Ce titre reprend mot à mot le slogan électoral qui a fait la fortune de Robert Bourassa en 1970.

Ce titre reprend mot à mot le slogan électoral qui a fait la fortune de Robert Bourassa en 1970.

Au Québec, les deux ou trois années qui ont suivi l'euphorie de l'Expo 67 ont été assez déprimantes sur le plan économique. Entre 1966 et 1970, le taux de chômage a presque doublé, passant de 4,1% à 7%.

Face au gouvernement épuisé de Jean-Jacques Bertrand, le jeune chef libéral promet de mettre l'accent sur l'économie et de créer 100 000 emplois par année.

Cet engagement fera époque dans les annales politiques du Québec. Une fois élu, M. Bourassa mettra du temps à «livrer la marchandise».

L'économie québécoise ne créera que 47 000 emplois en 1971, seulement 30 000 l'année suivante. Mais en 1973, les choses s'améliorent et on franchira facilement le cap des 125 000 emplois, une excellente performance.

M. Bourassa a été imprudent en promettant 100 000 emplois par année. Le marché du travail est tributaire de facteurs sur lesquels un gouvernement provincial a peu ou pas d'emprise: conjoncture économique, indice de confiance des consommateurs, prix à la consommation, taux d'intérêt, état de santé de l'économie américaine, entre autres.

Disons que M. Bourassa a été chanceux en 1973...

Vendredi, Statistique Canada a publié les résultats de son enquête mensuelle sur la population active. Les chiffres montrent que l'économie canadienne continue de créer des emplois par dizaines de milliers.

Les données de Statistique Canada ratissent large: l'agence produit des chiffres complets (création d'emplois, nombre de chômeurs, taux d'activité, taux de chômage, etc.) selon les provinces, les régions, l'âge, le sexe, le secteur d'emploi, etc.

Vendredi, en prenant connaissance des résultats pour le Québec, le slogan de 1970 m'est spontanément venu à l'esprit.

Québec au travail, voilà qui peut très bien qualifier la situation du marché québécois du travail en ce début de 2008, malgré toutes les annonces de fermetures qui nous tombent sur la tête à cause de la Chine, malgré la crise de la forêt, malgré la force du huard.

Certes, février n'a pas été particulièrement brillant; en tout, l'économie québécoise a créé 3300 emplois pendant le mois. C'est faible.

En revanche, en jetant un coup d'oeil plus attentif sur les chiffres, on trouve au moins cinq bonnes nouvelles.

- S'il est vrai que le secteur de la fabrication continue de perdre du terrain (près de 8000 emplois perdus en février), d'autres secteurs, et notamment les services, comblent amplement les pertes (création de 12 000 emplois pendant la même période). Au total, l'emploi augmente.

- Contrairement à une opinion largement répandue, les emplois créés dans les services sont, pour la plupart, des emplois à temps plein et de bonne qualité. On a souvent tendance à assimiler le secteur des services au commerce de détail, à l'hôtellerie et à la restauration.

Or, ces activités ne sont responsables, en février, que de 3000 nouveaux emplois sur 12 000. Où sont les 9000 autres? Dans les services informatiques, dans les services aux entreprises, dans les services financiers, dans l'éducation et la santé.

La majorité des emplois créés au Québec, et qui remplacent les emplois manufacturiers, sont des emplois de bon calibre. Il faut par ailleurs rappeler que la crise de la forêt reçoit des politiciens et des médias une attention démesurée par rapport à son importance sur le marché du travail.

Malgré toutes les manchettes qu'on a pu lire à ce sujet, la forêt représente moins de 0,5% des emplois au Québec.

- On aura une confirmation de la qualité des nouveaux emplois en jetant un coup d'oeil sur la progression des salaires. Entre février 2007 et février 2008, au Québec, le salaire horaire moyen a augmenté de 3,3 %.

C'est nettement plus que l'inflation, ce qui signifie que les travailleurs québécois continuent d'améliorer leur pouvoir d'achat. Un bémol, cependant: dans l'ensemble du Canada, la hausse moyenne s'établit à 4,9 %, notamment à cause de l'excellente performance de l'Alberta.

- À tout prendre, depuis un an, il s'est créé au net 89 000 emplois au Québec. On a connu de meilleures années, certes, mais il faut se rappeler que cela survient en dépit du désarroi du secteur de la fabrication.

- Enfin, un chiffre étonnant. Le taux d'activité (qui tient compte de tous les adultes occupant un emploi ou étant activement à la recherche d'un emploi) est le meilleur baromètre du marché du travail.

Plus il est élevé, mieux c'est. En février, le taux d'activité québécois a légèrement avancé pour atteindre 65,9 %. C'est exactement le même qu'aux États-Unis. Certes, les États-Unis traversent une mauvaise passe par les temps qui courent, mais n'empêche...

Qui aurait pu prévoir cela il y a quelques années?