Nous avons vu, samedi, que le déséquilibre fiscal entre Ottawa et les provinces est en train de se résorber.

Nous avons vu, samedi, que le déséquilibre fiscal entre Ottawa et les provinces est en train de se résorber.

Avec les grandes compressions des années 90, la participation fédérale au financement des programmes sociaux des provinces est passée de 18 à 14%.

Uniquement pour le Québec, cela représentait un trou de 2,2 milliards de dollars, année après année.

Or, depuis quatre ans, Ottawa a rapidement augmenté ses transferts aux provinces, de sorte que sa participation atteint maintenant 17% des dépenses provinciales, et de nouveaux transferts restent à venir.

Autrement dit, les provinces sont en bonne voie de récupérer tout le terrain perdu.

La question du déséquilibre reste cependant entière.

La récupération des récentes années est le résultat d'une entente ponctuelle survenue entre le gouvernement de Paul Martin et les gouvernements provinciaux et territoriaux.

Ce n'est pas suffisant. Dans les faits, Ottawa continue de déclarer des surplus, pendant que les provinces, à l'exception de l'Alberta,

tirent le diable par la queue. Il en résulte une situation malsaine. Les provinces sont tributaires de l'argent fédéral, et Ottawa profite de cette situation pour envahir les champs de compétence des provinces.

Le niveau de dépendance varie considérablement d'une province à l'autre. Ainsi, les transferts fédéraux ne représentent que 10% des revenus d'une province riche comme l'Alberta, comparativement à 59% dans une province pauvre comme Terre-Neuve.

Au Québec, cette proportion est de 17%, ce qui représente tout de tout de même un joli magot de 12 milliards de dollars.

Le finances des provinces sont lourdement handicapées par l'explosion des dépenses de santé. Pour parvenir à joindre les deux bouts, elles en sont rendues à quémander des fonds à la pièce.

Le temps est grandement venu d'assurer aux provinces une source de financement stable et suffisamment importante pour leur permettre de remplir leurs obligations.

La formule doit aussi garantir le respect des compétences provinciales. Et bien sûr, tout cela doit se faire sans risquer de replonger les finances fédérales dans le rouge.

Le mois dernier, une équipe d'économistes de l'Institut Fraser de Vancouver a publié un document qui propose une approche originale et intelligente, qui permettait aux provinces de faire face à leurs obligations tout en garantissant le respect de leurs compétences.

La formule, d'autre part, ne crée aucune contrainte sur les finances publiques fédérales et pourrait même contribuer à augmenter la compétitivité de l'économie canadienne.

Il s'agit d'un projet de réforme majeur, il s'agit aussi d'une contribution importante au débat sur le déséquilibre fiscal. Il vaut certainement la peine d'y jeter un coup d'oeil (1).

Les auteurs proposent une réforme à trois volets :

1. Supprimer les transferts sociaux

Ottawa contribue financièrement aux dépenses sociales des provinces, notamment la santé, l'aide sociale et l'éducation. Pour l'exercice 2007-2008, le secteur de la santé, à lui seul, représente 22,5 milliards, ou 72% de ces transferts.

Les paiements fédéraux sont soumis aux conditions imposées par Ottawa ; par exemple, pour toucher l'argent du Transfert canadien en matière de santé, les provinces doivent de conformer à la Loi nationale de la santé.

En tout, les transferts sociaux atteindront 31,3 milliards l'an prochain. Toutes les provinces, pauvres et riches, reçoivent des transferts sociaux en fonction de leur poids démographique.

Dans un premier temps, les auteurs proposent la suppression pure et simple de ces transferts. Voilà donc autant d'argent de plus dans les coffres d'Ottawa. Le programme de péréquation sera maintenu.

2. Baisser les impôts fédéraux

Ottawa utiliserait immédiatement ces 31,3 milliards pour financer des baisses d'impôts d'un montant équivalent. Les auteurs recommandent des baisses ciblées, qui encourageront l'investissement et la productivité.

En ce sens, ils rappellent à quel point il est utopique de penser stimuler l'économie en baissant les taxes de vente (comme vient de le faire le gouvernement Harper).

Les baisses de 31,3 milliards devraient donc être canalisées vers le taxe sur le capital, l'imposition des gains en capital et, évidemment, l'impôt sur le revenu des particuliers.

En 2007-2008, Ottawa retirera 157 milliards en impôts sur le revenu, dont 116 milliards des particuliers. On ne peut qu'imaginer à quel point des baisses d'impôts de 31 milliards contribueraient à augmenter la création d'emplois et la richesse collective.

3. Augmenter les taxes de vente provinciales

Jusqu'à présent, donc, Ottawa a économisé 31 milliards en supprimant ses transferts, et il a remis cet argent aux contribuables. C'est ici que les provinces entrent en scène, en augmentant leurs taxes de vente en conséquence, c'est-à-dire en occupant l'espace fiscal évacué par le fédéral. En 2002, le rapport Séguin recommandait que Québec récupère la TPS fédérale. C'était déjà une proposition novatrice, mais le document de Fraser va plus loin, en proposant le maintien de la taxe fédérale, et la hausse de la taxe provinciale. De cette façon, les provinces récupèrent 31 milliards dès la première année, et sont assurées d'une source de financement stable pour les années à venir. Elles n'auraient plus à se soumettre aux caprices d'Ottawa quant à la façon de dépenser cet argent. Évidemment, la suppression des transferts fédéraux n'aura pas le même impact dans toutes les provinces.

Pour compenser la perte de ses transferts, par exemple, l'Alberta devra imposer un taxe de vente provinciale (une première dans son histoire) de 4,2%. À Terre-Neuve, le taux de la taxe de vente harmonisée, c'est-à-dire en incluant la TPS fédérale), passera de 14 à 21,1%.

Au Québec, le taux de la TVQ passerait de 7,5 à 13,9%. Il existe déjà un système de crédit d'impôt pour neutraliser l'impact de la taxe de vente sur les ménages à faibles revenus. Ce système peut facilement être ajusté pour tenir compte des nouveaux taux.

FiscalBalanceGST.pdf

Note : Cette chronique, la deuxième et dernière d'une série sur le déséquilibre fiscal, n'a pu être publiée mardi, tel qu'annoncé dans le journal de samedi. Nos excuses.