Si la crise financière a fait trembler l'Occident la semaine dernière, la Chine perd aussi de sa belle assurance: interventions pour soutenir les Bourses, baisse de taux d'intérêt, plan de relance pour requinquer une économie essoufflée... Pékin tente à son tour d'éteindre plusieurs feux.

Si la crise financière a fait trembler l'Occident la semaine dernière, la Chine perd aussi de sa belle assurance: interventions pour soutenir les Bourses, baisse de taux d'intérêt, plan de relance pour requinquer une économie essoufflée... Pékin tente à son tour d'éteindre plusieurs feux.

Jusqu'à récemment, les constructeurs automobiles de la planète pouvaient compter sur la Chine pour soutenir leurs ventes. Au-delà de la Grande Muraille, on pouvait fuir les routes cahoteuses des marchés américains et européens.

Mais, ô surprise! Le gros moteur chinois a aussi des ratés.

En août, les ventes d'automobiles en Chine ont diminué de 6,3%, le premier repli en trois ans. Les ventes de l'allemand Volkswagen, qui contrôle 10% du marché chinois, ont chuté de 27% le mois dernier. Quant à GM et Toyota, ils viennent d'abaisser leurs prévisions dans l'empire du Milieu.

La Chine est-elle rattrapée par le ralentissement mondial et la crise financière? À voir se démener le gouvernement chinois depuis quelques jours, la réponse est oui. En fait, le poumon du commerce mondial s'essouffle: les Bourses chinoises dérapent, le commerce extérieur patine et l'immobilier est en marche arrière.

À la rescousse des Bourses

Jeudi dernier, en pleine tempête boursière mondiale, les autorités chinoises ont fait deux gestes à la fois importants et surprenants qui indiquent que Pékin a peur de l'onde de choc de la crise financière américaine.

D'une part, la Chine a supprimé les droits (environ 0,3%) sur les achats d'actions. Le but visé: relancer la Bourse, qui a fondu de moitié depuis son record d'octobre 2007.

D'autre part, la Central Huijin, un organisme d'investissement public, aurait racheté des actions de trois grandes banques chinoises la semaine dernière, dont l'Industrial and Commercial Bank of China et la Bank of China, deux piliers de la finance.

Huijin, un organisme lié à China Investment Corp, le fonds souverain de la Chine, a misé des milliards pour stabiliser les actions de ces banques, selon des médias chinois et européens.

Baisse de taux

Et alors que le monde avait les yeux rivés sur la débâcle de Wall Street la semaine dernière, le gouvernement a annoncé un virage majeur de sa politique monétaire.

Pour la première fois en six ans, le taux des prêts à un an a été réduit, passant de 7,47 à 7,20%. De plus, la Banque centrale de Chine a diminué de 1% le taux de réserves que les petites banques doivent lui confier, une autre mesure visant à assouplir les conditions de crédit.

Du coup, Pékin a mis fin à son cycle de hausse des taux. Malgré le rebond des Bourses vendredi dernier, le gouvernement mijote aussi un plan de relance économique, selon diverses sources. La priorité, jusqu'alors donnée à la lutte contre une inflation alarmante, va désormais au soutien de la croissance.

Pourquoi ce virage à 180 degrés? C'est qu'on assiste à un tassement de la croissance chinoise, qui passerait sous les 8% l'an prochain. Pas mauvais en soi, mais une contre-performance pour un pays habitué à des progressions à deux chiffres.

Les dernières nouvelles sont à ce point mauvaises: le solde commercial chinois rétrécit et le secteur immobilier connaît un retournement spectaculaire. Selon la Deutsche Bank, l'investissement dans l'immobilier reculerait de 7% en 2009, après une hausse de 25% cette année. Cela risque de se propager à la consommation et au système bancaire.

Découplage?

Les entreprises sont aussi moins rentables. Selon un fonds d'investissement européen, la croissance des profits chinois tomberait à 13% en 2009. C'est presque deux fois moins que ce qui est prévu pour cette année!

La Chine, on le sait bien, a beaucoup profité du commerce mondial depuis 10 ans, si bien qu'elle est de plus en plus tributaire de la conjoncture occidentale.

Les chiffres sont éloquents: les exportations, qui représentaient 20% du PIB lorsque le pays a adhéré à l'OMC en 2001, comptent aujourd'hui pour près de 40%, souligne Standard&Poor's.

La production industrielle chinoise, entre-temps, a ralenti à son rythme le plus bas en six ans en août dernier, confirmant cette dépendance. Et l'avenir s'assombrit: un indicateur des nouvelles commandes d'exportation est tombé sous les 50% en juillet - un creux historique, selon JP Morgan.

La nouvelle indépendance des pays émergents vis-à-vis des États-Unis et des régions industrialisées ne serait-elle qu'un mirage? Difficile de conclure à ce stade-ci. Mais, sur les marchés financiers, on entretient de gros doutes à ce sujet.

Depuis le début de l'année, l'indice MSCI China a chuté de près de 50%, celui du Vietnam de 40%, tandis que Hong Kong abandonne 30%. Comme le reste de l'Asie, le Dragon chinois est imposant et il fait peur. Mais ces jours-ci, il semble encore bien vulnérable.