C'est avec un film produit par Harvey Weinstein, magnat déchu d'Hollywood, que Penelope Cruz a gagné son Oscar. Un an après le début du scandale, l'actrice espagnole assure n'avoir jamais été personnellement harcelée par le producteur et avoir tout ignoré de ses agissements.

« Merci Harvey Weinstein », avait lancé Penelope Cruz en cette soirée de 2009, après avoir reçu la récompense de meilleur second rôle féminin dans Vicky Cristina Barcelona, réalisé par Woody Allen, une autre personnalité dans le viseur du mouvement #metoo.

Depuis, Harvey Weinstein a été accusé de sévices sexuels par une centaine de femmes. Il réfute toute ces accusations de harcèlement et agressions mais a été formellement inculpé de viol. Et son entreprise a fait faillite après le scandale qui a éclaté le 5 octobre 2017.

« Harvey était quelqu'un de difficile, nous le savions tous. Nous avons eu des discussions animées, de nature professionnelle, mais je ne me suis jamais retrouvée dans d'autres situations, jamais », a déclaré à l'AFP Penelope Cruz lors d'un entretien téléphonique.

La liste des vedettes accusant Harvey Weinstein d'abus est longue : Angelina Jolie, Gwyneth Paltrow, Rose McGowan, Lea Seydoux, Rosanna Arquette, Cara Delevingne... Salma Hayek aussi, grande amie de Penelope Cruz, accuse ce « monstre » de l'avoir harcelée sexuellement et menacée de violences parce qu'elle le repoussait.

L'actrice espagnole, 44 ans, est tombée des nues en lisant le témoignage de sa « soeur » dans le New York Times, en décembre dernier.

« Tu ne peux pas reprocher à une amie de ne pas te l'avoir dit à ce moment-là », estime aujourd'hui Penelope Cruz.

Lorsque les premières accusations étaient sorties au grand jour, elle s'était dite « étonnée et profondément attristée ». Selon elle, Weinstein s'était toujours montré « respectueux » avec elle et elle n'avait jamais « été témoin d'un tel comportement » de sa part.

Gare au « lynchage médiatique »

Cela n'empêche pas la protégée d'Almodovar de se montrer solidaire des victimes de harcèlement, celles de Weinstein ou d'autres, car elle insiste sur le fait que le phénomène dépasse de beaucoup le petit milieu du cinéma.

« Je pense que je dois aussi parler au nom des femmes qui ne font pas un métier public. Des femmes de ménage ou des enseignantes, médecins, avocates, des femmes à qui personne ne tend de micro », a-t-elle dit à l'AFP.

« On ne peut pas dire que tout est résolu » mais « ce qui est étalé au grand jour est tellement énorme » que ça marque « le début d'un changement », estime l'actrice, qui prédit « une lutte de longue haleine ».

« Ce n'est pas un conflit des femmes contre les hommes, il faut que les hommes et les femmes combattent ensemble pour obtenir l'égalité », ajoute Penelope Cruz, qui était récemment à Los Angeles pour la promotion du film Escobar, déjà sorti en Europe mais pas encore aux États-Unis.

Elle y joue aux côtés de Javier Bardem, son époux depuis 2010, espagnol et oscarisé tout comme elle. Si l'acteur juge très importants #metoo et les autres mouvements de lutte contre les violences faites aux femmes, il met aussi en garde contre les risques de « lynchage médiatique ».

« Il faut faire attention à ce qu'on fait », a-t-il déclaré à l'AFP. Car lorsqu'une accusation a été portée publiquement, « la personne est considérée comme coupable » sans qu'on lui laisse « l'opportunité de protester de son innocence ».

« Je pense qu'à présent, les gens, aussi bien les hommes que les femmes, sont beaucoup plus conscients » des problèmes de harcèlement, se réjouit Javier Bardem. Il reconnaît toutefois qu'« un long chemin reste à parcourir ».

Lui aussi a gagné son Oscar grâce à un film produit par Harvey Weinstein, No Country for Old Men, des frères Cohen, un an avant son épouse.