Sandrine Bonnaire ne connaissait pratiquement rien aux échecs avant de se lancer dans le tournage de Joueuse, adaptation du roman éponyme de Bertina Heinrichs par la réalisatrice Caroline Bottaro. Poussée par un souci de perfectionnisme, l'actrice s'est mise à l'apprentissage du jeu de Boris Spassky afin d'imprégner une forte dose d'authenticité à son personnage.

«Je ne savais pas jouer, pas plus que je connaissais les règles. Pour les besoins du film, j'ai appris plusieurs parties par coeur», avouait-elle, la semaine dernière, lorsque jointe par Le Soleil à Angoulême, où elle présidait le jury du second Festival de cinéma francophone, qui a consacré comme meilleur film, la fin de semaine dernière, celui de Philippe Falardeau, C'est pas moi, je le jure!

Dans Joueuse (à l'affiche la semaine prochaine), Sandrine Bonnaire incarne le rôle d'une femme de chambre d'un petit village corse qui développe une passion dévorante pour les échecs. Un énigmatique professeur américain (Kevin Kline) lui servira de mentor dans la maîtrise de ce nouveau passe-temps, sorte de refuge pour la jeune femme à une vie sentimentale qui bat de l'aile.

«Les échecs, c'est a priori très élitiste. Ceux qui en jouent viennent souvent d'un milieu social élevé. Il y a une connotation de l'intellect très forte reliée à ce jeu. J'ai trouvé intéressant l'histoire de cette femme très peu éduquée qui va néanmoins devenir très bonne.»

Mais cette attirance soudaine et inattendue dissimule autre chose. Hélène cherche à donner un nouvel élan à son mariage, auprès d'un homme davantage préoccupé par son boulot et ses potes que par les états d'âme de sa femme. «Quelque part, elle cherche à ranimer le désir de son mari à son égard, après avoir vu ce couple (Kline et Jennifer Beals) jouer aux échecs dans un mode de séduction. Elle se dit alors qu'en achetant un échiquier à son mari, elle recréera ce qu'elle a vu sur cette terrasse. Mais il faut être deux pour jouer...»

«Mais ce qui m'a le plus séduite dans mon personnage, poursuit l'actrice de 42 ans, c'est son désir d'aller au bout d'une passion. À un certain moment, elle dit : ?Quand on prend des risques, on peut perdre. Quand on n'en prend pas, on perd toujours?. C'est pour cette phrase-là que j'ai décidé de faire le film.»

Trouver le bon rythme

Ex-conjointe de William Hurt, Sandrine Bonnaire donne la réplique dans Joueuse à un autre acteur américain qui se débrouille très bien dans la langue de Molière, Kevin Kline. La vedette «oscarisée» de A Fish Called Wanda tient son premier grand rôle entièrement en français, en incarnant un mystérieux et solitaire sexagénaire de plus en plus animé de désir à l'égard d'Hélène. «Même s'il a fait appel à un coach pour son français, nous avons beaucoup travaillé ensemble pour trouver le bon rythme de nos répliques», précise-t-elle.

Vue chez Pialat (Sous le soleil de Satan), Chabrol (La cérémonie), Varda (Sans toit ni loi), Sautet (Quelques jours avec moi) et Rivette (Jeanne la Pucelle), Sandrine Bonnaire travaille par ailleurs à l'élaboration de son premier long-métrage de fiction, L'homme dans la cave (titre de travail). Il y a deux ans, la comédienne avait livré à la Quinzaine des réalisateurs de Cannes un documentaire sur sa soeur autiste, Elle s'appelle Sabine.

D'ici là, on la retrouvera dans un biopic consacré à la vie du peintre impressionniste Claude Monet, mis en scène par Chantal Picault, où elle retrouvera son comparse de Sous le soleil de Satan, Gérard Depardieu.