Neuf plateaux de tournage et une école de cinéma gratuite installée dans une ancienne centrale thermique à Saint-Denis (Seine-Saint-Denis): douze ans après avoir été imaginée par Luc Besson, la Cité du cinéma a été officiellement inaugurée vendredi.

Dans la grande nef de la cité, dont la restauration a été effectuée dans le respect du style Eiffel d'avant guerre, professionnels du cinéma, investisseurs et médias écoutent attentivement le maître de ces lieux.

Luc Besson est ému. L'ancien gamin sorti tôt du système scolaire par amour du cinéma, qui a appris son métier auprès de techniciens qu'il ne remerciera «jamais assez», puis le réalisateur talentueux obligé de s'expatrier, «le coeur gros», faute de structures en France, voit son rêve se réaliser.

Grâce à la Cité du cinéma, pôle cinématographique unique en Europe, implanté au beau milieu de «9-3» (le numéro du département) et que ses concepteurs ambitionnent de transformer en un «Hollywood à la française», il sera désormais possible de tourner en France un film de A à Z.

«Je ne suis pas très doué pour les discours, donc je vais vous raconter une histoire, une histoire d'amour, celle d'un enfant de 17 ans qui montait sur les camions de la SFP (Société française de production) pour entrer dans les studios de Boulogne» (fermés à la fin des années 70), lance Luc Besson, 53 ans aujourd'hui.

Le réalisateur-producteur se rappelle son séjour à Londres où il tourna Le cinquième élément, la promesse qu'il s'était alors faite de pouvoir un jour «faire des films en France». Mais «si les Américains ont un slogan ''yes, we can'', en France, le slogan, ça serait plutôt: ''ça va pas être possible''», ironise-t-il.

Sauf que le jeune homme d'alors a en lui les ressources suffisantes pour faire mentir le slogan. Il lui faut trouver le lieu: ce sera cette ancienne «cathédrale industrielle», qui servait à alimenter le métro parisien, nef de béton et d'acier de 200 mètres de long sur vingt de large, repérée lors du tournage de certaines scènes de Nikita (1990) et Léon (1994).

Deux écoles

Grandiose, cette nef est «l'épine dorsale» de la cité autour de laquelle s'articulent toutes ses autres structures: neuf plateaux de tournage (de 600 à 2100 m2) à l'accoustique ultra-moderne, des ateliers de peinture, menuiserie, serrurerie, les locaux de Ecole nationale supérieure Louis Lumière qui a quitté Noisy-le-Grand pour se relocaliser dans la Cité, et ceux de L'école de la cité.

Créée de toutes pièces par Luc Besson, cette école accueillera, à partir d'octobre, gratuitement pendant deux ans, une soixantaine d'élèves, sans conditions de ressources ni de diplômes.

Le financement a été bouclé en 2008: 170 millions d'euros tout compris, dont 140 millions pour l'achat du foncier, détenu à 100% par la société Nef-Lumière (75% pour la Caisse des dépôts, 25% pour le groupe Vinci) et 30 millions pour la construction des plateaux de tournage (Frint line, EuropaCorp, Euro Média group, Quinta communications).

«La Cité du Cinéma, c'est une belle histoire d'amour entre un lieu et un homme», a résumé vendredi Patrick Braouzec, président de Plaine commune (agglomération de huit villes de Seine-Saint-Denis), présent à l'inauguration et séduit dès le début par le projet du cinéaste.

Absente pour «des raisons d'agenda» selon son entourage, la ministre de la Culture Aurélie Filippetti viendra visiter la cité dans quelques semaines. Luc Besson a lu un message de la ministre dans lequel elle rend hommage à «la vitalité du cinéma français».

Un dîner privé devait réunir dans la soirée de nombreuses stars (Sophie Marceau, Jean Dujardin, Jamel Debbouze, Alain Terzian, Robert de Niro, Michelle Pfeiffer...). Samedi, «une journée exceptionnelle de visite» sera également organisée à l'intention des Dyonisiens par Plaine Commune.