Directeur du New York Film Festival, Kent Jones vient de réaliser un documentaire sur la célèbre rencontre de 1962 entre les réalisateurs François Truffaut et Alfred Hitchcock.

Le premier, d'une génération plus jeune, s'est fait journaliste et historien, questionnant Hitchcock sur tous les aspects de son travail de metteur en scène. La rencontre, qui a duré une semaine, a donné naissance au livre Le cinéma d'Alfred Hitchcock, publié en 1966, une référence dans le domaine.

Par courriel, M. Jones a répondu à nos questions.

Parlez-nous de votre découverte du livre. Quelles ont été vos premières impressions?

J'avais 12 ans et je ne me souviens plus si j'ai acheté le livre ou si je l'ai reçu en cadeau. Je n'ai cessé de potasser plusieurs passages ou sections que je relisais encore et encore. Cet ouvrage était différent de tout ce qui s'était fait en matière de livres de cinéma jusque-là. Il y avait des livres illustrés, des recueils de critiques, mais rien de semblable. 

Pourquoi cet ouvrage est-il encore d'actualité près de 50 ans après sa publication?

Parce qu'il est en mouvement. Comme un film. Truffaut s'est investi dans son livre dans un sens philosophique. Pour lui, Hitchcock incarnait tous les fondements du cinéma. Truffaut n'a pas que participé aux enregistrements pour ensuite les balancer à un graphiste. Il a pensé à tout. Aux plans, aux arrangements, etc. C'est lui qui a imprégné ce mouvement dans l'ouvrage.

Pourquoi n'y a-t-il pas de points de vue féminins dans votre documentaire?

J'ai demandé à des réalisatrices que j'admire de s'exprimer, mais elles se sont excusées pour différentes raisons. Je reconnais qu'il y a cette réalité, brutale, d'un ratio hommes/femmes déséquilibré dans l'industrie, mais je ne voulais pas non plus une entrevue avec une femme juste parce qu'elle est une femme. Je ne crois pas à cette façon de faire. Je voulais une réalisatrice qui avait quelque chose à dire sur Hitchcock et sur le livre et non quelqu'un qui allait froidement débiter quelques lieux communs à la mémoire de ce dernier.

En terminant, vous êtes davantage Truffaut ou Hitchcock?

Le cinéma d'Hitchcock me captive depuis que je suis enfant. Je ressens ses films en moi depuis presque toujours. Lorsque je regarde certaines de ses oeuvres, c'est une nouvelle expérience chaque fois. Il n'a jamais fait un mauvais film. J'ai une histoire différente avec Truffaut. J'ai l'impression que je commence à peine à connaître certains de ses films. C'est, à la base, un excellent conteur. Mais à la suite de sa mort, certaines de ses oeuvres me sont apparues beaucoup plus complexes qu'à l'origine et je continue à les découvrir. Et comme personne, Truffaut continue à être pour moi l'esprit de jeunesse par excellence du cinéma.

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Hitchcock/Truffaut prendra l'affiche au Cinéma du Parc le 18 décembre.