Pour Jay Baruchel, ce nouvel opus consacré aux durs à cuire du film à succès Goon constitue sa première entrée dans le monde de la réalisation. Appuyé par Seann William Scott et tous les autres membres du film original, l'acteur compte désormais consacrer ses énergies à devenir cinéaste, . En prime, un rappel de films de hockey avec des poings...

Jay Baruchel: un cinéaste au Canada

Le fier Montréalais Jay Baruchel, Torontois d'adoption depuis deux ans après avoir quitté la métropole québécoise dans la controverse, s'apprête à délaisser bientôt sa carrière d'acteur à Hollywood pour concrétiser enfin le rêve de sa vie: devenir cinéaste au Canada.

Certains seraient probablement prêts à tuer père, mère, chien, chat et poisson rouge pour mener à Hollywood une carrière d'acteur comparable à la sienne. Mais Jay Baruchel ne le voit pas tout à fait du même oeil. S'il reconnaît la chance dont il a bénéficié, et le grand privilège qu'il a eu en obtenant la confiance des producteurs et cinéastes américains, le Montréalais d'origine compte maintenant concrétiser, à l'âge de 35 ans, le rêve de sa vie: entreprendre une carrière de réalisateur de films indépendants canadiens.

«J'ai beaucoup de gratitude envers le métier d'acteur, qui nous a permis de bien vivre, moi et ma famille, confiait-il lors d'un entretien accordé à La Presse plus tôt cette semaine. Mais l'art dramatique n'a jamais été ma raison d'être. Ce que j'ai surtout aimé dans le métier d'acteur, que j'exerce depuis l'âge de 12 ans, est la vie sur un plateau, le travail d'équipe. La réalisation m'a toujours attiré et a toujours constitué pour moi un but à atteindre. J'attends ce moment depuis l'âge de 9 ans!»

L'occasion rêvée

Quand Michael Dowse, qui a signé la réalisation de Goon il y a cinq ans, a annoncé qu'il lui était impossible de reprendre du service pour un nouvel opus, le nom de Jay Baruchel, qui avait cosigné le scénario du film original avec Evan Goldberg, a rapidement été évoqué, notamment par Seann William Scott, la vedette du film. Ce dernier ne s'est pas fait prier non plus pour rechausser les patins, d'autant que tous les autres acteurs ont accouru avec enthousiasme: Liev Schreiber, Marc-André Grondin, Alison Pill, Kim Coates, sans oublier Jay Baruchel lui-même. Au cours de l'écriture du scénario, qu'il cosigne cette fois avec son complice Jesse Chabot, l'acteur a toutefois tenu à réduire les présences de son personnage au strict minimum.

«L'une des choses que j'ai apprises après le premier film est que Pat, mon personnage, n'est pas du goût de tous, explique-t-il. Environ 50 % du public l'a beaucoup aimé; l'autre moitié m'appelle le "Jar Jar Binks" de Goon. J'en ai tenu compte. Et puis, je n'aime pas me regarder tant que ça à l'étape du montage!»

L'intrigue de Goon: Last of the Enforcers se déroule quelques années après celle de Goon. Les gars ont vieilli. Doug Glatt (Seann William Scott) s'est recyclé dans l'assurance afin d'assumer ses nouvelles responsabilités d'époux et de père. Quand un dur à cuire, rival notoire (Wyatt Russell), est muté au poste de capitaine de son équipe adorée, l'appel de la glace devient alors trop grand. Le récit est construit autour de ce retour improbable, où les confrontations s'entremêlent à des rivalités masculines familiales. Entre autres.

«La difficulté principale est de donner aux personnages, ainsi qu'aux fans, l'histoire qu'ils méritent, indique Jay Baruchel. Voilà pourquoi il aura pratiquement fallu cinq ans! Si le premier film avait été un échec, il n'y aurait pas eu de conséquences. Là, nous sommes dans une position différente parce que les Canadiens se sont pris d'affection pour ce film. Il y a des attentes. Ça ne sert à rien de leur donner quelque chose de moins bon. Notre but est d'être encore meilleurs.»

Un style différent

Si le premier volet misait beaucoup sur l'humour grinçant et dénonciateur, ce nouveau chapitre distille un caractère plus sentimental, malgré les scènes ultraviolentes, caricaturales, qui ponctuent le récit.

«Oui, le style est un peu différent, explique le réalisateur. Je tenais à ce que nous soyons toujours dans des zones grises sur le plan moral. On ne juge pas ces joueurs. Si tu estimes que les bagarres ne devraient pas exister au hockey, ton point de vue est exprimé. Et si tu fais partie de ceux qui les apprécient, ton point de vue est évoqué aussi!»

Qualifiant son expérience de réalisation de «meilleure de [sa] vie», Jay Baruchel compte maintenant se consacrer principalement au métier qu'il souhaite exercer depuis toujours.

«J'espère que cette entrée dans le monde de la réalisation constitue un tournant, fait-il remarquer. Quand la série télé Man Seeking Woman prendra fin et que j'aurai prêté ma voix à Hiccup dans How to Train Your Dragon 3, j'accrocherai probablement mes patins pendant un moment. Depuis 25 ans, je rumine des idées, des histoires, des personnages. Je me lève le matin en y pensant et je me couche le soir en faisant la même chose.»

Jay Baruchel n'a aucune visée hollywoodienne à titre de cinéaste, bien au contraire. Il compte tourner ses films dans le pays qui l'a vu grandir.

