L'économie américaine traverse une crise, déclenchée par l'éclatement de la bulle immobilière il y a plus d'un an. Pour s'en sortir, les États-Unis doivent d'abord relancer le secteur de l'immobilier résidentiel, disent les experts. Une grosse commande.

L'économie américaine traverse une crise, déclenchée par l'éclatement de la bulle immobilière il y a plus d'un an. Pour s'en sortir, les États-Unis doivent d'abord relancer le secteur de l'immobilier résidentiel, disent les experts. Une grosse commande.

Malgré l'ambiance négative, la nouvelle année a débuté sur une bonne note pour le secteur immobilier aux États-Unis.

Des grandes banques offrent depuis peu des prêts hypothécaires à des taux sous la barre symbolique des 5%. C'est un bon coup de main pour les rares acheteurs américains, qui profitent ainsi des plus récents efforts de la Réserve fédérale pour dégeler le marché du crédit.

La banque JP Morgan offre à ses meilleurs clients des prêts de 30 ans à un taux de 4,75%. Wells Fargo talonne son concurrent, avec un taux de 4,875%. La baisse est importante car, l'automne dernier, les taux hypothécaires à 30 ans tournaient autour de 6% aux États-Unis.

La Fed a entrepris, au tournant de 2009, de racheter pour 500 milliards US de titres hypothécaires des prêteurs fauchés que sont Fannie Mae et Freddie Mac. Le but de l'opération: abaisser les taux afin de stimuler la revente de logements.

Cependant, cette stratégie risque de donner peu de résultats concrets à court terme, estiment des experts. Les quelque 2,6 millions d'emplois perdus aux États-Unis en 2008, la baisse de la valeur nette des ménages et la faible confiance risquent en effet de peser lourdement sur le marché immobilier.

De plus, la nouvelle propension à épargner des Américains, comme on en faisait état dans cette chronique la semaine dernière, risque d'exacerber la récession qui perdurera«"jusqu'en 2010», prévoit l'économiste David Rosenberg, de la firme Merrill Lynch.

Les prix baisseront encore

Si bien que les prix des maisons aux États-Unis, déjà en baisse de 23% depuis leur sommet, pourraient diminuer encore de 15% avant de se stabiliser, prévient le spécialiste dans ses prévisions économiques pour 2009.

Or, la plupart des analystes s'accordent à dire que la stabilisation du marché immobilier, et de la construction indirectement, est indispensable pour sortir le pays de la récession. Tous les yeux sont donc tournés cette année vers le secteur de la brique et du mortier.

En plus des mauvaises conditions économiques, le surplus persistant de maisons à vendre contribue au recul des prix.

Selon M. Rosenberg, les «stocks» d'invendus sont insoutenables. Il faudrait environ 11 mois pour écouler le parc de maisons neuves aux États-Unis. Par comparaison, durant la correction immobilière du début des années 90, ce délai a atteint 9,4 mois à son sommet.

«Tant que ce ratio ne passera pas sous la barre des huit mois, les prix ne pourront se stabiliser», affirme M. Rosenberg.

De plus, on ne peut se fier à la demande intrinsèque pour stimuler le marché, ajoute l'expert. Comme la proportion de propriétaires aux États-Unis atteint maintenant 68%, contre 64% avant la bulle immobilière, on ne verra pas de sitôt des files d'acheteurs devant les milliers de maisons qui sont à vendre.

Aussi, les efforts de la Fed pour relancer le marché immobilier, en stimulant la demande grâce à des taux d'intérêt plus bas, donneront des résultats limités et «agiront comme un amortisseur, tout au plus», estime M. Rosenberg.

Réduire l'offre

Que faire alors pour corriger rapidement le déséquilibre actuel? M. Rosenberg suggère une solution draconienne: réduire l'offre de maisons à vendre.

Concrètement, il suggère que le gouvernement étudie la possibilité de créer des fonds régionaux d'actifs immobiliers, qui réduiraient le nombre de maisons offertes sur le marché. Autre suggestion: pourquoi ne pas imposer un moratoire sur la construction de maisons neuves? lance-t-il.

De toute manière, le déséquilibre entre l'offre et la demande est tel qu'il entraînera une autre baisse de la construction domiciliaire, estime Merrill Lynch.

Cela dit, M. Rosenberg n'est pas prêt à jeter l'éponge. Il croit fermement que l'économie américaine va éventuellement émerger de la crise «plus forte qu'avant». «L'effet de contraction de la richesse» finira par se dissiper et le taux d'épargne va se stabiliser.

Par la suite, les prix de l'immobilier devraient se maintenir, les banques deviendront moins frileuses et la confiance va se rétablir, dit-il. «Notre voeu, c'est qu'on pourra raconter cette histoire, dans un an, avec nos perspectives 2010.»