À l'Halloween il y a un an, le ministre fédéral des Finances, Jim Flaherty, s'était déguisé en vampire et avait sucé le sang des fiducies de revenu qui étaient parties en peur sur les marchés boursiers.

À l'Halloween il y a un an, le ministre fédéral des Finances, Jim Flaherty, s'était déguisé en vampire et avait sucé le sang des fiducies de revenu qui étaient parties en peur sur les marchés boursiers.

Mardi, il a préféré le costume du Mononc' Gâteau qui distribue généreusement les bonbons.

Et cette fois-ci, le ministre Flaherty n'a pas oublié les entreprises. Il a annoncé une baisse du taux général d'imposition des sociétés aussi spectaculaire que la cravate vert fluo qu'il portait mardi au théâtre national de la presse à Ottawa.

Ce taux, qui s'établit actuellement à 22,1%, chutera à 15% d'ici 2012. D'ici cinq ans, donc, le Canada devrait avoir le taux d'imposition le moins élevé de tous les pays du G7 - si aucun des autres pays ne devait bouger.

«C'est une grosse injection d'adrénaline pour les entreprises canadiennes», a noté Jim Flaherty en dévoilant un énoncé économique qui a toutes les allures d'un minibudget.

Remarquez, l'essentiel de cette baisse en escalier surviendra plus tard que plus tôt. Et comme tout le monde le sait, une promesse qui est censée se réaliser d'ici cinq ans ne tient pas à grand-chose, surtout quand c'est un gouvernement minoritaire qui la formule.

Néanmoins, les entreprises profiteront d'une nouvelle baisse de 1% de leur taux d'imposition dès l'an prochain. Un tiens vaut mieux que deux tu l'auras.

Les PME ne sont pas en reste, profitant elles aussi d'une réduction plus hâtive de leur taux d'imposition. De 13,1%, ce taux chutera à 11% dès l'an prochain plutôt qu'en 2009.

Au total, ces mesures priveront le gouvernement fédéral de 14,1 milliards de dollars au cours des cinq prochaines années financières.

C'est ce qui a fait dire au chef du Nouveau Parti démocratique, Jack Layton, que les conservateurs font un énorme cadeau «aux banques et aux grandes sociétés pétrolières».

Mais Jack Layton avait beau s'escrimer à dénoncer cet énoncé économique, il ressemblait plus à un épouvantail qu'à la sinistre Faucheuse en cette veille d'Halloween.

En effet, si le NPD détient en principe la balance du pouvoir, il ne peut plus jouer les empêcheurs de danser en rond comme en 2005. À l'époque, rappelez-vous, il avait forcé le ministre libéral des Finances Ralph Goodale à revenir sur ses promesses de réduire les impôts des entreprises.

Tel Superman devant un petit bout de kryptonite, le pouvoir du NPD est neutralisé par l'opposition officielle, qui appuiera contre toute logique les nouvelles mesures du gouvernement.

En effet, même si Stéphane Dion abhorre l'idée d'abaisser la TPS - comme l'écrasante majorité des économistes au pays -, le chef libéral approuve les baisses d'impôts aux sociétés, qui donneront du répit aux exportateurs qui souffrent de la hausse fulgurante du dollar canadien.

C'est du moins la justification officielle. Car tout le monde aura compris que les libéraux sont trop affaiblis pour faire tomber le gouvernement et provoquer des élections générales. Stephen Harper le premier.

Bref, Jim Flaherty n'a plus besoin de jouer les ministres des Finances populistes qui cassent du sucre sur le dos des grandes banques pour s'attirer les sympathies du NPD. Aussi, les astres sont enfin alignés pour les entreprises profitent à leur tour de baisses d'impôts.

Ces baisses permettront au Canada d'attirer plus facilement des investissements au pays. En effet, l'écart entre le taux d'imposition des sociétés au Canada et aux États-Unis excédera 12% en 2012.

Dans un élan d'enthousiasme, le ministre Flaherty rêve même du jour où les provinces emboîteront le pas à Ottawa. Il vise un taux d'imposition combiné de 25%.

Mais comme le taux fédéral d'imposition des sociétés s'établira à 15%, il faudrait que les provinces abaissent leur taux à 10% pour atteindre cette cible. Or, le taux d'imposition moyen des provinces s'élève actuellement à 12,7%, selon les calculs d'Ottawa.

Mais voilà, les provinces, à l'exception de l'Alberta, n'ont pas la baguette magique de Jim Flaherty qui leur permettrait de comprimer leurs dépenses en santé et de faire entrer des milliards de dollars de recettes dans leurs coffres.

À moins, bien sûr, qu'elles augmentent leur taxe de vente provinciale de 1% pour récupérer l'espace laissé vacant par la baisse de 1% de la TPS.

Une décision coûteuse au plan politique, pour ne pas dire un suicide électoral qui effraiera les premiers ministres des provinces, Jean Charest le premier.

Aussi cette idée apparaît actuellement pour ce qu'elle est: une chimère.