Les premières bandes-annonces lui avaient fait craindre le pire: un Tintin à l’allure pré-pubère qui jouait du revolver, un capitaine Haddock à l’air méchant qui tirait du bazooka, des vagues «monstrueuses» qui faisaient valser La Licorne.


Mais lorsqu’il a assisté à l’avant-première mondiale du film Les aventures de Tintin: Le secret de la Licorne en compagnie du réalisateur Steven Spielberg et de Fanny Rodwell, la veuve d’Hergé, Jean-Pierre Talbot a été séduit.


Celui qui a prêté ses traits à Tintin dans les films avec acteurs Tintin et le mystère de la Toison d’or (1961) et «Tintin et les oranges bleues (1964) n’a pas tari d’éloges à l’endroit de la superproduction.


«C’était vraiment très chouette. Les petites exagérations, c’est vraiment très bien pour les enfants. Et dans la première partie, pour les nostalgiques, c’est merveilleux parce que c’est vraiment l’ambiance des albums des années 1950», a-t-il exposé à l’autre bout du fil depuis Spa, en Belgique, où La Presse Canadienne l’a rejoint.


Jean-Pierre Talbot formule évidemment certaines critiques en ce qui a trait au visage de son «alter ego», composé à partir d’un visage de dessin animé qui n’a pas été dessiné par le créateur du reporter à la houppette blonde, Hergé.


Une façon pour lui de rappeler qu’après tout, pendant plus de 50 ans, Tintin, c’était lui.
«La première fois qu’Hergé m’a vu, il a dit: "Ah! C’est lui"», se souvient le professeur d’éducation physique à la retraite, qui n’a pas eu peur de plonger lorsqu’un membre de l’équipe de production l’a repéré sur une plage d’Ostende, en Belgique - même s’il n’avait aucune expérience cinématographique et qu’il s’attaquait à un personnage admiré partout en Europe.


«Je ne craignais pas la critique des adultes, mais j’avais quand même une mission: celle de ne pas décevoir les enfants. Ça, pour moi, c’était très important.»


Steven Spielberg a d’ailleurs bien fait d’opter pour la technologie de la capture de mouvement («motion capture»), d’après M. Talbot.


Ce faisant, le réalisateur évitait le jeu des comparaisons avec les deux seuls longs métrages inspirés de l’oeuvre d’Hergé mettant en vedette des personnages en chair et en os.


«Spielberg avait pensé à (Leonardo) DiCaprio, à plein de gens, mais ça n’allait pas. C’était refaire ce qu’on avait fait déjà (...) et il savait bien qu’il n’allait pas trouver un Tintin de ma qualité. Et c’est pas moi qui le dis», lance-t-il en riant à l’autre bout du fil.


«Pour les plus vieux de 40, 50, 60 et 70 ans, malgré mes kilos en trop, malgré mes cheveux qui sont un peu clairsemés et malgré un port de lunettes, je suis toujours leur Tintin, s’exclame-t-il. Ils m’appellent Tintin, je suis toujours Tintin!»


Et de toute façon, les puristes, tintinophiles et tintinologues - à qui ne s’adresse pas véritablement ce film, selon M. Talbot - trouveront toujours quelque chose à reprocher à cette incursion dans l’univers d’Hergé.


Le bédéiste, lui, aurait certainement apprécié, d’après Jean-Pierre Talbot. «S’il voyait le film de Spielberg, il dirait: "Qu’est-ce qu’on s’est bien amusés". Il aurait tapé sur sa cuisse à la Bruxelloise!»


Et de toute façon, Hergé avait déjà donné sa bénédiction au réalisateur d’E.T. lors d’une rencontre qui remonte au début des années 1980, selon Simon Casterman, directeur commercial de la maison d’édition belge.


«Il avait beaucoup d’admiration pour Spielberg, et à cette époque-là, il lui avait dit: "Bon, je sais que je ne pourrai pas tout contrôler. Je suis sûr que ce sera un autre Tintin, mais je suis sûr que ce sera un bon Tintin"», affirmait M. Casterman la semaine dernière lors de son passage à Montréal.


Le film Les aventures de Tintin: Le secret de la Licorne prendra l’affiche dans les salles de cinéma québécoises le 9 décembre.