Zombies, langage-virus et humour absurde: célèbre pour ses road movies, Bruce McDonald s'aventure sur un autre terrain avec Pontypool. Rencontre avec le réalisateur torontois.

Avec son chapeau de cow-boy noir feutré et sa barbe négligée, Bruce McDonald sirote un café devant le buffet de l'hôtel. Le gaillard rigole en se souvenant de ses premières amours cinématographiques.

«Au secondaire, je croyais que Night of the Living Dead (de George Romero) était le plus grand film de l'histoire de l'humanité. J'essayais de l'imiter dans mes premiers films étudiants. Dans l'un d'eux, des zombies attaquaient l'école. Tous les profs mouraient.»

Bref, une fin heureuse.

Pontypool marque en quelque sorte un retour aux sources. Un retour apprécié, il faut croire. Le Festival du film de Toronto a classé le long métrage dans son top 10 des oeuvres canadiennes de 2008. Ce n'est pourtant pas une oeuvre consensuelle. Filmée en 15 jours avec un petit budget et aucune subvention, elle joue sur différents degrés. Mystère, horreur et humour absurde s'y côtoient. On ne sait pas trop s'il faut rire, crier ou essayer de comprendre quelque chose.

Le scénario est adapté de Pontypool Changes Everything, un roman de Tony Burgess. «L'histoire est assez débile. En gros, la langue anglaise est infectée par un virus. Les gens atteints font des choses bizarres», raconte McDonald. Il qualifie le livre de «folle rencontre entre le cinéma de série B et le monde universitaire» (Burgess détient une maîtrise en sémiotique).

Juste assez glauque pour séduire McDonald. Après sa lecture, il en demande les droits d'adaptation à Burgess. «Comme je n'avais pas trop d'argent, je lui ai offert en échange un oeuf Kinder. Tu sais, ceux avec une récompense à l'intérieur...»

Entente acceptée. Burgess a finalement été payé un peu plus pour son long travail. Il a écrit une vingtaine de versions du scénario avec McDonald avant de recevoir un appel de la CBC. Elle cherchait une dramatique radio. Le duo a donc adapté les textes déjà écrits pour ce médium.

Inspiré de War of the Worlds

On fait remarquer à McDonald que son histoire fait penser à Orson Wells. «Oui, acquiesce-t-il en riant. Son War of the Worlds était un peu un modèle. J'aimais l'idée qu'on entende des voix terrifiantes à la radio, en se demandant si c'est vrai ou non. Le résultat nous a plu, tellement qu'on a finalement tourné le film à partir de ce scénario.»

Résumons donc Pontypool. Grant Mazzy, un provocateur des ondes, échoue à la radio CSLY de Pontypool, en Ontario. C'est le seul boulot qu'il peut trouver. Il diffuse son émission matinale depuis un sous-sol d'église. Un matin d'hiver, l'animateur reçoit en ondes des appels mystérieux. Son chroniqueur à la circulation semble lui aussi terrorisé. La panique s'installe dans la petite ville. S'agit-il de terroristes québécois, de zombies ou tout simplement d'une mauvaise blague? On ne comprend pas vraiment, à moins de prêter attention aux mots...

L'action se déroule en quasi-totalité dans le sous-sol d'église. «Le film repose avant tout sur les dialogues, explique McDonald. Visuellement, c'est très sobre. Ça contraste avec la réalisation plus stylisée de The Tracey Fragments (son film précédent).

Le Torontois travaille présentement sur un projet intitulé Love Supreme, et aussi sur une suite à son classique Harcore Logo, un faux rockumentaire sur un groupe punk.

«J'attends seulement (le comédien) Hugh Dillon pour commencer le tournage. On a déjà monté de fausses archives du groupe, avec des 45-tours, des critiques de concert du magazine Spin et plusieurs autres choses.»Comment prolongera-t-il cette histoire qui se terminait sur une fin sans équivoque? «Disons qu'elle implique des points de vue postmodernes...»

Pontypool est présentement à l'affiche.