Le 14 septembre, Iamgold et Cambior ont convenu de s'unir pour devenir le dixième producteur aurifère au monde, avec une production annuelle dépassant le million d'onces d'or. Le Québec perd ainsi le contrôle de sa plus grande aurifère au profit de la torontoise Iamgold.

Le 14 septembre, Iamgold et Cambior ont convenu de s'unir pour devenir le dixième producteur aurifère au monde, avec une production annuelle dépassant le million d'onces d'or. Le Québec perd ainsi le contrôle de sa plus grande aurifère au profit de la torontoise Iamgold.

Mais qu'à cela ne tienne, cette transaction constitue en soi une excellente nouvelle pour les actionnaires de Cambior. Ils vont enfin se retrouver avec des actions d'une entreprise qui a du potentiel, selon plusieurs analystes miniers. Pour chaque bloc de 1000 actions de Cambior, les actionnaires recevront 420 actions de Iamgold.

De toutes les sociétés aurifères canadiennes, Cambior est celle qui présente la pire fiche boursière des 10 dernières années. Il faut dire que Cambior a été victime d'une énorme gaffe en 1999 lorsque la direction de l'entreprise s'est lancée dans un vaste programme de couverture (contrats à terme) qui devait protéger la compagnie contre la chute du prix de l'or. Ce programme consistait à vendre d'avance à un prix X une partie de la future production d'onces d'or.

Or, la direction de Cambior s'est fait prendre les culottes baissées par les spéculateurs. Après avoir touché les 252,80 $ US l'once le 20 juillet 1999, soit son plus bas niveau en 20 ans, le prix de l'or a par la suite changé carrément de direction et il a grimpé en flèche, atteignant jusqu'à 325 $ US l'once, le 5 octobre 1999.

Résultat: " Ces fluctuations extrêmes du prix de l'or au cours de 1999, expliquait la direction de Cambior, ont fait échouer la stratégie de couverture envisagée par la compagnie et ont obligé celle-ci à refinancer ses obligations financières de l'ordre de 225 millions de dollars américains avant la fin de décembre 1999, selon des modalités moins favorables par rapport aux années précédentes. "

Ce qui a d'ailleurs entraîné Cambior dans une restructuration financière importante, laquelle s'est soldée en janvier 2001 par la vente à terme d'or payée d'avance d'une valeur de 55 millions $ US. La direction de Cambior s'était ainsi engagée à livrer 233 637 onces d'or au cours des cinq années suivantes, au prix de 235 $ US l'once.

Comme ce prix de vente (forcée) était nettement en-dessous du prix moyen de l'once d'or sur le marché (de 310 $ US en 2002, 364 $ US en 2003, 410 $ US en 2004 et 445 $ US en 2005), on comprend pourquoi l'action de Cambior se négociait à cette époque à faible prix comparativement aux autres aurifères canadiennes telles Barrick, Goldcorp, Agnico-Eagle, Glamis Gold, etc.

Au début de 1997, l'action de Cambior a atteint 22,00 $. Au plus creux de la crise financière des années 1999 et 2000, le titre s'était ramassé sous la barre des 50 cents. Il a entrepris par la suite un redressement progressif qui l'a amené au niveau actuel des 4,00 $. Cambior a connu ses heures de gloire en 1987 alors que le titre avait atteint un sommet historique de 35,50 $.

Un an de flirt

Bien entendu, si vous faites partie des actionnaires qui ont payé leurs actions au-delà de 4,00 $, le mariage de Cambior avec Iamgold ne vous donne par un cent de plus pour le moment. On vous donne strictement l'espoir de rentrer un peu plus vite dans votre argent grâce à une compagnie plus dynamique.

Le mariage devrait être officiellement conclu d'ici la fin de novembre, une fois que le plan d'arrangement de l'échange des actions (0,42 action de Iamgold par action de Cambior) sera entériné par les actionnaires de Cambior.

Fait à noter: dans sa récente étude, l'analyste Michael Fowler, de Valeurs mobilières Desjardins, mentionne que les dirigeants de Cambior et Iamgold discutaient depuis un an environ, mais plus intensivement depuis avril dernier.

Il est intriguant de voir comment s'est comportée l'action de Cambior durant cette période de flirt: elle est partie en octobre dernier d'un creux de 2,00 $ pour atteindre en février les 3,70 $. Après deux mois de stabilité, l'action s'est envolée en avril jusqu'à 4,74 $. Par la suite, la correction boursière a fait descendre Cambior à 2,80 $, en juin. Et après, l'action s'est de nouveau envolée pour atteindre momentanément 4,45 $, lors de l'annonce du mariage. Elle se négocie présentement autour de 4,00 $.

Évidemment, si les actionnaires qui ont vendu une partie de leurs actions de Cambior au cours des 12 derniers mois avaient su que les dirigeants de Cambior et Iamgold se courtisaient, nombre d'entre eux n'auraient sans doute pas cédé leurs lots d'actions.

Bienheureux patrons

Quoi qu'il en soit, les hauts dirigeants de Cambior, eux, ont la chance de s'enrichir. Grâce à quoi? Aux options sur actions qu'ils ont reçues.

Parenthèse importante. Lorsqu'on achète des actions en Bourse, on court le risque de subir une perte si jamais le titre recule. Quand un dirigeant reçoit des options, il ne court aucun risque puisqu'il exercera ses options seulement s'il peut revendre à profit l'action sous-jacente. Émettons comme hypothèse que les actions de Cambior vaudront 4,20 $ à la clôture en novembre prochain de l'entente Cambior-Iamgold.

Louis Gignac, le grand patron de Cambior, encaissera environ 2,4 millions $ juste avec les options obtenues depuis la crise de 1999.

Au cours des six dernières années, il s'est fait accorder un total de 1,1 million d'options, dont le prix d'exercice a varié de 51 cents (en 2001) à 3,27 $ (en 2004). Les options de M. Gignac valent aujourd'hui près de 2,4 millions de dollars.

Trois autres hauts dirigeants de Cambior s'en sortent également avec un portefeuille nettement enrichi malgré les années de vaches maigres que viennent de vivre un grand nombre d'actionnaires de l'aurifère québécoise.