On la dit indomptée, tourmentée, difficile. Elle dit être plutôt anxieuse, fragile, influençable. «L'écorchée vive» Maïwenn s'amène aujourd'hui au 17e Festival des films francophones Cinémania, riche de ses contradictions. Et avec sous le bras, Polisse, un film évènement.

Il y a maintenant près de six mois, la Croisette était saisie d'un choc qu'elle n'attendait pas. Maïwenn Le Besco s'est amenée à Cannes avec Polisse, un film choral ayant pour cadre la Brigade de protection des mineurs de la police parisienne. Le drame est puissant. Et a laissé bouche bée la majorité des festivaliers. Jusque-là, l'actrice réalisatrice avait offert au monde deux longs métrages inspirés de son expérience personnelle. Le premier, Pardonnez-moi, empruntait des allures thérapeutiques. Le second, Le bal des actrices, proposait une réflexion sur le métier qu'elle exerce, à travers le parcours de plusieurs comédiennes.

Bien que les deux premiers films aient suscité une bonne part de commentaires favorables, personne ne s'attendait à ce que Maïwenn offre si tôt dans sa carrière de réalisatrice un film aussi fort, aussi maîtrisé, aussi accompli. Non seulement Polisse a pratiquement fait l'unanimité chez les critiques, mais cette chronique tissée d'accents de vérité est en train de conquérir le grand public. Sorti en salle le 19 octobre, en France, Polisse a attiré plus d'un million de spectateurs (1 100 000) en deux semaines à peine. Pour un film du genre, on taquine le phénomène.

«C'est grisant, c'est affolant, c'est un peu tout ça à la fois!» lançait Maïwenn au cours d'une entrevue accordée à La Presse, à Paris, la semaine dernière. «Je me suis toujours interdit de tenir quoi que ce soit pour acquis. Quand quelque chose de bien arrive, je reste toujours aussi émerveillée. Tout me surprend. Cela dit, le regard que posent les gens de la profession sur moi a changé. Certains me témoignent sincèrement leur admiration, mais d'autres attendent le faux pas, la maladresse. En France, le succès est parfois suspect!»

Un film sur la police

Dans Polisse, des moments exceptionnels ponctuent un portrait dépeignant la vie quotidienne de policiers confrontés à des histoires d'autant plus horribles qu'elles impliquent toujours des enfants. L'auteure cinéaste aborde pourtant avec humilité l'analyse qu'en font les observateurs.

«Honnêtement, je n'ai pas eu l'impression d'avoir capté quelque chose de plus particulier en tournant les scènes de Polisse, explique-t-elle. Tout simplement parce que j'ai aussi eu le sentiment d'avoir capté d'autres moments exceptionnels dans mes films précédents. Je suis probablement la plus difficile à séduire. Quand on est dans la fabrication des choses, c'est très dur d'aimer ce qu'on fait.»

L'élément déclencheur du film a été la diffusion à la télé d'un documentaire portant sur la Brigade de protection des mineurs. «J'ai alors eu envie de connaître ces policiers de plus près, de les regarder, d'explorer leur quotidien. Je me suis d'abord beaucoup documentée, puis je suis allée les voir. Je les ai côtoyés, je leur ai parlé. Et j'ai commencé à écrire en pensant déjà à certains comédiens.»

Avec sa coscénariste Emmanuelle Bercot, elle a accouché d'un scénario dont l'esprit n'est pas sans rappeler celui de 19-2, l'excellente série réalisée par Podz. Au menu, les histoires individuelles des membres de la Brigade, interprétés par de formidables acteurs (Karin Viard, Marina Foïs et Joey Starr, notamment), et celles, bouleversantes, d'enfants qui aboutissent sous leur protection. Avec, comme consigne, cette volonté d'éviter tout racolage émotif.

«Ma préoccupation principale était de faire vrai, précise l'auteure cinéaste. Tant sur le plan des répliques que des situations.»

Maïwenn estime par ailleurs que son image médiatique ne correspond pas tout à fait à la réalité.

«Je dirais qu'il existe un gros malentendu à propos de mon image. On préfère toujours mettre l'accent sur des traits de caractère plus spectaculaires, mais en réalité, je suis une personne qui doute constamment, qui angoisse tout le temps, et qui est très influençable.»

Après Polisse, Maïwenn compte consacrer la prochaine année à son métier d'actrice. Elle rêve notamment de tourner sous la direction de Philippe Falardeau et de Xavier Dolan. «Je les vénère, dit-elle. Ce sont des dieux!»

Pour l'heure, Maïwenn s'amène à Montréal aujourd'hui afin d'accompagner la présentation en grande première nord-américaine de Polisse au Festival Cinémania, qui se déroule jusqu'au 13 novembre au Cinéma Impérial de Montréal.

Elle participera aussi samedi à une rencontre spéciale, animée par Dennis Trudeau, à laquelle le public est convié.