Quand la Bourse canadienne a enregistré son sommet historique en avril, est-ce que les analystes des maisons de courtage recommandaient d'acheter ou de vendre les titres canadiens?

Quand la Bourse canadienne a enregistré son sommet historique en avril, est-ce que les analystes des maisons de courtage recommandaient d'acheter ou de vendre les titres canadiens?

Simple question de vérifier s'ils ont tiré une leçon de l'éclatement de la bulle Internet de l'an 2000... Lorsque la bulle était gonflée à bloc en mars 2000, on se rappellera que la quasi-totalité des analystes jouaient aux marchands de rêve en continuant allègrement de recommander l'achat de titres.

On connaît la suite: la grande majorité des titres inscrits aux grandes Bourses du monde, dont la Bourse de Toronto, allaient subir une mémorable dégelée qui a perduré deux ans.

C'est le 17 avril que Toronto enregistrait son sommet historique, l'indice phare S&P/TSX s'approchant à un iota de la barre des 12 495 points. Huit semaines plus tard, le baromètre de la Bourse canadienne se trouve près des 11 000 points. Une baisse de plus de 10 %.

Cette débandade s'inscrit toutefois dans une année super lucrative. Auparavant, l'indice S&P/TSX avait enregistré une progression de 29,4 % par rapport à juin 2005, soit une hausse de 2839 points. C'est donc dire que l'indice canadien avait perdu avant-hier presque la moitié (47 %) de ces gains.

Cela représente une sévère et rapide correction.

Revenons à la question de départ: lorsque le baromètre de la Bourse de Toronto a flirté avec la barre des 12 495 points, à la mi-avril, est-ce que les analystes des maisons de courtage recommandaient de vendre massivement, ou à tout le moins de réduire sensiblement nos positions dans tel ou tel titre? Une parenthèse: je ne fais pas référence ici aux stratèges mais plutôt aux analystes des services de recherche des maisons de courtage qui sont spécialisés dans les divers secteurs boursiers et qui suivent à la loupe les compagnies. Pour les investisseurs, c'est le point de vue des analystes qui est important en raison de leurs recommandations spécifiques d'achat ou de vente.

Eh bien! pendant que la Bourse canadienne se pavanait à son zénith, les analystes des titres canadiens continuaient d'arborer un optimisme débridé. Voici les résultats de la compilation que je viens d'effectuer à partir de la liste de recommandations formulées dans un récent numéro de la revue Investor's Digest. Les recommandations remontent à la mi-avril et portent sur 935 compagnies inscrites à la Bourse de Toronto.

Sur un total de 3535 recommandations, je n'ai retracé que 70 ventes de titres, soit seulement 2 % de l'ensemble.

Dans la catégorie " à conserver ou vendre ", laquelle laisse présager ni plus ni moins une vente, j'ai repéré 276 recommandations, soit 7,8 % de l'ensemble.

C'est donc dire que, de toutes les recommandations portant sur les compagnies canadiennes, à peine 9,8 % encourageaient une vente, ou presque, quand la Bourse était à son sommet historique. Ce qui donne une petite vente par 10 recommandations.

Or, une recommandation sur deux (51,3 %) allait dans le sens d'un achat (914 recommandations " acheter " et 899 recommandations " acheter-conserver "). Enfin, dans la catégorie des titres à conserver, on comptait 38,9 % des recommandations.

De vrais marchands de rêve, ces analystes. À leur décharge, il faut dire qu'ils travaillent dans un milieu où les risques de conflits d'intérêts sont légion.

La preuve? Jetons un bref coup d'oeil sur les diverses activités d'une maison de courtage.

1. Elle gère habituellement pour son propre compte un ambitieux portefeuille de titres.

2. Ses analystes font des recommandations, notamment sur ces titres.

3. La maison de courtage dirige et participe par ailleurs au financement d'entreprises inscrites en Bourse.

4. Elle invite ses courtiers à écouler auprès de leurs clients ces financements.

5. Après quelques mois de retenue... forcée, il arrive assez souvent que le service de recherche de la maison de courtage se mette à publier des commentaires positifs sur les entreprises qui ont fait l'objet de financements.

Pour rassurer leurs clients, les maisons de courtage affirment qu'il y a des cloisons étanches entre chacun des services.

Alors, grand bien nous fasse, nous pouvons compter sur des marchands de rêve... objectifs!