Avec son complice Éric Toledano, Olivier Nakache pratique un style de comédie qui, bien que très français, parvient à bien voyager dans les autres pays francophones et ailleurs dans le monde. Nous avons profité du récent passage du cinéaste au festival Cinemania pour discuter de ce phénomène avec lui.

Certaines comédies très populaires en France ont du mal à trouver un public au Québec, ou sont carrément ignorées par les distributeurs. Les comédies québécoises à succès traversent aussi très rarement nos frontières. Or, vos films - Intouchables, bien sûr, mais pas seulement - sont appréciés partout. Quel est votre secret?

Honnêtement, je n'en sais rien. C'est drôle parce qu'avant cette interview, j'ai rencontré des étudiants de l'Université McGill qui me disaient ne jamais voir de comédies françaises, mais ils affirmaient avoir quand même vu les nôtres. Nos films voyagent, même s'ils sont pourtant très français d'esprit.

Alors, comment l'expliquer? Notre type d'humour est complètement ancré dans la culture française, mais nos influences de cinéma et de comédies anglo-saxonnes y sont peut-être pour quelque chose. À la fin, ça donne peut-être des films plus métissés, plus larges. J'ai tendance à penser que quand on part de soi de façon sincère, on arrive à parler aux autres. Je me souviens du choc ressenti quand j'ai vu La grande séduction. Pour moi, il fut aussi important que pour Quatre mariages et un enterrement. Mais il est vrai que l'humour est parfois plus difficile à faire voyager.

Le sens de la fête nous fait vivre de l'intérieur l'organisation d'une grande réception de mariage à travers tous les membres du personnel. Puisqu'il est question de partir de soi, est-il vrai que ce film a été largement inspiré par des expériences vécues par Éric et vous-même?

Tout à fait. Éric et moi sommes amis depuis notre adolescence. Il y a très longtemps, nous avons effectué beaucoup de petits boulots ensemble afin de pouvoir financer nos premiers courts métrages. Nous avons fait de l'animation dans des mariages, mais plusieurs autres tâches connexes aussi. Ce souvenir est toujours resté dans un coin de notre mémoire. Après Intouchables, nous nous sommes lancés dans Samba parce qu'il fallait bien atterrir quelque part après un tel succès. Là, nous avions envie de revenir à notre ADN, avec un scénario complètement original, beaucoup de personnages, et des comédiens venus d'horizons totalement divers.

Au milieu de ce film choral trône Jean-Pierre Bacri, qui incarne l'organisateur en chef de la réception. Avez-vous écrit Le sens de la fête spécifiquement pour lui?

Jean-Pierre occupe une place à part dans le cinéma français. Il cultive aussi une certaine rareté, et il a la réputation de dire non beaucoup plus souvent que oui. Comme nous souhaitions vraiment l'entraîner dans notre aventure, nous sommes d'abord allés le rencontrer, avant même l'écriture du scénario, et il a été séduit par notre proposition. Jean-Pierre étant aussi un éminent scénariste, nous l'avons impliqué à toutes les étapes de l'écriture en sollicitant ses commentaires. 

Nous aurions franchement eu tort de nous en priver. Avant le tournage, nous avons fait des lectures avec lui, ainsi qu'avec tous les autres comédiens. Ce fut un réel bonheur. Tous les acteurs étaient enthousiastes à l'idée de jouer avec lui.

La distribution est imposante et est constituée de comédiens venus de divers horizons, qu'ils soient connus (Gilles Lellouche, Vincent Macaigne) ou non. Et puis, il y a Suzanne Clément...

Pour nous, Suzanne, c'est une grande rencontre. Vous savez, Éric et moi allons beaucoup au cinéma ensemble. Nous avions déjà été impressionnés par la performance de Suzanne dans Laurence Anyways. Puis, nous avons vu Mommy. En passant, Xavier Dolan est un génie. Mais au-delà du choc que nous a procuré le film, nous avons «ouvert un dossier» sur Suzanne au lendemain de la projection. C'est-à-dire que dès que nous voyons, au cinéma ou au théâtre, une actrice ou un acteur avec qui on souhaiterait éventuellement travailler, on prend une photo et on monte un petit dossier. Quand est venu le moment de construire la distribution du Sens de la fête, nous sommes allés la voir, tout simplement, et nous avons eu de la chance, car elle a pu nous intégrer dans son planning, qui est extrêmement chargé. Suzanne tourne maintenant beaucoup en France. 

Que vous apporte le fait de toujours travailler en tandem avec Éric Toledano, votre meilleur ami?

Il y a mille avantages. Comme nous sommes toujours l'un pour l'autre le tout premier public, ma première volonté est de trouver quelque chose pour le faire rire. 

C'est pareil pour lui. Et puis l'un peut toujours remonter l'autre dans les cas où il y a de moins bonnes journées!

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Le sens de la fête prendra l'affiche le 15 décembre.

Photo fournie par MK2 | Mile End

Olivier Nakache et Éric Toledano forment un inséparable tandem.