Ses rôles de maladroit, de distrait ont fait de Pierre Richard un vrai comédien populaire. Les boucles dorées se sont raidies avec le temps, la barbe est plus blanche mais Pierre Richard, l'homme aux quelques 40 millions d'entrées, n'a rien perdu de son sens de l'humour.

Lors d'une classe de maître pendant le Festival Lumière de Lyon, au cours de laquelle il a répondu devant le public aux questions d'un journaliste spécialisé, le «grand blond avec une chaussure noire», 79 ans, est revenu sur sa «période burlesque/poétique».

Classe de maître? Le comédien, mauvais élève paraît-il, avoue que les deux mots lui «ont mis la trouille». «Tout à coup j'ai 15 ans de pension religieuse qui me sont revenus!». En réalité il en a fait sept.

En revanche, il a bien décidé de devenir acteur en séchant le lycée pendant l'année du bac, raconte-t-il. Un jour, il entre dans un cinéma de Valenciennes, sa ville natale, et visionne Un fou s'en va t'en guerre avec le comédien américain Danny Kaye. Le choc. «Quand j'ai vu le film je me suis dit: «J'ai compris. C'est cela que je veux faire»».

Le deuxième personnage clé est le réalisateur et producteur Yves Robert, qu'il avait connu au théâtre. Lui «était une star pas moi!» Un jour, il lui écrit un petit rôle dans Alexandre le bienheureux (1967). «Pendant le tournage il m'a dit «Tu n'es pas un acteur! Tu n'as aucune place dans le cinéma français, fais ton cinéma toi-même!»»

Le comédien apprendra sur le tas à devenir réalisateur, signant en 1970, un premier film, Le distrait, son premier succès.

Pierre Richard parle d'un film «un peu maladroit» mais «il a apporté un souffle nouveau dans le cinéma» à une époque où les comédies marchaient «surtout parce que les acteurs étaient tellement drôles comme Michel Galabru et Darry Cowl, même en lisant le bottin!», relève-t-il.

Gags visuels

Avec lui, le gag visuel prend toute sa place. Ses références sont Buster Keaton, Charlie Chaplin, Jerry Lewis et Jacques Tati, «tous ceux qui ont fait du burlesque, un genre avec lequel je me sentais spontanément le plus proche», confie-t-il.

Sa recette pour réussir les gags? «Ce qui me fait rire, je le mets dans les films». Et puis il y a «la gestuelle, la base du burlesque» dit encore le comédien selon lequel «il n'y a pas d'acteurs aujourd'hui qui jouent avec les jambes».

«Outre la distraction et la maladresse, le burlesque c'est aussi le décalage du personnage dans une société, un contexte».

Dans ses films, il y a encore autre chose, «une dimension dénonciatrice». «Le distrait est une critique de la publicité. Dans Les malheurs d'Alfred (1972, ndlr), les jeux télévisés sont pointés du doigt. Dans le troisième Je ne sais rien mais je dirai tout en 1973, ce sont les marchands d'armes».

«Je me servais d'un personnage burlesque pour envoyer des petites bombes», résume-t-il.

En 1976, il redevient simple acteur dans Le jouet, premier film de Francis Veber, scénariste notamment d'Yves Robert dans un autre succès avec Richard, Le grand blond avec une chaussure noire (1972).

«Le jouet est encore un film à dimension sociale! Celui du pouvoir de l'argent, du cynisme», dit-il.

Veber va avoir l'idée ensuite de former un duo gagnant: Pierre Richard et Gérard Depardieu. Arrive en 1981 La chèvre, succès au box-office, puis en 1983 Les compères et en 1986 Les fugitifs.

Pierre Richard partage avec Depardieu l'amour pour le vin et la Russie, «mais moi je ne fréquente pas le pouvoir!», s'amuse l'acteur dont un des films préférés est Dersou Ouzala, du Japonais Akira Kurosawa, qui se déroule dans la taïga.

Gérard Depardieu s'est vu octroyer en jenvier la nationalité russe par le président Vladimir Poutine, après une polémique avec le gouvernement socialiste français qui avait qualifié de «minable» sa décision de quitter la France pour échapper à un nouvel impôt de 75% sur les hauts revenus.

Depuis ses années burlesques, Pierre Richard a alterné comédies et drames, cinéma et théâtre et même le tournage d'un documentaire en 1987, Parlez moi du Che. Comme d'autres comiques, «on veut prouver qu'on peut faire autre chose», dit l'acteur.