Sorti en toute discrétion le 19 février sur le marché nord-américain, The Mermaid s'est hissé en tête du classement des films les plus populaires de tous les temps en Chine.

Il y a un mois, The Mermaid, le plus récent film de Stephen Chow, a très discrètement pris l'affiche sur le territoire nord-américain, dans un circuit d'à peine 35 salles. À Montréal, cette comédie fantastique chinoise, fort divertissante, a pris l'affiche au cinéma Cineplex Forum en version originale avec doubles sous-titres (anglais et cantonais). Les bonzes de Sony Pictures, le studio qui distribue le film chez nous, ont d'ailleurs dû être étonnés en lisant les rapports d'entrées qui traînaient sur leur bureau à leur arrivée, le lundi matin.

Sans publicité aucune, The Mermaid a en effet engendré des revenus de plus de 1 million de dollars. Aucun film chinois n'avait atteint de tels scores depuis 10 ans. Fearless, un film dont la tête d'affiche est Jet Li, avait obtenu des recettes 10 fois plus importantes en 2006, mais il convient de préciser qu'il occupait pas moins de 1806 écrans sur le territoire nord-américain. Dans les circonstances, il est bien difficile de comparer.

Selon les chiffres fournis par Cinéac, un organisme spécialisé dans les statistiques du box-office québécois, The Mermaid avait jusqu'à lundi généré des revenus de 44 075 $ au Québec. Cette performance, d'évidence modeste (le film n'occupait qu'un seul écran), reste quand même très honorable dans les circonstances. La première semaine où le film a été à l'affiche, nos concitoyens d'origine chinoise et les amateurs de cinéma de genre n'ont pas manqué le rendez-vous. D'autant plus que depuis quelques jours, ils avaient eu vent que The Mermaid empruntait les allures d'un véritable phénomène dans l'Empire du Milieu.

Il est vrai qu'en Chine, l'exploitation en salle a connu une expansion gigantesque au cours des récentes années. Au point où l'Amérique du Nord perdra bientôt son titre de marché le plus important du monde. Les films ont globalement généré plus de revenus en Chine au cours du mois de février que partout ailleurs sur la planète. Les chiffres sont éloquents: 1,05 milliard de recettes (en dollars américains), comparativement à 798,6 millions en Amérique du Nord. C'est la deuxième fois qu'une telle chose survient. Selon The Hollywood Reporter, la Chine deviendra le plus important marché dès l'an prochain.

Il y a trois ans, au moment où le gouvernement chinois a assoupli ses règles pour l'entrée de films étrangers, l'Empire du Milieu avait alors surclassé le Japon pour devenir le deuxième marché cinématographique en importance du monde. Depuis, Hollywood en fait une véritable obsession. La France compte aussi s'imposer - à sa façon - sur ce marché. L'Inde ne dédaignerait pas non plus y exporter ses productions bollywoodiennes.

Le bonheur des uns...

Bien entendu, le box-office chinois a fortement bénéficié du succès historique qu'a obtenu là-bas le film de Stephen Chow le mois dernier. The Mermaid est en effet le tout premier film à obtenir des recettes supérieures à 500 millions de dollars américains en Chine. Cette performance exceptionnelle lui permet de ravir le premier rang du palmarès des films les plus populaires de tous les temps sur le territoire, surclassant ainsi Monster Hunt (Raman Hui), une comédie d'action sortie l'été dernier.

Les coproductions entre la Chine et les pays étrangers se font aussi de plus en plus nombreuses. China Movie Channel a notamment participé à la production de Transformers: Age of Extinction, au quatrième rang des plus grands succès populaires au pays de Zhang Yimou.

Les auteurs chinois commencent ainsi à ruer un peu dans les brancards. Ils estiment en outre que ces visées commerciales font en sorte que leurs oeuvres n'ont pratiquement plus de visibilité.

Certains d'entre eux ont pris la parole. L'été dernier, Wang Xiaoshuai (Beijing Bicycle) a réclamé publiquement un peu plus d'espace pour le «cinéma de qualité» en Chine, asphyxié par des productions à vocation plus populaire, offertes sur des milliers d'écrans.

La réalisatrice et productrice Vivian Qu, qui a notamment produit Black Coal (Ours d'or à Berlin en 2014), a aussi exprimé ses inquiétudes lors d'une discussion au Festival international de Pékin. «Alors que gonfle le marché du cinéma en Chine, des expressions comme "cinéma d'auteur" ou "underground" sont devenues beaucoup plus sensibles qu'auparavant», a-t-elle déclaré.

Signalons par ailleurs que l'exploitation en salle de The Mermaid a pris fin jeudi dernier à Montréal, après avoir tenu l'affiche pendant quatre semaines.

Les cinq plus grands succès de l'histoire en Chine

1. The Mermaid de Stephen Chow (505 millions)

2. Monster Hunt de Raman Hui (373,7 millions)

3. Furious 7 de James Wan (371,7 millions)

4. Transformers: Age of Extinction de Michael Bay (320 millions)

5. Mojin: The Lost Legend de Wuershan (255,7 millions)

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Source: Entgroup's China Boxoffice (en dollars américains)