Le réalisateur japonais de films d'horreur Hideo Nakata, qui avait terrifié les spectateurs dans le monde entier avec sa femme fantôme Sadako sortie d'un écran de télévision dans Ring (1998), veut à présent réaliser une comédie romantique.

Mais, en attendant, le maître de la J-Horror, âgé de 54 ans, ne renonce pas à son art de prédilection et revient avec Ghost Theater, long métrage qui sera présenté la semaine prochaine au Festival international du film de Tokyo.

Glaçante, oppressante, la dernière oeuvre de Nakata porte à l'écran une troupe de théâtre hantée par un mannequin démoniaque. «Traditionnellement dans la J-Horror, c'est un fantôme, quelque chose d'immatériel qui apparaît vaguement derrière vous et souvent en flou», a expliqué M. Nakata à l'AFP. «C'est comme Sadako dans +Ring+: quand la télévision s'éteint, on voit son reflet sur l'écran mais lorsqu'on se retourne, elle n'est pas là».

Dans ce dernier film, c'est une poupée à taille humaine, accessoire de théâtre, qui répand la terreur. «Les Japonais avaient pour habitude de décorer leur maison avec des poupées ornementales et il se propageait des histoires de poupée dont les cheveux avaient poussé ou qui avait un peu tourné la tête. Et les gens se mettaient à parler de poupées possédées par les esprits».

Hideo Nakata restera peut-être à jamais associé à la figure livide et aux longs cheveux crasseux de Sadako qui, dans une scène horrifiante, s'extrait du puits abandonné où son corps avait été jeté puis sort de l'écran de télévision, rampe dans la pièce, se relève et fixe d'un regard assassin sa victime. Le film avait rapporté 100 millions de dollars au box-office.

«À l'époque les gamins avaient la télévision dans leur chambre, parfois même avec un magnétoscope. J'aimais l'idée d'utiliser les appareils électriques les plus simples, comme cet écran par lequel Sadako, qui n'existait que sur cassette vidéo, sort de l'enfer et prend vie».

M. Nakata pense que la popularité de la J-Horror à l'étranger est en partie due à un public occidental fatigué de la violence sanglante.

Des âmes en peine qui font tant peur que pitié

«Les spectateurs américains avaient plus l'habitude de zombies qui attaquaient des humains», dit M. Nakata. Lui-même préférait parmi les films d'horreur ceux qui n'avaient pas recours à des détails et effets horribles.

«J'allais à l'école dans les années 1970 et des films tels que L'exorciste, La malédiction ou Suspiria étaient des must», raconte-t-il. «Mais je n'appréciais pas autant les films comme Evil Dead, avec toute sa cruauté grotesque», dit-il, en référence à l'oeuvre de Sam Raimi. «Cela fait juste trop faux quand il y a trop de sang», ajoute-t-il. «Dans Ring j'ai essayé au maximum de le limiter et je crois qu'il n'y a qu'un peu de sang coagulé autour des ongles».

Pour Hideo Nakata, les fantômes qu'il a créés ou qu'ont aussi fait connaître ses contemporains, comme le réalisateur de la série Ju-on Takashi Shimizu, devraient susciter tant la sympathie que la terreur.

«Dans les films d'horreur occidentaux il y a toujours une lutte entre le bien et le mal et de la morale chrétienne», estime-t-il. «Les fantômes japonais comme Sadako sont des démons, oui. Mais de son vivant elle a été traitée de manière abominable et a été victime de terribles abus avant sa mort. Elle possède à présent le pouvoir de maudire ou tuer les gens mais elle n'est pas le mal pur. Il est possible d'avoir pitié d'elle».

Le cinéaste japonais voit toujours son avenir dans l'horreur mais souhaite dans le même temps briser ses chaînes et créer une comédie romantique.

«Je voudrais sortir de l'horreur mais si j'annonçais une telle chose, je risquerais de me retrouver sans travail. Je voudrais faire quelque chose dans le genre du Nouveau stagiaire (avec Robert De Niro et Anne Hathaway)», dit-il en souriant.

«Mais les films d'horreur sont un genre indestructible et, tant qu'il y aura des gens qui veulent mourir de peur, je continuerai de chercher des moyens de leur faire peur», promet-il.