Après Brice de Nice, le réalisateur James Huth retrouve Jean Dujardin et lui fait cette fois porter la mèche de celui qui tire plus vite que son ombre. Les deux complices ont voulu rester le plus fidèle possible à la bande dessinée de Goscinny et Morris dans ce Lucky Luke qui sortira la semaine prochaine.

Quand la proposition d'adapter Lucky Luke au grand écran est venue, le réalisateur James Huth a spontanément donné son accord, en échange de trois conditions «non négociables».

«D'abord, j'estimais qu'il fallait respecter la bande dessinée le plus fidèlement possible afin de retrouver la même émotion que celle ressentie à la lecture des livres, a expliqué le cinéaste au cours d'une entrevue accordée à La Presse. Ensuite, je ne pouvais concevoir ce film sans Jean Dujardin. À mes yeux, Jean correspond intimement à l'idée du personnage, du moins à celui qui existe dans mon esprit. Et puis, je ne me voyais pas tourner ce film ailleurs qu'en Argentine. Même si je n'y avais jamais mis les pieds!»

Dans l'esprit de James Huth, il était hors de question d'utiliser la bande dessinée de René Goscinny et Morris comme simple prétexte pour emprunter une approche plus satirique. Pas question non plus d'enfiler simplement une série de gags.

«Lucky Luke, pour moi, c'est important, dit le réalisateur. J'ai grandi avec lui. Il y a de l'humour dans cette bande dessinée, bien sûr. Mais il n'y a pas que cela. Il y a principalement de l'aventure, du romanesque, du romantisme. Goscinny et Morris ont inventé un univers très particulier. Il était essentiel de faire honneur à la nature même de cet univers en se servant des outils que nous donne le cinéma. À mon sens, du moins.»

Huth, qui partage une bonne complicité avec Jean Dujardin, n'aurait par ailleurs pas fait ce film sans son interprète de Brice de Nice.

«Jean a aussi grandi avec Lucky Luke. Nous partageons la même vision du personnage et de son univers. Aucun autre acteur n'aurait pu se glisser dans ses fringues de cette façon. Non seulement Jean a toutes les caractéristiques du héros, mais il possède aussi un côté plus ténébreux, solitaire. Il est dans son monde. Il est parfois difficile pour quelqu'un de l'extérieur d'y entrer.»

À la demande du réalisateur, le film a été tourné en Argentine. «Il était impossible de tourner Lucky Luke aux États-Unis car nous serions alors tombés dans la caricature la plus totale. Chaque endroit du Far West est déjà très lié à des westerns classiques et aux acteurs qui en étaient les vedettes, de John Wayne à Gary Cooper. Il fallait trouver un endroit vierge. Dieu merci, j'ai trouvé exactement les décors dont je rêvais en Argentine. Ce fut du gros boulot. Mais tous ces efforts ont valu la peine. Le film ressemble à ce que j'avais imaginé.»

On t'aime Térez!

Au cours de sa mission à Daisy Town, Lucky Luke fait la rencontre d'à peu près tous les personnages attendus. Les Dalton et Rantanplan ont toutefois été écartés du récit. Mais Billy the Kid (Michaël Youn), Calamity Jane (Sylvie Testud), Pat Poker (Daniel Prévost), Jesse James (Melvil Poupaud) et Belle (Alexandra Lamy) se posent sur sa route. Cette dernière s'exprime d'ailleurs en chansons avec la voix de... Térez Montcalm!

Comment la chanteuse québécoise, dont le talent vocal est beaucoup mis en valeur dans le film, s'est-elle retrouvée là?

«C'est un véritable coup de chance, affirme le réalisateur. Je suis très fan de Térez. À mes yeux, il y a Billie Holiday et Térez Montcalm. Connaissant ma passion pour elle, ma productrice a organisé une rencontre alors que Térez présentait son deuxième album à Paris. J'en étais alors à l'étape du montage du film. Elle se demandait un peu de quoi il en retournait mais à la fin de notre rencontre, elle m'a révélé qu'on la surnommait Lucky Luke quand elle était petite! J'adore cette femme!»

D'où ce cri du coeur - «On t'aime Térez!» - qu'on peut lire alors que le générique de fin défile...

Sorti au mois d'octobre l'an dernier en France, Lucky Luke a attiré deux millions de spectateurs là-bas. Le score est honorable, mais pas vraiment à la hauteur des attentes.

«Je suis très fier de ce film, dit James Huth. La proposition est ambitieuse, osée, même. Nous aurions évidemment pu faire un «copier-coller» de la bande dessinée, mais il me semblait plus intéressant d'utiliser les possibilités que nous donne le cinéma pour tenter de rendre tous ces personnages véritablement humains. Tirer vers le haut plutôt que vers le bas. En ce sens, le film aurait très bien pu faire l'objet d'un rejet total. Ce ne fut pas le cas. Et j'en suis très heureux.»

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Lucky Luke prend l'affiche le 29 janvier. Les frais de voyage ont été payés par Unifrance.