Le 37e Festival international du film de Toronto (TIFF) s'ouvre jeudi. Une pléiade de stars du septième art est attendue dans la Ville reine jusqu'au 16 septembre. On s'essouffle presque à les nommer...

Viggo Mortensen, Will Smith, Johnny Depp, Penelope Cruz, Marion Cotillard, Javier Bardem, Gwyneth Paltrow, Keira Knightley, Jake Gyllenhaal, Jennifer Lawrence, Julianne Moore, Gael García Bernal, Naomi Watts, Dustin Hoffman, Ben Affleck, Jackie Chan, Tom Hanks, Halle Berry, Bill Murray, Robert Redford, Ryan Gosling, Robert De Niro, Jennifer Connelly, Billy Bob Thornton, Bradley Cooper, Colin Firth, Kiefer Sutherland et plusieurs autres encore.

Le Festival de Toronto est devenu, depuis plusieurs années déjà, la rampe de lancement préférée des principaux candidats aux Oscars. Mais le TIFF n'est pas que ça, rappelle son directeur artistique Cameron Bailey, que j'ai eu l'occasion d'interviewer cette semaine.

Le TIFF, c'est aussi l'un des plus prestigieux festivals de films du monde, avec Cannes, Berlin et Venise. Qui présente, tous hors compétition, de nombreuses primeurs mondiales très attendues, ainsi que certains des films les plus célébrés dans les autres festivals, dans son quartier général ultra moderne, le Bell Lightbox.

Le Festival de Toronto a du reste remplacé le Festival des films du monde comme événement de prédilection de l'industrie cinématographique québécoise. Y seront notamment présentés en première mondiale Inch'Allah d'Anaïs Barbeau-Lavalette et Tout ce que tu possèdes de Bernard Émond. Rencontre avec le responsable de ce menu cinéphile aussi appétissant que gargantuesque.

Comment le Festival se distingue-t-il cette année des années précédentes?

Le festival est un peu plus gros. Nous avons ratissé plus large, partout dans le monde. Nous avons des films de 72 pays, comparativement à 65 l'an dernier. La représentation internationale n'a jamais été plus grande. Il y aura aussi 146 premières mondiales, un record pour nous, et 75 premières oeuvres. Le festival a grandi, mais il a bien grandi. Il y a bien sûr des cinéastes connus, mais aussi beaucoup de nouveaux réalisateurs, qui viennent enrichir et diversifier la programmation. Nos soirées de gala, qui sont souvent perçues comme une sélection de candidats potentiels aux Oscars, avec des stars sur le tapis rouge, seront animées par 12 pays, notamment l'Italie et le Pakistan.

Que répondez-vous à ceux qui critiquent le Festival en disant qu'il sert trop les intérêts de Hollywood?

C'est essentiellement une création médiatique, à mon avis. Les médias cherchent des histoires qui intéressent leurs lecteurs et leurs auditeurs. Les vedettes hollywoodiennes qui viennent à Toronto ont beaucoup d'attention médiatique et c'est dans l'ordre des choses. Mais notre objectif est avant tout de faire connaître des films et des auteurs. Dans nos soirées, il y a des films de François Ozon, d'Yvan Attal, de Bahman Ghabadi. Il y a une grande diversité d'oeuvres et de cinéastes. C'est une erreur de croire que nous servons les intérêts de Hollywood. C'est faux.

Et que répondez-vous à ceux qui disent que le Festival est trop gros pour son propre bien?

Le public ne se plaint jamais qu'il y a trop de bons films au Festival! Seulement les journalistes! Notre festival est ouvert au public, contrairement à d'autres événements réservés aux professionnels. C'est ce qui fait sa personnalité. Il faut trouver un équilibre entre ce qui convient au public et ce qui convient aux journalistes et aux autres professionnels du milieu. Chacun a ses propres besoins. Le Festival a grandi de manière progressive, en s'imposant bien des restrictions. Ce n'est pas à dessein que le Festival est plus gros cette année. Nous avons une équipe de programmateurs formidable, partout sur la planète, qui recherche les meilleurs films disponibles. Nos collaborateurs sont très autonomes et voient énormément de films avant de nous faire des suggestions. C'est un casse-tête énorme, évidemment. On y met bien des efforts. À l'arrivée, l'important est d'avoir une programmation de qualité.

Vous avez encore cette année une programmation de films québécoise très enviable...

Nous avons beaucoup de chance de pouvoir présenter en première mondiale, dans la section Masters, Tout ce que tu possèdes de Bernard Émond, qui fréquente le festival depuis plusieurs années. Et d'autres très beaux films comme Inch'Allah d'Anaïs Barbeau-Lavalette ou Rebelle de Kim Nguyen, qui a été présenté aux festivals de Berlin et de Tribeca. Même s'ils ont parfois été présentés ailleurs, à Locarno, à Venise ou à Cannes, nous avons à coeur de présenter des films québécois. Et pas seulement pendant les 11 jours que dure le Festival. Monsieur Lazhar a été diffusé pendant un mois dans notre édifice (le Bell Lightbox). Il y a un public friand de cinéma québécois à Toronto. Parce que le cinéma québécois a une voix distincte.

C'est une voix qui est de moins en moins entendue au Festival des films du monde de Montréal. Cette année en particulier, l'industrie québécoise semble avoir préféré le TIFF au FFM. Pourquoi selon vous?

Les festivals de films ont différentes missions. Certains festivals servent de rampe de lancement médiatique à des films. Il y a beaucoup de médias ici pendant le Festival. Il s'y brasse aussi beaucoup d'affaires. Le marché américain fait beaucoup d'affaires à Toronto. C'est un Festival de choix pour se faire connaître, et vendre son film à l'étranger. Je comprends pourquoi l'industrie québécoise aime venir à Toronto. Et j'espère ne rien enlever au milieu du cinéma à Montréal. Tout ça peut être complémentaire.

Comment entrevoyez-vous l'avenir du TIFF et son évolution sur l'échiquier des Festivals? Sentez-vous une pression particulière d'autres événements en Amérique du Nord comme Telluride, Sundance ou New York?

Nous ne sommes pas préoccupés par ça. Nous sommes très choyés. Nous occupons une place enviable dans le calendrier. Nous n'avons aucun besoin et aucune volonté de concurrencer d'autres festivals. Au contraire. Nous sommes dans une logique de collaboration. Et les autres festivals l'ont bien compris. C'est pourquoi nous continuons de présenter plusieurs des films qui y ont été sélectionnés auparavant. Notre objectif est de présenter d'excellents films et de faire découvrir des cinéastes de talent qui ont souvent besoin de notre soutien.