Les signes vitaux de l'économie américaine se détériorent. Pertes d'emplois, consommation amorphe, secteur des services atone...

Les signes vitaux de l'économie américaine se détériorent. Pertes d'emplois, consommation amorphe, secteur des services atone...

Avec un plan de relance de 168 milliards US, Washington veut requinquer le patient en lui injectant une dose d'adrénaline. Mais cette mesure pourrait s'avérer inefficace.

S'il était encore nécessaire de prouver que l'économie américaine est malade, voilà qui est fait.

Après la perte de 17 000 emplois en janvier, le groupement national des directeurs d'achat (ISM) du secteur des services a exacerbé les craintes d'une récession aux États-Unis, la semaine dernière.

Selon l'organisme, la production de services - qui représente près de 90% de l'économie - s'est contractée pour la première fois depuis mars 2003.

De plus, on savait que l'immobilier résidentiel vit sa pire récession depuis une génération. La consommation s'essouffle. Et les réticences des banques américaines à prêter, couplées à la chute de Wall Street, alourdissent le climat.

C'est pourquoi les autorités américaines n'ont pu résister à la tentation d'intervenir pour raviver l'économie.

La Réserve fédérale, pour sa part, a opté pour un traitement choc: cinq baisses des taux d'intérêt depuis la fin septembre - une intervention que plusieurs experts jugent nécessaire.

Mais le geste de la banque centrale aura peu de prise sur l'économie sans que le gouvernement n'apporte un soutien fiscal.

C'est du moins l'avis de Washington, qui s'apprête à mettre en oeuvre un plan de relance économique de 168 milliards US.

Le plan de George Bush, qui vient de recevoir l'appui du Congrès, vise surtout une chose: stimuler la consommation - un secteur responsable des deux tiers de l'économie - en accordant à plus de 111 millions de contribuables un retour d'impôt de 600 à 1200$ par travailleur, plus 300 $ US par enfant.

Au profit de la Chine

Mais, malgré les bonnes intentions du gouvernement, le plan Bush est toujours l'objet d'un vif débat.

D'un côté, certains mettent en doute son efficacité, surtout pour une raison: les Américains vont dépenser leur chèque de l'État en achetant des biens qui, pour la plupart, sont fabriqués en Asie. Bref, d'autres billets verts dans les poches des Chinois.

Les produits fabriqués en Chine ont représenté 15% des importations américaines en 2007. Cela inclut surtout des jouets, des vêtements, et des appareils électroniques - donc des biens à bas prix dont les Américains sont friands.

Cependant, le National Retail Federation (NRF), un organisme représentant les grands détaillants américains, n'est pas d'accord avec la réaction anti-chinoise.

Car, selon le NRF, on oublie que les autres intervenants de la chaîne vont également profiter d'un sursaut de la consommation.

Il faut penser aux gens qui travaillent à la R&D, à la distribution et au marketing des produits importés, comme le fameux iPod, d'Apple, qui est assemblé en Chine.

Il faut donc tenir compte des emplois occupés par des Américains dans le secteur des services.

D'ailleurs, pour chaque dollar dépensé sur un bien fabriqué en Chine, seulement trois cents retournent dans l'empire du Milieu. Le reste va aux États-Unis, soutient le NRF.

De plus, les emplois dans l'industrie des services sont souvent mieux rémunérés que ceux de la fabrication. Donc, ils contribuent davantage à l'économie, soulignait au réseau CNN Dan Ikenson, directeur associé du CATO, un think tank américain sur le commerce, basé à Washington.

Un remède?

Mais, sur la planète économique, les choses ne sont pas simples. D'autres indices laissent croire que le plan Bush ne fera pas courir les Américains au magasin le plus près.

Un sondage de la firme UBS, dévoilé la semaine dernière, montre que les contribuables utiliseront leur retour d'impôt surtout pour rembourser des dettes.

Selon l'enquête, 43% des répondants prévoient prendre l'argent de Washington pour rembourser leurs cartes de crédit et d'autres emprunts, alors que 26% vont le mettre dans leurs économies.

Seulement 24% des gens, soit moins du quart, disent qu'ils vont le dépenser.

Les experts reconnaissent qu'un chèque de l'État a toujours un effet «feel good» bien réel, mais les remèdes fiscaux temporaires apportent aussi un soulagement temporaire.

Les entreprises américaines n'embaucheront pas des travailleurs à cause du plan Bush. Au mieux, «elles vont retarder les mises à pied», avance le Center for Economic and Policy Research, de Washington.

Remède ou placebo, le plan Bush?

Personne ne le sait avec certitude. D'un côté, les mesures fiscales décrétées après les attentats de septembre 2001, combinées à une baisse des taux d'intérêt, ont permis à l'économie américaine d'éviter une récession sévère en 2002.

Mais de l'autre, le plan Bush risque d'avoir peu d'effets durables, tout en aggravant le colossal déficit budgétaire américain.

Washington croit que son traitement marchera encore en 2008. Reste à savoir si le patient n'est pas plus en mal en point qu'on ne le croit.