Est-ce possible qu'un placement soi-disant sûr perde plus de 90% de sa valeur en l'espace d'à peine sept mois?

Est-ce possible qu'un placement soi-disant sûr perde plus de 90% de sa valeur en l'espace d'à peine sept mois?

Malheureusement OUI!

Et c'est ce qui est arrivé aux petits investisseurs qui ont acquis des parts dans le cadre du premier appel public à l'épargne de 150 M$ de Global Digit 11, une des rares fiducies de papier commercial accessibles aux clients de détail des maisons de courtage.

Depuis le 28 février dernier, la valeur liquidative des parts est passée de 8,73$ à seulement 74 cents, en date du 30 septembre dernier.

Les Québécois sont particulièrement touchés par l'effondrement de cette fiducie de revenu de papier commercial parce que le principal placeur pour compte de cette émission était Financière Banque Nationale, et que Valeurs mobilières Desjardins arrivait au troisième rang.

En deuxième place des placeurs, on retrouvait Canaccord Capital, dont la présence au Québec est relativement importante.

Voici l'autopsie d'un très mauvais placement.

L'appel public à l'épargne de Global Diversified Investment Grade Income Trust 11 (Global Digit 11) a connu un franc succès au printemps 2005.

À la lumière des informations verbales obtenues de leurs conseillers financiers, les investisseurs croyaient avoir mis la main sur un placement «sûr» qui leur rapporterait un rendement de 8,5% par année, pendant les cinq prochaines années et qu'ils pourraient revendre leurs unités au prix de souscription initial de 10$ par part.

Pendant les 23 mois qui ont suivi l'arrivée des parts de Global Digit 11 [[|ticker sym='T.GII.UN'|]] à la cote de la Bourse de Toronto, le placement remplissait assez bien ses promesses: la fiducie versait les distributions de revenu promises, et la valeur liquidative des parts réussissait à se maintenir au-dessus des 8,70$.

Fait important: le 28 février dernier, la Banque Nationale (BNC) exerçait son droit de faire racheter par Global Digit 11 son bloc de 1,4 million de parts, soit 10,1% des parts en circulation de cette fiducie de papier commercial.

La Banque Nationale encaissait du coup une somme globale de 11,5 millions de dollars. Notez que la Banque a cédé son bloc à 8,21$ la part, alors que la valeur liquidative des parts s'élevait à 8,73$.

Dans le communiqué publié le 28 février, Denis Dubé, directeur des relations publiques de la BNC, explique le sens de la transaction: «Les parts rachetées (par Global) ont été initialement acquises à des fins d'investissement. BNC pourra, à l'avenir, acquérir des parts ou en disposer selon certains facteurs comme les conditions générales du marché ou de l'économie et d'autres occasions d'investissement ou d'affaires qui pourraient survenir.»

Les détenteurs des parts de cette fiducie de revenu auraient dû imiter la Banque Nationale. Pourquoi? Parce qu'en ce qui concerne le Global Digit 11, la Banque Nationale y est très impliquée avec ses filiales financières et Natcan: promoteur, placeur pour compte, mandataire administratif...

Donc, à partir du moment où la Banque Nationale décidait à la fin de février dernier de céder la grande majorité de ses parts de Global Digit 11, cela pouvait être interprété comme un signal de... questionnement.

Avec du recul, on se rend compte aujourd'hui que c'en était effectivement un... parce qu'à partir de ce moment-là, Global Digit 11 a vu sa valeur liquidative fondre, semaine après semaine.

À cause de quoi? Du «credit crunch» qui sévit dans le papier commercial adossé à des actifs non bancaires, comme les créances hypothécaires résidentielles.

Appelée à commenter la coïncidence dans le temps entre le moment où la BNC cède son bloc de 1,4 million de parts et la dégringolade de la valeur des parts par la suite, la direction de la Banque Nationale a transmis à La Presse Affaires l'explication suivante: «La Banque Nationale et ses filiales ont eu un rôle de mainteneur de marché relativement à Global Digit II. La Banque Nationale a fait des achats importants de parts de temps à autre. Au moment de la période annuelle et de la période spéciale de rachat par Global Digit II, la Banque Nationale a soumis pour rachat ses parts pour réduire sa position à un nombre minimal de parts. Les achats de parts par la Banque Nationale n'avaient pour seul but de maintenir un marché pour les parts de Global Digit II.»

Cette explication est différente de celle avancée dans le communiqué du 28 février par Denis Dubé, où les parts avaient été acquises à des fins d'investissement...

À la suite de la vente de son bloc de 1,4 million de parts de Global Digit 11, la Banque Nationale n'a-t-elle jamais eu peur d'être en situation de délit d'initié? Réponse de la porte-parole de la banque, Marie-Claude Lavigne: «Nous sommes très au courant de nos responsabilités étant donné notre relation avec Global Digit II et avons respecté toutes nos obligations légales.»

Depuis mars 2005, la Banque Nationale et ses filiales ont encaissé plus de 16 millions en divers honoraires de gestion avec Global Digit 11.