Plus des deux-tiers des films muets tournés aux États-Unis entre 1912 et 1929 sont perdus, dont certains de Lubitsch ou de la star Clara Bow, dénonce mercredi un rapport publié par la Bibliothèque du Congrès demandant des mesures de conservation.

Le rapport, réalisé sous l'égide de l'association nationale de préservation du film NFPB, indique que sur les quelque 11 000 films muets de fiction réalisés pendant la période du cinéma muet «seulement 14% - soit 1575 titres - subsistent dans leur format original 35 mm».

Près de 11% n'existent plus qu'en version étrangère ou format différent de moindre qualité, en 28 mm ou 16 mm, et 5% sont incomplets, ajoute l'étude intitulée «La survie des films muets américains: 1912-1929» et signée par l'historien et archiviste David Pierce.

Les films muets, relégués très vite dans les oubliettes de l'histoire avec l'avènement du parlant dont la télévision a amplifié l'audience, ont été notamment victimes de leur fragilité car le film nitrate prend facilement feu.

Ils ont aussi été victimes de leur «manque de valeur commerciale et d'une longue période de désintérêt aussi bien de la part de leurs propriétaires que du public», souligne M. Pierce.

L'étude note ainsi la disparition de quatre films de Clara Bow, qui fut l'une des grandes vedettes du muet, la quasi disparition de The Patriot (1928) de Ernst Lubitsch, nommé aux Oscars, ou d'une version 1926 de Gatsby Le Magnifique.

Tous les films de Buster Keaton, Charlie Chaplin et Harold LLoyd existent encore, poursuit le rapport, mais «pour chaque film qui survit, cinq ou six n'ont pas survécu», dont beaucoup qui étaient à l'époque d'importance égale à ces classiques, déplore-t-il.

Parmi les 3311 films qui restent, un sur quatre ont été retrouvés dans un pays étranger et un quart d'entre eux ont depuis été rapatriés. La plus grande collection de films américains exportés se trouvait dans les archives de la République tchèque, précise l'étude.

«Ce rapport est d'une valeur inestimable car l'art du cinéma muet est essentiel à notre culture», explique dans un communiqué Martin Scorsese, militant de longue date pour la préservation des films et réalisateur de Hugo qui rend hommage au cinéma muet et au réalisateur français Georges Méliès.

Pour sauvegarder ce qui doit l'être ou retrouver ce qui est perdu, le rapport lance quelques recommandations comme la mise en place d'un programme de rapatriement des films ou des collaborations accrues avec les collectionneurs privés ou les studios pour identifier et préserver les films.