La grande surprise dans le nouveau film du cinéaste et polémiste Michael Moore, Michael Moore in TrumpLand, c'est qu'il ne s'en prend pas du tout à Donald Trump. Il fait plutôt les éloges d'Hillary Clinton et espère convertir les électeurs républicains. Un pari qui est loin d'être gagné.

Si vous pensez assister à un film qui révèle de nouvelles informations au sujet de Donald Trump, vous serez déçus. Il n'y a aucune révélation choc dans ce film, aucun commentaire provocateur, ce qui est plutôt surprenant de la part du cinéaste qui a signé les documentaires Bowling for Columbine et Fahrenheit 9/11.

Michael Moore, fervent détracteur de Donald Trump, parle à peine du flambloyant candidat républicain dans ce film d'une heure quinze. «Ce que le pays n'a pas besoin en ce moment, c'est de se faire dire que Trump est fou. Il écrit ce film lui-même chaque jour», a-t-il dit, avant la projection de son film dans un petit cinéma du quartier Greenwich Village mardi soir.

Moore avait annoncé quelques heures plus tôt la première de son film surprise sur Twitter et promis des billets gratuits. Des centaines de personnes ont fait la file à partir de 16h sur Sixth Avenue, transformant le tronçon devant le cinéma en cirque médiatique.

Des spectateurs brandissaient des affiches lumineuses «Dump Trump», une compagnie de tequila, profitant de la manne, distribuait des autocollants «When they go low, we go high» et une machine de divination à l'effigie de Donald Trump (comme celle de Zoltar dans le film Big) est apparue, crachant les phrases choc de Trump.

One-man show

Michael Moore in TrumpLand n'est pas un documentaire. C'est une captation d'un one-man show qu'il a donné dans un petit théâtre à Wilmington en Ohio, en octobre dernier. Le théâtre se trouve ironiquement dans le comté de Clinton, où Trump a reçu quatre fois plus de votes qu'Hillary Clinton lors des primaires. «J'ai voulu filmer ça en territoire Trumpien, aller en territoire ennemi», dit-il.

«Je vais donner aux gens des raisons positives de voter pour elle», a-t-il dit au sujet de l'ancienne secrétaire d'État, pour qui il n'a jamais voté d'ailleurs. «Je ne suis pas un partisan d'Hillary, mais il faut chercher le bon dans Hillary. Je ne dis pas d'oublier le mal, mais il y a beaucoup de bien là-bas».

Moore va même jusqu'à la comparer au pape François. «Le pape a attendu son heure pendant des décennies avant de devenir militant. Ça fait 30 ans qu'Hillary attend son moment et elle va peut-être nous surprendre comme les célèbres 100 premiers jours de Franklin D. Roosevelt». Selon lui, l'idéalisme de jeunesse de la candidate démocrate va rejaillir.

Dans le film, Moore parle des hommes blancs de plus de 35 ans (les «angry white men») qui sont obsolètes au 21e siècle. «Ils le savent et c'est pourquoi ils sont si nombreux aux rassemblements de Trump». Il fait l'éloge des femmes en général. «Aucune femme n'a inventé de bombe atomique ou fusillé une école. Nous n'avons pas à craindre 51% de la population. De quoi avez-vous peur?» questionne-t-il.

Le film comprend également un faux bulletin de nouvelles sur les premiers jours d'une présidence Trump: des attaques aériennes sur les villes frontalières mexicaines, une chaîne de nouvelles télévisées exploitée par Roger Ailes, la déportation de Rosie O'Donnell sont les manchettes.

À trois semaines de l'élection présidentielle, Moore s'adresse aux électeurs des États clés du Michigan, de l'Ohio, de la Pennsylvanie et du Wisconsin. «Les quatre États Brexit, où les électeurs penchent vers Trump, mais pourraient voter à contrecoeur pour Hillary.»

Michael Moore reste optimiste mais inquiet. «Plusieurs personnes vont voter pour Trump juste parce qu'ils sont curieux de voir à quoi le pays ressemblerait. Ils pourraient regretter comme les Anglais qui viennent de quitter l'Europe».

Quel impact aura ce film auprès des électeurs? Probablement aucun. Le film, même s'il est drôle et touchant par bouts, est trop faible en contenu. Moore a avoué lui-même après le film qu'il doute qu'un électeur change d'idée après avoir vu sa pièce de théâtre. «J'espère seulement avoir déprimé le vote pour Trump. Que ceux qui vont voter pour lui le 8 novembre n'amènent pas leurs amis».