Son premier film, Bienvenue chez les Ch'tis, faut-il le rappeler, a pulvérisé des records en France où il a totalisé plus de 20 millions d'entrées. C'était en 2008. Du jour au lendemain, le comédien et réalisateur natif de la région d'Armentières, dans le Nord-Pas-de-Calais, est devenu une star.

Un an plus tard, pour échapper à sa «vie de vedette» et pour que les gens lui «parlent normalement», il décide de s'installer à Los Angeles, où il passe relativement inaperçu... Dany Boon serait-il hypocondriaque? Eh bien oui, figurez-vous. Il l'a d'ailleurs toujours été, nous dit-il.

Mieux, c'est son hypocondrie qui lui a inspiré le scénario de Supercondriaque, qui met en scène le personnage de Romain Faubert, célibataire de 39 ans, qui travaille comme photographe pour un dictionnaire médical en ligne. Obsédé par son état de santé... et la vie en général.

Comme votre personnage de Romain Faubert, vous souffrez d'hypocondrie. Pas autant que lui, tout de même?

Non, pas autant que lui... J'ai un peu poussé le bouchon, mais je suis quand même assez hypocondriaque, oui. Vous savez, pour moi, ce n'est pas une souffrance. C'est plus une souffrance pour les autres! Moi, je le vis très bien (rires)...

Comment ça se manifeste chez vous, concrètement?

Je fais tout le temps des examens médicaux, je fais très attention à tout et je peux paniquer assez facilement dès qu'il se passe un truc. Quand j'étais en tournée en province, dans mon hôtel, il y avait une piscine. Comme je fais beaucoup de sport, j'ai mis mon maillot, mes lunettes et j'ai nagé pendant 1h. Quand je suis monté pour donner des interviews, j'ai remarqué que mes paupières étaient gonflées... j'ai appelé le médecin pour me rendre compte que c'était les marques de mes lunettes de piscine...

À quel moment vous êtes-vous dit que ce serait un bon sujet de film? Parce que ce ne doit pas être toujours drôle d'être hypocondriaque...

Oh, ça va... mais c'est vrai que depuis qu'on est tous sur l'internet et qu'on tape nos symptômes dans les moteurs de recherche comme des dingues, on a ouvert une boîte de Pandore. On découvre des choses absolument terribles et on devient de plus en plus hypocondriaques, centrés sur nous-mêmes et inquiets.

Comment la communauté hypocondriaque a-t-elle réagi au film?

Je n'ai pas vraiment eu de réactions directement de personnes hypocondriaques, mais il y a beaucoup de femmes qui m'ont dit: «Ah, c'est mon mari...» Je trouve ça très drôle. Il y en a qui ont dû recevoir des coups de coude...

Ce film a-t-il eu un effet quelconque sur votre hypocondrie?

Ça l'a accentuée. Je suis encore plus hypocondriaque maintenant (rires)... J'ai tourné dans un hôpital, j'ai eu accès à plein de machines, fait des examens médicaux dans tous les sens... C'est terrible.

Votre personnage s'en sort un peu lorsqu'il est pris pour un révolutionnaire du Tcherkistan (un pays imaginaire)... Cet imbroglio lui redonne une certaine confiance, le décentre de lui-même...

Oui, tout à fait. Je voulais le confronter à son double héroïque. Au fond, la guérison arrive par l'amour. C'est le regard du personnage d'Anna (Alice Pol) qui le décentre. Pour la première fois, une femme pose sur lui un regard amoureux. Il est tellement étonné de ce quiproquo, qu'il fonce là-dedans tête baissée.

En incarnant le personnage du révolutionnaire Anton Miroslav, vous vous êtes fait plaisir... C'est un beau terrain de jeu pour un comique comme vous!

Absolument. C'est très proche des personnages que j'incarne dans mes spectacles sur scène. Ce que j'aime beaucoup aussi dans les comédies, et qu'on voit de moins en moins, ce sont les gags visuels. Du slapstick. On oublie parfois qu'on peut aussi utiliser son corps pour faire rire.

Pour vous, ce sont des retrouvailles avec Kad Merad, qui était le personnage principal de Bienvenue chez les Ch'tis.

Je préférerais ne pas en parler... (rires) Non, j'étais content de retrouver Kad. C'est un acteur exceptionnel, qui joue merveilleusement bien le rôle de ce médecin dépassé par son amitié pour Romain. Kad est un acteur d'une grande humanité et d'une grande richesse. C'est un bonheur de travailler avec lui.

