Quand il a présenté The Lone Ranger au public de Santa Fe la semaine dernière, Gore Verbinski a beaucoup insisté sur la somme de travail requise pour le tournage de son film. Les superproductions lui étant déjà familières (il a réalisé les trois premiers volets de la série des Pirates des Caraïbes), le réalisateur semble avoir trouvé l'aventure particulièrement périlleuse cette fois.

Appelé à commenter au cours d'une entrevue accordée à La Presse au lendemain de cette projection, Gore Verbinski a notamment fait écho aux conditions météorologiques dans lesquelles le tournage s'est déroulé.

« Tourner au Nouveau-Mexique, et dans quatre autres États du Sud-Ouest, cela veut dire que l'on doit composer avec un climat qui peut changer rapidement, explique-t-il. Il peut faire très chaud, très froid, et le temps peut être très venteux, très pluvieux, tout cela parfois à l'intérieur d'une même journée. Pendant 150 jours, on se retrouve avec de la poussière et de la terre dans les yeux, dans les dents, partout. On prend sa douche et on n'en finit plus d'enlever les résidus de boue. Sur le plan logistique, les scènes étaient aussi plus compliquées que sur un bateau, notamment celles impliquant des trains d'époque. Comme nous avons tourné le film à 90 % en éclairage naturel, ce n'était pas toujours évident. «

Un héros d'une autre époque

La première fois où l'idée d'une nouvelle mouture cinématographique du Lone Ranger lui a été proposée, le cinéaste n'a pas débordé d'enthousiasme. Il n'utilisera pas le mot « ringard «, mais la mythologie du personnage appartient visiblement à une autre époque dans son esprit.

« Même si j'ai grandi dans les années 60 et 70, The Lone Ranger relève clairement du temps de mes parents, dit-il. Pour moi, The Lone Ranger n'était qu'une vieille émission de télé en noir et blanc qui passait en reprise tard le soir. Je ne me suis jamais identifié à ce truc qui, à mes yeux, n'avait rien de cool. Je me suis intéressé à ce projet grâce à l'angle original qu'on a pris, c'est-à-dire que nous avons voulu raconter l'histoire du Lone Ranger à travers le regard de Tonto. Quand j'ai vu les photos de Johnny dans le personnage, le déclic s'est fait. Avec les scénaristes, nous avons travaillé le script pendant 18 mois. J'ai accepté d'assumer cette réalisation en posant mes conditions. Je tenais à ce que Tonto soit un personnage aussi important que celui du héros. «

Hormis Tim Burton, Gore Verbinski est le cinéaste avec qui Johnny Depp a travaillé le plus souvent.

« On peut se parler franchement, Johnny et moi. Je crois que là réside la base d'une solide amitié. On ne prend pas de projets communs à la légère. Pour moi, un film comme The Lone Ranger nécessite un investissement de vie de trois ans. Pour lui, c'est sa réputation qui est en jeu. C'est lui qui est à l'écran. Nous avons cet accord tacite entre nous de toujours offrir quelque chose d'un peu décalé, d'un peu différent. «

D'architecte à exécutant

Même s'il adore son métier, Gore Verbinski concède que l'étape du tournage peut parfois se révéler plus difficile.

« Quand arrive cette étape, ma femme me dit toujours que j'arrête alors d'être l'architecte pour devenir l'entrepreneur et l'exécutant. Cela est très juste. J'adore la page blanche, le crayon, le papier. Quand on doit ensuite mettre en images ce qu'on a imaginé, parfois dans des conditions moins évidentes, cela peut devenir accablant. C'est un grand défi de maintenir son moral, tout autant que celui de l'équipe. Heureusement, nous avions Armie Hammer pour nous aider à ce chapitre !»

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Historique: un héros vieux de 80 ans

1933

Naissance de The Lone Ranger sur les ondes radiophoniques de la station WXYZ de Detroit, au Michigan. Le propriétaire de la station, George W. Trendle, souhaitait un feuilleton western qui pourrait plaire à un jeune public. Scénarisée par Fran Striker et réalisée par James Jewell, l'émission a rapidement pris une envergure nationale. Elle a quitté les ondes le 3 septembre 1954, au bout de 2956 épisodes.

1949

Début de la série télévisée au réseau ABC. La tête d'affiche est Clayton Moore. Jay Silverheels prête de son côté ses traits au personnage de Tonto, plus secondaire. L'émission se poursuivra jusqu'en 1957.

1956

Avec la popularité de la série à la télévision vient une première adaptation cinématographique, concoctée par la même équipe. Clayton Moore reprend bien entendu son rôle pour le grand écran. La réalisation de The Lone Ranger est signée Stuart Heisler.

1958

The Lone Ranger and the Lost City of Gold (Lesley Selander) est la deuxième et dernière mouture cinématographique directement inspirée par l'émission de télé.

2013

Après quelques téléfilms plus ou moins bien accueillis (1981, 2003), The Lone Ranger revit aujourd'hui au cinéma sous les auspices du producteur Jerry Bruckheimer. Le budget de cette superproduction s'élève à 215 millions de dollars. Les têtes d'affiche sont Armie Hammer, Johnny Depp, Helena Bonham Carter, Barry Pepper et Tom Wilkinson.