Le réalisateur américain à succès Ron Howard s'est penché, dans son dernier film In the Heart of the Sea, sur l'histoire vraie qui a inspiré le roman Moby Dick, une aventure humaine au moins autant qu'une chasse à la baleine.

Un capitaine ivre de revanche contre un insaisissable cachalot tueur d'hommes. Moby Dick, le roman d'Herman Melville, publié en 1851, est devenu un classique de la littérature américaine et a fait le tour du monde.

Comme beaucoup d'Américains, Ron Howard avait lu le livre à l'école mais ignorait que le récit était inspiré d'une histoire vraie, narrée par Nathaniel Philbrick dans le livre La véritable histoire de Moby Dick, sorti en 2000.

C'est l'acteur australien Chris Hemsworth, connu pour son rôle de Thor au cinéma, qui lui a signalé un script tiré de l'ouvrage, qui végétait à Hollywood depuis plus de 10 ans.

«Je pense que la technologie permettant de recréer le cachalot n'était pas encore disponible jusqu'ici», avance Ron Howard lors d'une rencontre avec la presse à New York.

«J'ai rencontré d'autres réalisateurs et leur problème était toujours le même: ils ne savaient pas comment rendre le cachalot réaliste», abonde Charles Leavitt, auteur du scénario original, dont l'essentiel a été repris par Ron Howard.

Mais en ouvrant le champ des possibles grâce aux effets spéciaux, le réalisateur d'Un homme d'exception et d'Apollo 13 a su garder la technologie sous contrôle, pour qu'elle ne devienne pas le personnage principal de son film.

Un destin tragique

Car In the Heart of the Sea est d'abord une histoire d'hommes, de relations sociales, intimes, sur l'eau, beaucoup, mais aussi sur terre.

En toile de fond, la rencontre entre Herman Melville et Thomas Nickerson, ancien mousse sur l'Essex, navire coulé en 1820 par un cachalot.

Le premier veut construire le roman qui le consacrera sur le récit du second, qui n'a jamais voulu se livrer jusqu'ici, car prisonnier d'un lourd secret.

Le film peint aussi le tableau d'une société, celle de Nantucket, capitale mondiale de l'industrie baleinière au début du XIXe siècle.

Une industrie dirigée par quelques grandes familles, dont est issu George Pollard, le capitaine de l'Essex.

La cohabitation entre ce jeune homme bien né et son second, Owen Chase, fils de fermier mais marin beaucoup plus expérimenté, est l'élément central du récit.

«C'était plaisant de jouer avec les subtilités de leur relation», se souvient Chris Hemsworth, qui incarne Owen Chase, personnage qui a réellement existé.

À la faveur d'un destin tragique, un respect mutuel s'installera finalement entre les deux hommes que tout opposait.

Pour rendre les scènes de mer plus réalistes, le réalisateur américain a beaucoup tourné sur l'eau et fait suivre également à ses acteurs un régime amaigrissant. Une cure qui les a rapprochés, selon Chris Hemsworth.

«On a vraiment formé un groupe, je ne m'attendais pas à ça. Ça m'a rappelé quand je jouais au football (australien), plus jeune», explique l'acteur australien.

Le cachalot au second plan, Ron Howard s'éloigne régulièrement des canons du film d'action pour livrer au spectateur une sorte de huis clos oppressant: des hommes, perdus au milieu de l'océan, avec pour seule ambition de survivre.

Le réalisateur fait ainsi de son 23e long métrage un objet plus ambitieux qu'un film catastrophe à grand spectacle.

Jusqu'au traitement du cachalot même, parabole du rapport de l'homme à la nature, tout à fait dans l'air du temps, et pas seulement machine à tuer.

Pour Ron Howard, l'univers tient davantage de King Kong que des Dents de la mer, celui d'un animal «provoqué par l'homme», dit-il.

«Cette histoire était presque trop belle pour être vraie», résume Nathaniel Philbrick, l'auteur du livre Au coeur de l'océan.