Le FFM présente Le coeur et le courage, film d'Arantxa Aguirre sur le nouvel élan insufflé par Gil Roman à la compagnie de Maurice Béjart après la mort du chorégraphe en novembre 2007. Danseur et ami pendant 30 ans de Maurice Béjart et désormais directeur artistique du Ballet Béjart Lausanne, Gil Roman interprétera un court ballet demain au Théâtre Maisonneuve avant la présentation du film.


La question de la transmission en danse reste une des plus subtiles qui soit. Chaque chorégraphe répond d'une façon singulière à cette question double: comment transmettre la danse en soi, les pas, mais surtout l'esprit qui les anime? Et que faire de la compagnie, faut-il la conserver ou bien la dissoudre une fois le chorégraphe disparu?

Merce Cunningham, disparu en juillet dernier, a ainsi assuré la captation et la transcription de tous ses ballets, mais souhaité que sa compagnie soit dissoute après une ultime tournée mondiale. La Fondation Jean-Pierre Perreault par ailleurs n'a pas survécu à son initiateur. Maurice Béjart a eu le temps de demander à Gil Roman de «continuer, préserver, posséder son oeuvre et ses ballets» et qu'il ne «voyait personne d'autre» pour le faire.

Gil Roman, danseur fétiche, ami et alter ego de Béjart, a donc reçu de lui ce cadeau qui est aussi une immense responsabilité. Émouvant autant qu'instructif, le film d'Arantxa Aguirre s'immisce précisément dans ce temps de passage, suivant le Ballet Béjart Lausanne pendant un an, entre la présentation du répertoire posthume de Béjart et la création d'Aria, la première de Gil Roman pour la compagnie dont il a hérité. Le film présente Gil Roman et les danseurs de la compagnie, ainsi que plusieurs figures de la danse comme la directrice de la danse de l'Opéra de Paris ou bien le maire de la ville de Lausanne qui subventionne entièrement la compagnie.

«C'est un miracle que nous nous soyons trouvés Maurice et moi, dit Gil Roman au téléphone, tout le reste a naturellement découlé de ce long compagnonnage de 30 ans.» Le film d'Aguirre ne cherche pas à justifier la transmission mais donne plutôt à voir la réalité des relations au sein de la compagnie et du travail de création en studio, car c'est là la seule vérité qui puisse contrer les mauvaises langues qui n'ont pas manqué de se délier après la mort du maître.

«J'étais directeur adjoint de la compagnie depuis 1993, dit Roman, je connais la compagnie de l'intérieur et je voulais montrer comment nous continuons le chemin, ensemble. Continuer, ce n'est pas chercher à reproduire les pas, car un pas est mort s'il perd le sens qui le porte. Continuer implique d'avoir la liberté de remettre en question le travail de Maurice en respectant l'idée de départ, mais avec une nouvelle liberté. De toute façon Maurice m'a dit: «Quoi qu'il arrive, ne te retourne pas sur le passé.» C'est donc sur cette corde raide qu'avancent désormais les 38 danseurs du Ballet Béjart Lausanne guidés par Gil Roman.»

Avancer c'est travailler: «Je ne sais pas comment faire autrement, dit Roman, il faut créer, chaque jour se confronter à la danse et construire. C'est aussi pour ça que je continue de danser, même si mon temps est surtout consacré à la compagnie. En continuant de danser je transmet aussi, je nourris les danseurs qui prennent ce qu'ils ont à prendre en me regardant. Mais surtout, j'essaie d'aimer les danseurs. L'amour a toujours été au coeur de ma relation avec Maurice et au coeur de la compagnie.» Pour reprendre le titre du film, il faut le coeur pour garder la mémoire, et le courage pour travailler, créer en cheminant vers demain.

On peut s'étonner qu'un documentaire sur la danse soit présenté dans le cadre d'un festival généraliste comme le FFM, mais Gil Roman s'en réjouit: «Béjart a toujours destiné la danse au peuple, au plus grand nombre, présenter le film dans ce cadre respecte donc parfaitement son esprit.»

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Le coeur et le courage, d'Arantxa Aguirre, est présenté dans le cadre du FFM les 6 et 7 septembre.

Gil Roman dansera le 6 septembre à 19h au Théâtre Maisonneuve avant la présentation du film en première nord-américaine.