«La culture canadienne-anglaise est tellement poreuse que si je peux contribuer, ne serait-ce qu'un peu, à la faire valoir, je suis prêt à le faire. Je veux servir ce pays. Un de mes grands regrets - je suis sérieux - est de ne pas avoir fait l'armée. Aussi ridicule que ça puisse paraître, j'y vois une façon pour moi de joindre l'armée canadienne!»

Le coeur fendu

Installé depuis deux ans à Toronto, Jay Baruchel dit avoir été surpris par l'ampleur de la controverse suscitée par ses déclarations à l'époque de son départ, notamment à propos du mouvement souverainiste et de la charte des valeurs mise de l'avant par le Parti québécois.

«Pour avoir grandi à Montréal et y avoir vécu 30 ans, et à titre de contribuable depuis mon adolescence, je croyais avoir quand même le droit de faire une critique. Tout ce que j'ai dit, c'est deux phrases. Ça m'a fendu le coeur que ces deux petites phrases viennent effacer d'un coup toutes les choses que j'ai dites à propos de Montréal pendant 10 ans. Honnêtement, j'ai trouvé ce traitement injuste. Je vis maintenant à Toronto, surtout pour le travail, mais je reste Montréalais. Et je resterai Montréalais jusqu'à la fin de mes jours.» 

Goon: Last of the Enforcers (Goon: Le dernier des durs à cuire en version française) prendra l'affiche le 17 mars.

Seann William Scott: pour l'amour du jeu et du sport

Aux États-Unis, Goon a principalement été vu par les abonnés de Netflix. «Pratiquement pas un jour ne passe sans que quelqu'un vienne m'en parler. Ça ne m'était pas arrivé depuis American Pie!», raconte Seann William Scott, l'interprète de la brute au grand coeur. Au départ, l'acteur n'était pas certain de la pertinence de reprendre le rôle de Doug Glatt. Pourquoi risquer de gâcher le bon souvenir que le public en garde? «Mon hésitation s'est dissipée dès que j'ai lu le scénario, dit-il. J'ai dit oui tout de suite!» Ayant grandi au Minnesota, un endroit où le hockey est aussi très populaire, Seann William Scott n'avait pourtant pas vraiment chaussé les patins avant Goon. Très athlétique dans sa jeunesse, il a plutôt pratiqué le baseball, le basketball et le football. Il a même pensé un temps devenir joueur de baseball professionnel. «J'aime à penser que j'aurais pu le faire. Mais je prenais ça beaucoup trop au sérieux. Au point que je n'y prenais plus de plaisir. Je n'avais jamais pensé devenir un acteur, mais j'aime tellement le cinéma que j'ai décidé un jour d'aller m'installer à Los Angeles.» C'était il y a 20 ans. Déjà.

Cinq films de hockey avec des poings

Voici cinq autres films où il y a autant de bagarres que de buts comptés.

Slap Shot (1977)

Avec Paul Newman en vedette, ce film culte de George Roy Hill raconte la montée en puissance d'une équipe médiocre des ligues mineures après que ses joueurs eurent adopté la violence et l'intimidation comme ligne de conduite. Simple coïncidence? En 1974 et 1975, les Flyers de Philadelphie remportaient deux Coupes Stanley après avoir emprunté cette voie. Rappelons la présence de quelques Québécois, dont Yvan Ponton et Yvon Barrette, dans le casting.

Youngblood (1986)

Jeune prodige du hockey sur glace sur le point de faire son entrée dans la Ligue nationale, Dean Youngblood (Rob Lowe) découvre que plus il s'approche de son but, plus ça joue dur. Intimidation, mises en échec vicieuses et bagarres font soudainement partie de son quotidien. Pour survivre, il n'a qu'un choix: apprendre à se défendre. Ce film de Peter Markle met aussi en vedette Patrick Swayze, mort en 2009.

The Mighty Ducks 2 (1994)

Du brasse-camarade dans un film de Disney? Si, si. Dans cette suite du film original, signé Sam Weisman, une équipe junior du Minnesota s'entraîne en vue des Goodwill Games. Et l'entraînement a une saveur particulière, empruntant aux savantes méthodes du... rollerblade! Ce qui donne des scènes hilarantes desquelles on ne ressort pas sans quelques bleus.

Net Worth (1995)

Ce téléfilm canadien signé Jerry Ciccoritti, couronné de quatre prix Gemini en 1997, s'intéresse à l'histoire du joueur Ted Lindsay (Aidan Devine) des Red Wings de Detroit. Dur à cuire sur la glace, Lindsay, qui a joué de 1944 à 1965, a mené un rude combat à l'extérieur de la patinoire afin que les joueurs de LNH puissent créer une association des joueurs. Le film met aussi en vedette Carl Marotte, grande vedette de la série québécoise Lance et compte.

Ice Guardians (2016)

En marge des films de fiction, plusieurs documentaires ont été consacrés aux bagarreurs du hockey. Le dernier en date, Ice Guardians de Brett Harvey, véhicule les témoignages de joueurs talentueux (Brett Hull, Jarome Iginla) et de brutes célèbres (Dave Schultz, Dave Semenko). Dans la même veine, on pourra aussi regarder Bagarreurs Inc. de Sophie Lambert (scénario de notre collègue Mathias Brunet), ou encore The Last Gladiators d'Alex Gibney.

PHOTO FOURNIE PAR LA PRODUCTION

Les frères Hanson dans le film Slap Shot