Votre complicité est évidente à l'écran. Ça aide, de jouer avec des acteurs qu'on connaît bien dans la vie?

Oui, bien sûr. Mais on ne se voit pas tellement souvent. Lui vit à Marseille, moi, jusqu'à récemment, j'habitais à Los Angeles, mais quand on se voit, c'est toujours un bonheur. Quand j'étais à Marseille pour l'avant-première du film, j'ai dormi chez lui. Et j'ai regretté... (rires)

Dans tous vos films, les quiproquos s'alimentent de nos différences culturelles ou de la peur et la méfiance de l'Autre. C'est un thème que vous abordez de façon consciente?

Oui, c'est conscient. Mais au-delà de l'acceptation de l'autre, qui est certainement l'un des thèmes du film, je voulais porter un regard sur ces sociétés d'Europe de l'Est, qui n'ont pas les mêmes priorités que nous, même si nous sommes géographiquement très proches... Ils vivent dans une autre dimension que nous, ils sont encore confrontés à la guerre. Au fond, ils n'ont pas le luxe d'êtres hypocondriaques. Car c'est un luxe.

J'ai lu quelque part qu'on vous comparaît aux États-Unis à l'acteur Adam Sandler pour ses «comédies débiles».

Oui, oui, j'ai lu cet article, j'ai bien aimé (rire nerveux).

Supercondriaque prend l'affiche le 5 septembre.

L'aventure américaine

Le tournage du premier film américain de Dany Boon, The Ambassadors, financé par le studio Fox, devait commencer ce mois-ci à Londres, mais il a été reporté, a indiqué le réalisateur français, qui ne jouera pas dans son film. «On réécrit le scénario, en fait», a-t-il confié à La Presse.

«Il se trouve qu'il y a un film en cours de montage avec l'acteur Vince Vaughn qui traite un peu du même sujet et qui est distribué par Fox. Donc, on réécrit et on tournera dans la prochaine année. Mais je me suis installé avec ma famille à Londres, ce sera plus facile de faire avancer le projet.

Le film qui sera aussi tourné en studio «dans un pays d'Europe de l'Est», raconte l'histoire d'un Américain «qui tente par tous les moyens de rentrer aux États-Unis avec l'aide d'un groupe d'Européens». Dany Boon fait équipe avec le scénariste américain Tripper Clancy.

La sortie du film n'est pas prévue avant 2016. La distribution sera confirmée au cours de l'année, a-t-il précisé.

En attendant, Dany Boon jouera dans le nouveau film de la comédienne et réalisatrice franco-américaine Julie Delpy: Lolo. Son personnage, Jean-René, est un «plouc». «Ce sera une première pour moi», rigole-t-il. Il s'agit de la première collaboration de l'acteur avec la réalisatrice des films Two Days in...

«Je joue le rôle d'un mec de province, qui tombe amoureux de Julie Delpy, qui travaille dans la mode, alors que moi je suis un petit informaticien... Lolo est le fils de 20 ans de Julie, un peu psychopathe, qui fait tout pour empêcher sa mère d'être avec moi, pour la garder pour lui tout seul...»

Dany Boon prépare enfin un nouveau one man show qui sera présenté à l'Olympia de Paris en 2016. «Ça fait longtemps que je n'ai pas fait de scène. J'ai très hâte.»

Les quatre films réalisés par Dany Boon

Supercondriaque (2014)

Le film écrit et réalisé par Dany Boon met en vedette Kad Merad (L'Italien, Bienvenue chez les Ch'tis), mais aussi Alice Pol, Jean-Yves Berteloot et Judith El Zein.

Rien à déclarer (2010)

Dany Boon fait équipe avec Benoît Poelvoorde, qui interprète le rôle d'un douanier belge francophobe. Le film n'a pas eu le même succès que Bienvenue chez les Ch'tis.

Bienvenue chez les Ch'tis (2008)

Le film, qui narre les aventures d'un directeur de La Poste muté dans le Nord-Pas-de-Calais après avoir feint d'être handicapé, est un succès instantané. Kad Merad et Dany Boon y partagent la vedette.

La maison du bonheur (2006)

Le premier film réalisé par l'acteur et humoriste français est une adaptation de la pièce La vie de chantier. Le film raconte l'histoire d'un employé d'une société de crédit qui finit par être surendetté.