«Des policiers qui mangent des beignes...»

Les journalistes présents à la rencontre de presse de Pride and Glory (En toute loyauté dans sa version française), en septembre, au Festival international du film de Toronto, ont bien rigolé lorsque le réalisateur Gavin O'Connor a répondu ainsi à une question sur les clichés qu'il a cherché à éviter dans son film policier.

Il faut dire que O'Connor (Tumbleweeds, Miracle) s'attaquait à un genre assez fréquenté au cinéma, la corruption policière, de surcroît au sein de la police de New York. Depuis Serpico, avec Al Pacino, tourné en 1973, ils ont été nombreux (et pas toujours très réussis) les films consacrés aux magouilles de flics pas catholiques.

Mais Gavin O'Connor et son frère jumeau Gregory, producteur du film, avaient de bonnes raisons de porter cette histoire au grand écran, puisque tous les deux fils de policier. La famil- le occupe d'ailleurs une place prépondérante dans l'intrigue, avec un détective (Edward Norton) soupçonnant l'implication de son beau-frère (Colin Farrell) et de son frère (Noah Emmerich) dans les meurtres de quatre collègues, commis lors d'une descente chez des trafiquants de drogues.

Le portrait de famille est complété par le chef des enquêtes criminelles (Jon Voight) qui est aussi le père (et le beau-père) de tout ce beau monde. Bonjour l'ambiance...

Mur du silence

«Nous avons surtout voulu faire un film sur le mur du silence et le code d'honneur qui existent chez les policiers, explique O'Connor. Même s'il était réticent au départ, mon père a bien vu que nous voulions faire quelque chose de sérieux. Nous avions beaucoup de conseillers sur le plateau. Il a compris et aimé le film.»

Pour le comédien Edward Norton, Pride and Glory se détache des autres films policiers par l'affrontement entre des valeurs comme la loyauté à une institution et l'obligation de débusquer la vérité coûte que coûte, même au prix de graves dommages collatéraux sur une famille tricotée serrée.

«Plus je lisais le scénario, plus il avait des résonances particulières en moi», explique celui qui s'est glissé cet été dans la peau de L'incroyable Hulk. «Je crois que le film arrive au bon moment, avec tout ce qui arrive aux États-Unis, avec ces histoires de torture et de scandales de toutes sortes. Comme si les gens réalisaient toute l'importance de connaître la vérité, surtout de la part d'institutions censées les protéger. Nous avons besoin d'avoir un haut degré de standard à l'égard de ces valeurs.»

«Dans les années 60 et 70, sans tous les médias d'aujourd'hui, les gens en savaient peu sur ce qui se passe à l'intérieur de la police, que ce soit à New York ou ailleurs. C'était difficile de pénétrer ce milieu. Mais quelque part, ça le demeure encore», ajoute O'Connor.

Scène éprouvante

Absent à la rencontre de presse, tenue devant une vingtaine de reporters, Colin Farrell, qui incarne le policier par qui le scandale arrive, a fait parler de lui, à travers une scène particulièrement éprouvante. Son personnage, sentant l'étau se resserrer sur lui, et déterminé à obtenir des informations cruciales, menace de brûler au visage le bébé d'un trafiquant de drogues avec un fer à repasser...

«Ç'a été la scène la plus difficile à tourner, ce n'était vraiment pas agréable du tout, confesse Gavin O'Connor. C'est une scène brutale, c'est vrai, mais elle est essentielle pour montrer le désespoir qui habite le personnage de Colin Farrell, et jusqu'où il est prêt à aller pour obtenir des informations.»