La Suède. On pense à Bergman ou à Millenium. On voit noir, pas nécessairement drôle et absurde. C'est le pari que réussit le réalisateur Felix Herngren avec Le vieux qui ne voulait pas fêter son anniversaire.

Appel d'outremer. Le téléphone sonne.

- Bonjour, c'est Felix Herngren. Je suis dans mon automobile, en mains libres.

Conversation de 10 minutes à bâtons rompus au sujet du succès, de la température, du bonheur de tourner des films.

- Ah! excusez-moi, c'est mon fils.

Dialogue en suédois de voix enjouées, mais incompréhensibles. Retour à l'entrevue avec la même convivialité pendant cinq minutes.

- Ah! excusez-moi, c'est ma femme.

Bruit de vitre électrique. Dialogue en suédois plus tranchant. Les voix s'échauffent, les répliques se bousculent. Le ton monte.

- Euh, excusez-moi, j'ai un problème. Nous devons terminer l'entrevue.

Cette petite scène aurait pu se retrouver telle quelle dans le film Le vieux qui ne voulait pas fêter son anniversaire de Felix Herngren, véritable compendium de situations loufoques et saugrenues.

Ce n'est pas que le sympathique réalisateur et acteur ne voulait pas faire l'entrevue, mais voilà un homme fort occupé. Felix Herngren est une vedette de la télévision en Suède. Il a accumulé les succès depuis les années 90 en commençant avec S.M.A.S.H., une sitcom basée sur les insuccès de quatre joueurs de tennis. N'est pas Björn Borg qui veut!

Né en 1967, Herngren est aujourd'hui producteur, réalisateur, scénariste et un peu moins souvent acteur. Sa popularité n'est pas étrangère au fait qu'il a pu tourner ce film tiré d'un énorme best-seller en Suède, dont le titre anglais s'approche plus de l'esprit et de la lettre de l'oeuvre originale: The 100-Year-Old Man Who Climbed Out the Window and Disappeared.

«C'est le plus grand budget jamais accordé à une comédie en Suède, souligne le cinéaste. Les attentes étaient élevées en raison du succès du livre [700 000 exemplaires vendus en Suède seulement], mais je préfère faire un film avec d'énormes attentes qu'adapter un roman inconnu avec un scénario faible. J'étais quand même nerveux lors de la première.»

Forrest Gump suédois

Le film raconte la vie rocambolesque et bizarroïde d'Allan Karlsson qui n'a aimé qu'une seule chose en 100 ans: faire sauter des trucs, les pétards d'enfants comme la bombe atomique et les méchants. On le verra d'ailleurs aux côtés des grands, tels un Zelig ou encore un Forrest Gump de l'absurde.

«L'idée de tourner autour d'un personnage qui a vécu pendant un siècle était captivante. Avec le film, on voulait faire rire, mais aussi donner un coup de pied au derrière de la réalité. Après tout, les gens qui gouvernent le monde sont des idiots, fait-il en riant. Il est difficile de ne pas devenir cynique en voyant ce qui se passe en politique.»

Le film nage donc à contre-courant de la rectitude politique et son réalisateur croit que cela a contribué à son succès en Suède.

«Les gens veulent rire. Mais je crois, ajoute-t-il, que le film peut rejoindre tous les publics. Déjà, on reçoit de bons signaux d'Allemagne et de la Corée du Sud. Après tout, ils côtoient l'absurdité tous les jours là-bas.»

Télévision

Autre repère mutuel avec nous, le public suédois se fait lui aussi tirer l'oreille pour aller voir des films suédois en salle.

«C'est très difficile, admet Felix Herngren. C'est pour ça que, comme partout ailleurs je crois maintenant, les artisans de cinéma se tournent beaucoup vers la télévision afin de rejoindre le public. On peut y développer des concepts intéressants avec des scénarios et des personnages très forts. Puis, à la télé, contrairement au cinéma, le succès entraîne le succès.»

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Le vieux qui ne voulait pas fêter son anniversaire prend l'affiche le 3 octobre.