Coutumière des scénarios autobiographiques, Charlotte de Turckheim a eu l’idée de s’intéresser aux gros… après avoir elle-même pris pas mal de poids. Mince alors!, son troisième film, traite, sous forme de comédie, d’un problème de société : l’obésité.

« Quand on porte du 38-40, ça va, mais quand on arrive à du 46-48, les copines commencent à dire qu’il faut faire attention », témoigne de sa voix chaleureuse, nullement amère, l’actrice et réalisatrice française Charlotte de Turckheim, jointe par téléphone à Paris.

Dans le film, c’est la mère et le conjoint de Nina qui lui intiment sans ménagement de perdre une dizaine de kilos. « La société actuelle est comme ça », déplore celle qui a scénarisé et réalisé Mince alors !. Elle dit s’inquiéter de l’obsession pour la maigreur, notamment dans le milieu de la mode : « On a commencé à voir des mannequins qui mouraient de faim. Mais dans quel monde vivons-nous ? »

C’est à partir de ce constat que lui est venue l’idée de cette comédie dramatique. Dans Mince alors !, Nina se voit offrir un séjour en cure d’amaigrissement par son copain, avec qui elle dirige une maison de confection de maillots de bain.

L’absurde de la situation tient beaucoup à la beauté de l’actrice principale, Lola Dewaere, une perle rare que Turckheim se réjouit d’avoir dénichée : « Il fallait à la fois qu’elle soit belle, que les spectateurs la trouvent jolie et qu’elle soit ronde. Il n’y a pas beaucoup d’actrices comme cela en France. »

Pendant la cure, Nina se lie d’amitié avec une mère de famille, Émilie, qui affirme s’aimer comme elle est. L’actrice Catherine Hosmalin, meilleure amie de Charlotte de Turckheim dans la vie, lui a beaucoup servi d’inspiration.

« On a beaucoup discuté, son personnage, c’est ce qu’elle est et ce qu’elle vit, indique Charlotte de Turckheim, faisant allusion à l’ambiguïté entre une volonté de s’accepter avec des kilos en trop et une souffrance bien réelle. "Big is Beautiful", ce n’est pas vrai, il ne faut pas se voiler la face. De plus en plus, nos sociétés ont un vrai problème avec l’obésité », estime-t-elle.

Traiter un sujet tabou comme le surpoids exigeait une légèreté de ton et la scénariste-réalisatrice voulait vraiment que son film oscille « entre le rire et l’émotion ». Admirative de films tels Billy Elliot (Stephen Daldry, 2000), The Full Monty (Peter Cattaneo, 1997) ou encore Muriel (Paul John Hogan, 1994), elle situe son film dans la catégorie des « comédies d’auteur ». « Pour moi, Intouchables, qui mélange la comédie et le drame, c’est le top, c’est génial ! », s’enthousiasme-t-elle.

Filmer les corps de gros comme elle le fait dans Mince alors ! reste, selon elle, une exception : « On ne voit jamais ça dans les films, même les figurants ne sont jamais gros. Pour une fois, ils ne sont pas cachés », constate Charlotte de Turckheim, qui n’épargne toutefois pas aux spectateurs quelques clichés : l’un casse un pied de sa chaise en s’asseyant, une autre reste coincée dans la baignoire...

Si le trio de copines qui se forme dans le décor champêtre de ce Club Med alpin parvient à résoudre quelques problèmes, Charlotte de Turckheim refuse de faire passer un quelconque message.

« Je n’aime pas ça, je ne veux pas dire aux gens ce qu’il faut faire ou pas. S’il y avait une morale, ce serait seulement celle de la tolérance », dit-elle. Sorti au printemps en France, son film a toutefois mis du baume au cœur à bien des spectateurs : « Les gens en surpoids, lors des projections, étaient émus », a constaté la réalisatrice.