En sept ans, Montréal a perdu un siège social sur six. En 2000, la métropole comptait en effet 92 sièges sociaux; aujourd'hui, il n'est reste plus que 77, une perte de 15.

En sept ans, Montréal a perdu un siège social sur six. En 2000, la métropole comptait en effet 92 sièges sociaux; aujourd'hui, il n'est reste plus que 77, une perte de 15.

Nous ne parlons pas ici de bineries, mais d'entreprises majeures. Ces chiffres sont extraits de la dernière compilation annuelle de l'Institut Fraser, basée sur le classement des 500 plus grandes entreprises canadiennes, tel qu'établi par le Financial Post.

Ce palmarès fait autorité. Pour donner un ordre de grandeur, il suffit de dire que la plus petite des 500 entreprises au classement, la chaîne de magasins HMW Canada (musique, DVD, jeux vidéo) a un chiffre d'affaires de 407 millions de dollars. La plus petite!

Cinq villes abritent à elles seules 76% des sièges sociaux des grandes entreprises canadiennes. Ce sont, dans l'ordre, Toronto, Montréal, Calgary, Vancouver et Winnipeg.

Quand on parle ici de «villes», il faut comprendre les régions métropolitaines de recensement, telle que définies par Statistique Canada. Ainsi, les sièges sociaux d'entreprises comme Alimentation Couche-tard, à Laval, les pharmacies Jean-Coutu (Longueuil), les quincailleries Rona (Boucherville) ou les fromageries Saputo (Saint-Léonard) sont tous comptabilisés comme des sièges sociaux montréalais.

De la même façon, une ville comme Mississauga, en banlieue de Toronto, devrait arriver en quatrième place, devant Winnipeg. Mais comme elle fait partie de la région métropolitaine de Toronto, ses 20 sièges sociaux sont considérés comme torontois.

Comme on s'en doute, Toronto demeure solidement en première place, mais sa position s'est sensiblement détériorée depuis quelques années. En 2000, la Ville reine abritait 190 sièges sociaux, ou 38% des sièges des plus grandes entreprises au Canada; il lui en reste 173, ou 34,6%. Toutes proportions gardées, la situation est encore plus grave à Montréal, qui a vu sa part de sièges sociaux passer de 18 à 15%.

La nouvelle coqueluche des grandes entreprises canadiennes, c'est Calgary, qui attire des sièges sociaux comme un aimant. Ils sont ainsi passés de 50 en 2000 à 71 aujourd'hui, presque autant que Montréal.

À ce rythme, Calgary remplacera Montréal au deuxième rang d'ici 2009, autant dire demain. Calgary doit évidemment une bonne partie de sa popularité au secteur des ressources (à peu près tout ce qui gravite autour du pétrole et du gaz, au Canada, a un siège social à Calgary), mais abrite aussi d'importants sièges sociaux dans des domaines aussi variés que les télécommunications, les transports, le secteur manufacturier, les services financiers.

En sept ans, par ailleurs, Vancouver a gagné trois sièges sociaux (de 41 à 44) et Winnipeg en a perdu un (de 18 à 17).

Il va de soi que le palmarès des grandes entreprises est hautement volatil. Les entreprises sont des organismes «vivants» : avec le temps, elles naissent, fusionnent, disparaissent; certains géants deviennent des nains; des PME émergent et accèdent aux ligues majeures.

Ainsi, la liste des grandes entreprises de 2000 est méconnaissable aujourd'hui. À l'époque, la liste des 10 premiers comprenait, dans l'ordre, Nortel, GM Canada, Ford Canada, Onex, CIBC, Seagram, Banque Royale, George Weston, DaimlerChrysler Canada et Trans-Canada Pipelines. Aujourd'hui, les meneurs sont Banque Royale, ManuVie, George Weston, GM Canada, Power, Magna International, Alcan, Banque Scotia, Banque Toronto-Dominion et Imperial Oil. Autrement dit, sept des dix meneurs de 2000 ont disparu du peloton de tête.

L'économiste Nadeem Esmail, auteur de l'étude, remarque par ailleurs avec beaucoup de pertinence qu'il ne suffit pas de compter le nombre de sièges sociaux pour mesurer leur impact sur l'économie d'une ville.

Il n'y a aucun doute que les sièges sociaux des grandes entreprises génèrent une activité économique considérable : appels aux fournisseurs locaux, création d'emplois de qualité, entre autres. Mais l'intensité de cette activité est liée à la taille de l'agglomération.

Prenons deux villes d'un million d'habitants. La première abrite 20 sièges sociaux, la deuxième 50. L'activité économique générée par les sièges sociaux sera évidemment beaucoup plus intense dans cette deuxième.

Pour mesurer cela, M. Esmail divise le nombre de sièges sociaux par tranche de 100 000habitants. Plus le résultat est élevé, mieux c'est. Ainsi, Calgary affiche 6,2 sièges sociaux par 100 000habitants, contre 3,1 à Toronto, 2,4 à Winnipeg. 2,1 à Montréal (contre 2,9 en 1990) et 1,9 à Vancouver. Non seulement Calgary est-il en train de supplanter Montréal quant au nombre de sièges sociaux, mais, toutes proportions gardés, les sièges sociaux créent trois fois plus de richesse à Calgary qu'à Montréal.