Pour avoir vu Pineapple Express et This is the End, nous connaissions l'humour potache, très imbibé de cannabis, du duo Rogen-Goldberg, créateurs montants de Hollywood. On peut dire que The Interview pousse la débilité - c'est un compliment - encore plus loin.

Avec ceci de particulier qu'ils s'attaquent directement à Kim Jong-un, leader de la Corée du Nord, dans un film qui nous rappelle l'expression «l'empereur est nu»...

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Les conséquences n'ont pas tardé et vont au-delà de la réaction appréhendée: un groupe de hackers surnommé «Les gardiens de la paix» a piraté les ordinateurs de Sony Pictures, dévoilant des informations très personnelles sur ses stars et ses hauts dirigeants, ce qui alimente les sites à potins, maintenant menacés de poursuites par Sony.

Dernier chapitre de ce feuilleton pas mal fou: le même groupe promet maintenant de s'en prendre aux cinémas qui présenteront le film et Sony Pictures l'a finalement largué.

Mais pourquoi avoir choisi un personnage réel plutôt qu'un personnage fictif pour cette comédie?, avons-nous demandé à Evan Goldberg. «On ne recherche pas les ennuis», a répondu le coauteur, producteur et réalisateur du film.

«Après This is the End, où les acteurs jouaient leurs propres rôles, nous avons pensé que ce serait plus intéressant, parce que les thrillers politiques sont toujours un peu dans la fiction, a-t-il poursuivi. Les histoires qui nous arrivaient de la Corée du Nord étaient tellement fascinantes que c'était presque impossible de ne pas faire quelque chose sans utiliser cette situation extrêmement bizarre.»

Ce n'est certes pas la première fois dans l'histoire du cinéma qu'on utilise des personnalités politiques réelles pour les besoins d'une comédie. On n'a qu'à penser au Dictateur de Charlie Chaplin. Mais l'un des modèles pour Evan Goldberg a été Dr. Strangelove de Kubrick.

«Personne n'aime ce film seulement pour les questions politiques. C'est une partie de ce qu'on aime et c'est un film extrêmement drôle. Nous voulions en premier faire un film drôle et ça nous semblait quelque chose d'unique de le baser dans un endroit réel. Tous les pays peuvent être critiqués et nous sommes devenus intéressés par ce qu'on voyait en Corée du Nord. Ils disent constamment des choses étranges, au premier degré. On ne s'attendait pas à ce qu'ils réagissent par des commentaires aussi durs, mais ce n'est pas totalement un choc. Ils vont en revenir...»

Evan Goldberg tient à le préciser: The Interview se moque autant de la rhétorique guerrière de la Corée du Nord que de l'information-spectacle à l'américaine.

Dans cette comédie, un animateur incroyablement stupide et imbu de lui-même (James Franco) et son réalisateur (Seth Rogen), tous deux embêtés de ne pas être considérés comme des journalistes «sérieux», décrochent une entrevue exclusive avec Kim Jong-un, mais sont sollicités par les services secrets qui leur demandent d'utiliser ce prétexte pour assassiner le leader nord-coréen.

Le film, truffé de niaiseries et de nombreux rebondissements, se veut en même temps un hommage aux films d'action, mais tout le monde y est profondément imbécile.

«Tout ce qui touche la Corée du Nord reçoit beaucoup d'attention, mais ce film taille en pièces les deux pays, dit Goldberg. L'Amérique est un endroit fou, avec des tonnes de problèmes, c'est un pays important, peut-être le plus important, mais c'est une imposture en même temps.

«Je pense que la plupart des gens sont heureux que l'Amérique existe, comme moi, mais cela dit, ils ont développé une culture qui est vraiment perturbante en ce qui concerne les médias ou ce qu'on pense des médias. Nous sommes des gens qui travaillons dans le divertissement, mais nous exprimons nos questionnements envers ça.»

Dans cette surenchère de menaces, on semble oublier que The Interview n'est vraiment qu'une comédie dont l'unique but est de faire rire, pas de déclencher la troisième guerre mondiale.

Des vedettes réagissent sur Twitter

«Je crois qu'il est disgracieux que ces salles de cinéma ne projettent pas The Interview. Va-t-on retirer à l'avenir n'importe quel film qui reçoit des menaces anonymes?» - Judd Apatow

«@JuddApatow Je suis totalement d'accord. C'est un acte non américain de lâcheté qui valide les actions terroristes et crée un précédent effrayant.» - Jimmy Kimmel

«Chers pirates de Sony: maintenant que vous gouvernez Hollywood, j'aimerais avoir moins de comédies romantiques, de films de Michael Bay et plus jamais de Transformers.» - Michael Moore

«Difficile de croire que c'est la réponse à donner à une menace contre la liberté d'expression ici en Amérique.» - Ben Stiller

«Wow. Tout le monde a cédé. Les pirates ont gagné. Une victoire totale et complète pour eux. Wow.» - Rob Lowe

«J'offre @SonyPictures 100 000 $ pour les droits de The Interview. Je vais l'afficher gratuitement sur mon blogue. s'il vous plaît entrez en contact avec moi @SonyPicturesBr.» - Paulo Coelho

«Je ne peux croire que #TheInterview ait été annulé. Je suis en état de choc. Un film ne mérite pas qu'on se mobilise pour le défendre, mais un principe, si.» - M. Night Shyamalan

«Réjouissons-nous simplement que la Corée du Nord n'ait pas eu de problème avec The Golden Girls.» - Billy Eichner

«La décision de Sony de retirer The Interview est déconcertante à tant de points de vue. Une chance qu'ils n'étaient pas l'éditeur des Versets sataniques.» - Stephen King

«C'est l'armée américaine qui devrait sortir le film #TheInterview!» - Martin Petit