La production de Dominion, un film américain tourné à Montréal et au Nouveau-Brunswick il y a quelques mois mettant en vedette John Malkovich, est à court de financement.

Résultat: une cinquantaine de membres de l'Association québécoise des techniciens de l'image et du son (AQTIS) attendent leur chèque de paie couvrant leur dernière semaine de travail qui s'est terminée fin juin.

Pour ces techniciens, les sommes en jeu seraient d'environ 100 000 $, indique Charles Paradis, directeur des relations de travail du syndicat. La somme de 100 000 $ inclut l'indemnité quotidienne ainsi que le salaire de techniciens demeurés plus longtemps sur place pour clore le film.

«Le producteur n'a pas cessé de nous promettre de payer, mais le dernier courriel qu'il nous a envoyé indique qu'il n'a pas d'argent pour faire la postproduction. Sans postproduction, il n'y a pas de distribution et donc, pas de recettes. Nous songeons à entreprendre des recours juridiques pour protéger les salaires de nos membres», indique Charles Paradis en entrevue téléphonique.

M. Paradis ajoute qu'un grief a été déposé et qu'un arbitre devrait être nommé dans ce litige.

Certains techniciens de l'AQTIS auraient aussi loué à la production des équipements de cinéma leur appartenant et n'auraient pas été payés pour ces services.

Plus d'une quinzaine de fournisseurs de services dans le domaine du cinéma seraient également impliqués dans l'imbroglio. Parmi eux, on compte Fabricant d'accessoires et décorations Anderson (FADA) à qui la production doit 90 000 $. «Je crois être le fournisseur à qui l'on doit le plus d'argent, indique Alex Anderson, propriétaire de l'entreprise. Je suis dans ce domaine depuis 1980 et d'ordinaire, il existe sur le plateau un contrôleur qui autorise les dépenses avant qu'elles ne soient faites. Or, je pense que dans le cas présent, on a autorisé des dépenses sans avoir l'argent nécessaire.»

Écrit et réalisé par Steven Bernstein, Dominion est un biopic consacré aux derniers jours de la vie de Dylan Thomas, écrivain et poète du pays de Galles mort à 39 ans à New York le 9 novembre 1953 alors qu'il était en tournée littéraire.

Dylan Thomas est incarné par Rhys Ifans (The Amazing Spider-Man, Notting Hill, Harry Potter), alors que John Malkovich interprète le rôle du Dr Felton, médecin de Thomas.

À l'origine, le film était produit par Richard N. Gladstein, un membre de la communauté hollywoodienne associé à de nombreuses grosses productions telles The Nanny Diaries, The Bourne Identity et Pulp Fiction. Lorsque la production a commencé à manquer de liquidités, Nolan McDonald, un producteur du Nouveau-Brunswick, a pris les commandes dans l'espoir de sauver le film du naufrage.

Postproduction en suspens

Joint par La Presse à Los Angeles, Nolan McDonald a reconnu que le film est en difficulté, mais il n'a pas voulu s'avancer sur les sommes en jeu. Il dit qu'à l'heure actuelle, la postproduction est en suspens, faute de liquidités.

Selon ce dernier, un enchaînement de problèmes survenus en cours de route est à l'origine des difficultés financières.

«Nous étions censés tourner dans un bar désaffecté, raconte le producteur. Malheureusement, nous nous sommes rendu compte à la dernière minute qu'il y avait de la moisissure sur les lieux. Nous avons été obligés de changer d'endroit à la dernière minute et d'aller tourner en studio. Cela nous a coûté beaucoup d'argent. Et au Nouveau-Brunswick, à la suite d'un imbroglio, nous avons accepté de payer des gens qui devaient participer bénévolement à titre de figurants.»

M. McDonald indique aussi que les crédits d'impôt québécois obtenus par la production ont atteint la moitié de la somme anticipée.

Par ailleurs, Nolan McDonald affirme que sans son intervention, ce n'est pas un, mais trois chèques de paie que les techniciens de l'AQTIS attendraient.

«Nous nous sommes associés à ce projet alors qu'il était déjà en cours et avons fait en sorte que le tournage soit complété. Je remercie encore une fois les techniciens pour leur patience. Je travaille maintenant à trouver de nouveaux partenaires afin de boucler la postproduction. Mais une mauvaise presse n'aidera personne», dit M. McDonald.

Le film est doté d'un budget de près de 5 millions de dollars.