Dans le coin droit, Stephen Harper, qui tente de se faire rassurant. Dans le coin gauche, les quatre autres, qui se sont lancés dans un véritable concours d'hyperboles, comme si la réélection du gouvernement Harper plongerait le Canada dans un désastre financier à l'américaine. Gilles Duceppe soutient que Stephen Harper et George W. Bush, c'est du pareil au même, rien de moins!

Dans le coin droit, Stephen Harper, qui tente de se faire rassurant. Dans le coin gauche, les quatre autres, qui se sont lancés dans un véritable concours d'hyperboles, comme si la réélection du gouvernement Harper plongerait le Canada dans un désastre financier à l'américaine. Gilles Duceppe soutient que Stephen Harper et George W. Bush, c'est du pareil au même, rien de moins!

Pourtant, sur le fond, M. Harper a raison de se faire rassurant.

Il suffit de comparer les deux systèmes financiers et de jeter un coup d'oeil aux principaux indicateurs économiques pour réaliser que le Canada est très loin d'une crise.

L'éclatement de la bulle immobilière aux États-Unis ne s'étendra pas au Canada, parce qu'il n'y a pas de bulle. Certes, il peut exister des secteurs où le marché est fortement en hausse (les unifamiliales à Fort McMurray, les condos au centre-ville de Montréal et de Toronto), mais ce sont des minibulles locales. Rien, absolument rien, ne permet de croire que les prix de l'immobilier au Canada se dégonflent au point où les valeurs marchandes soient largement inférieures aux soldes des hypothèques, comme c'est le cas aux États-Unis.

Il y a une raison pour cela. Au Canada, la Loi nationale de l'habitation oblige tout acheteur de maison dont la mise de fonds est inférieure à 20% de la valeur de la propriété à acheter une assurance prêt hypothécaire. Cette assurance garantit que le prêteur est remboursé en cas d'insolvabilité de l'emprunteur. Autrement dit, la loi protège contre elles-mêmes les institutions financières qui seraient tentées d'accorder du crédit trop facile; elle protège aussi contre eux-mêmes les acheteurs de maisons qui seraient tentés d'acheter une propriété au-dessus de leurs moyens. Aucune banque canadienne n'est menacée de faillite.

Sur le front de l'économie, le portrait est moins bon que l'an dernier, mais il serait hautement imprudent de crier à la catastrophe.

Depuis le début de l'année, l'économie canadienne a créé 87 000 emplois; certes, c'est beaucoup moins que les 221 000 pour la même période l'an dernier, mais il faut dire que 2007 a été une des meilleures à ce chapitre. Selon la dernière enquête mensuelle de Statistique Canada, le taux de chômage demeure au niveau relativement bas de 6,1%.

La croissance économique sera moins forte que prévu; les spécialistes commencent d'ailleurs à revoir leurs prévisions à la baisse. Mais il n'y a pas de quoi crier au meurtre, d'autant plus qu'il y a aussi de bonnes nouvelles. Après avoir subi un long et pénible déclin, les entreprises du secteur de la fabrication commencent enfin à voir le bout du tunnel. Depuis quatre mois, la croissance du secteur manufacturier atteint en moyenne 0,7% par mois. Ce n'est pas énorme, mais cela met fin à une longue période de morosité.

La dette publique n'est plus un problème. Certes, l'ère des plantureux surplus à Ottawa est terminée. C'est dû en partie à deux décisions du gouvernement Harper: la baisse de la TPS (que la plupart des économistes considèrent comme une erreur) et la forte augmentation des transferts aux provinces. Mais à tout prendre, la situation financière du gouvernement canadien est infiniment meilleure que celle du gouvernement américain. Cela ne se compare même pas.

Il y a cependant deux ombres au tableau.

L'inflation recommence à montrer le bout de son nez. En août, l'indice des prix à la consommation a progressé de 3,5% en rythme annuel. C'est la plus forte hausse en cinq ans. Il faut cependant dire que la flambée des prix pétroliers compte pour plus de la moitié de cette hausse.

Enfin, il y a des risques de détérioration de la balance commerciale. L'an dernier, le Canada a dégagé un surplus commercial de 85 milliards avec les États-Unis. Ce montant représente l'équivalent de 2,7 millions d'emplois de ce côté-ci de la frontière. Si le consommateur américain ralentit ses achats, il est clair que des milliers de travailleurs canadiens risquent de se retrouver au chômage.

À tout prendre, le portrait n'est peut-être pas idéal; on a connu de meilleures années. Mais rien ne permet non plus de crier au loup comme le font un peu trop facilement les partis de l'opposition. Faut-il aussi rappeler qu'on a aussi connu bien pire, et pas à peu près?