60 s'élevait à 4,5 millions de dollars par grand patron. À la fin de 2008, la valeur moyenne de la prime en question avait fondu à 1,4 million.

Les chefs de direction peuvent-ils compter sur une nouvelle vague de générosité de la part des administrateurs de leurs sociétés?

Réponse de Robert Levasseur, conseiller principal en rémunération des dirigeants chez Watson Wyatt: «Compte tenu des courants d'opinion actuels en ce qui a trait à la rémunération des dirigeants, il est de plus en plus improbable que les sociétés canadiennes puissent justifier les mesures d'intéressement et les primes qu'elles accordent à leurs cadres supérieurs.»

À l'avenir, conclut-il, les sociétés devront découvrir d'autres façons de fidéliser leurs dirigeants et de les motiver.

Derrière cette chute de valeur des options consenties aux dirigeants des entreprises cotées en Bourse se cache une bonne nouvelle pour les actionnaires: les dirigeants ne peuvent noyer le marché avec leurs levées d'options et ainsi faire tomber davantage le cours des actions.